A MADAME
LA COMTESSE
DE GVICHE.
MADAME,
Auſſi-toſt que je me ſuis re-
ſoluë à laiſſer ſortir ce Livre de
mes mains, j’ay eſté inspirée de
vous en faire un ſacrifice. Mon
cœur tout transporté, ſans faire
reflexion ſur la grandeur de vo [ID00008] ſtre
merite, & ſur les défauts de
mon Ouvrage, y a conſenti avec
ioye: la raiſon m’a voulu faire
connoiſtre ma temerité; elle m’a
fait un Portrait de vos perfe-
ctions ſi éclatant, que ie n’ay pû
conſiderer voſtre illuſtre Naiſſan-
ce, voſtre grande Vertu, &
voſtre rare Beauté, qu’avec un
reſpect meſlé de crainte & de ve-
neration. Elle m’a repreſenté les
ſervices que vos Anceſtres ont
rendu à la France, la conduite
du Conneſtable de Leſdiguieres,
& la ſage adminiſtration du Duc
de Sully, que le plus grand de
tous les Monarques ne ſe con-
tenta pas de gratifier de la charge
de Premier Miniſtre, & de celle
[ID00009]
de Grand Maiſtre de l’Artille-
rie, mais voulut encore honorer de
ſon alliance par le mariage de
Mademoiſelle de Courtenay. Elle
m’a fait voir que Vous eſtes petite-
Fille d’un Chancelier le plus ac-
comply qui ait iamais poſſedé cet-
te charge; fille d’un Duc &
Pair, belle-fille d’un Mareſchal
de France, & femme d’un des
plus vaillans Capitaines de l’V-
nivers. Toutes ces conſiderations
Madame,
m’euſſent obligé de
garder le ſilence, ſans une puiſſan-
ce ſuperieure, qui m’a donné
l’aſſeurance que la Grandeur eſtoit
genereuſe, la Nobleſſe obligeante,
la Beauté douce & affable; &
que voſtre Bonté conſidereroit
[ID00010]
plutoſt mon intention respectueuſe
que ma preſomption. Appuyée ſur
ces fondemens ie prens la liberté,
Madame,
de vous preſenter
ce petit fruict de mes veilles: il
s’intereſſe à la conſervation de
voſtre ſanté, puis qu’il vous don-
nera quantité de remedes pour y
contribuer. S’il a l’honneur de
vous plaire, ie vous puis aſſeurer
qu’il eſt veritable & fidelle; &
que ma plus grande paßion eſt
de vous témoigner avec quelle ſou-
mißion ie ſuis,
SONNET.
- I’Admire ta doctrine, & ton fameux Ouvrage
- Doit eſtre des Sçavans l’entretien precieux:
- Tout brille dans ce Livre, & la prem ere page
- Montre un objet qui charme & les cœurs, & les yeux.
- Il ſçait joindre aux beautez la qualité de ſage;
- Il donne de l’amour meſme aux plus envieux;
- Et les plus beaux Eſprits par un commun ſuffrage,
- Diſent qu’en ce modelle on voit l’effort des Cieux.
- C’eſt de ton choix illuſtre une marque bien juſte
- D’avoir pour Protectrice une Perſonne auguste,
- Que la Terre & le Ciel contemplent à plaiſir.
- Des ſublimes vertus Minerve estant amie,
- Sans doute elle t’ apprit l’art de ſi bien choiſir;
- Car ce ſecret n’est point de ceux de la Chymie.
|| [ID00012]
SIXAIN.
- QVand vous auriez par vos Ouvrages
- Obtenu tous les avantages
- Qui ſont justeme̅t ???eus aux fruits de voſtre eſprit,
- Vous n’auriez jamais eu de ſi haute lo???ange
- Que lors que vous avez conſacré cet eſcrit
- A celle à qui l’on voit les qualitez d’un Ange.
|| [ID00013]
SONNET.
- CEſſez, peuples, ceſſez d’êlever des Autels
- A ceux qui vous avoient donné quelque pein- ture
- Des ſecrets qu’en ſon ſein renfermoit la Nature,
- Et ne les mettez plus au rang des Immortels.
- Non, non, c’estoit à tort qu’on les tencit pour tels,
- Puis qu’ils nous ont voilé a’une nuict tres-obſcure
- Ce que Dieu avoit mis dans chaque creature,
- Pour l’ uſage-commun du reſte des mortels.
- Nous te deuons Mevrdrac bien plutoſt les hommages
- Qu’autrefois ontrendu les Anciens à leurs Sages;
- Il’s nous cachoient leur art d’un ſoin trop affecté
- Et toy tu nous fais voir qu’ il n’eſt plus difficile,
- Et par un esprit plein de generoſité
- Enfin tu nous le rends charitable & facile.
|| [ID00014]
SONNET.
- LA Medecine vient de mon invention,
- Et je ſuis, apres Dieu, l’Operateur du monde:
- Ma puiſſance n’a point nulle part de ſeconde,
- Et toute choſe naiſt de ma ſeule action.
- Les herbes & les fruicts ſont ma production;
- Les animaux dans l’air, ſur la terre, & da̅s l’onde:
- Ie fais les mineraux par ma vertu feconde,
- Et le Roy des metaux en ſa perfection.
- I’ay parmy les Mortels pour Compagnes deux femmes,
- Dont l’illustre de Gviche en dérobant mes flâmes,
- Eſclatte dans la Cour comme un autre Soleil:
- Et la docte Mevrdrac dans ſon genre d’écrire,
- En imitant mon Art partage mon Empire:
- Et pas un de nous trois ne trouve ſon parei???.
|| [ID00015]
SONNET.
- CEnt fois j’ay celebré les plus ſublimes faits
- Des inſignes Heros que l’Hiſtoire nous vante:
- Mais quand il faut parler d’une illuſtre Sçavante.
- Ou je parle en tremblant, Mevrdrac, ou je me tais.
- Ton livre nous fait voir de merveilleux effets,
- Qui des plus envieux ont ſurpaſſé l’attente;
- Ou ſoit que ton esprit imite, ou qu’il invente,
- Le curieux y voit la fin de ſes ſouhaits.
- Que nos Neveux un jour te donneront de gloire;
- Et pour dire le vray l’on aura peine à croire
- Qu’une femme jamais ait eutant de ſçavoir.
- Des ſecrets que ton Livre explique en chaque page,
- Pour ne te rien cacher, je ne voudrois avoir
- Que celuy de loüer dignement ton Ouvrage.
|| [ID00016]
SONNET.
- DItes-nous quel Esprit, ou quelle Deïté,
- Inspire le ſçavoir qu’on voit en vostre Ou- vrage,
- Et qui vous a donné ce bel art en partage
- De prolonger les jours, & rendre la ſanté?
- Vous ſçavez, dites-vous, conſerver la beauté,
- Et des défauts du tein reparer le dommage;
- Mais du Sexe galand je vous promets l’hommage,
- Si vous avez trouvé ce ſecret ſouhaité.
- Non qu’il espere avoir cette delicateſſe
- Qu’on voit briller au tein de l’aimable Comteſſe
- A qui vous dediez cet Ouvrage parfait.
- La plus vaine de nous ſe ſouhaite moins belle,
- Et vos plus beaux ſecrets auront aſſez d’effet
- S’ils font ſuivre de loin cet illustre Mcdelle.
|| [ID00017]
Des diſtillations.
- Diſtillation per aſcenſum, 9
- Diſtillation aux limailles, ſables & cen- dres, 12
- Diſtillation au Bain-Marie, 13
- Bain vaporeux, 14
- Diſtillation per medium cornutum, 15
- D???ſtillation per deſcenſum, 17
- Sublimation, 18
|| [ID00018]
- Rectification, 19
- Calcination, 20
- Cohobation, 20
- Coagulation, 21
- Filtration, 22
- Deſiccation, 22
- Dulcoration, 22
- Inclination, 23
- Amalgamation, 23
- Digeſtion, 23
- Putrefaction, 24
- Menſtruë, 25
- Fermentation, 25
- Circulation, 26
- Defaillance, 27
- Reverberation, 27
- Precipitation, 27
- Eau marinée, 28
- Stratification, 28
- Torification, 29
- Decrepitation, 30
- Feces, 30
- Teſte morte, 31
- Des vaiſſeaux, 31
- Du lut des vaiſſeaux, 33
- Des feux, 35
- Des fourneaux, 36
|| [ID00019]
- Des caracteres Chymiques, 38
- Des poids de la Chymie, 43
SECONDE PARTIE.
- Avant-propos. 44
- De la vigne, 48
- De l’eſprit de vin, 48
- De l’eſprit de tartre, 52
- Creſme, ou Criſtal de tartre, 53
- Hu ile de tartre par defaillance, 54
- Vinaigre diſtillé, 55
- Des fueilles, pepins, & cendres de la vi- gne, 56
- Du roſmarin, 57
- De l’eſſence de roſmarin, 58
- De l’eau de roſmarin, 59
- Teinture, ou extraict de roſmarin, 59
- Du ſel de roſmarin, 60
- De la ſauge, 60
- De l’eſſence de ſauge, 61
- De l’eau de ſauge, 61
- Teinture, ou extraict de ſauge, 62
- Sel de ſauge, 62
- De l’hyſope, 63
- De l’eſſence d’hyſope, 63
|| [ID00020]
- De l’eau d’hyſope, 63
- Teinture, ou extraict d’hyſope, 64
- Sel d’hyſope, 64
- De la taneſie, 64
- De l’eſſence de taneſie, 65
- De l’eau de taneſie, 65
- Teinture ou extraict de taneſie, 66
- Sel de taneſie, 66
- Du thim, 66
- Du fenoüil, 67
- De la menthe, ou baume, 68
- De la rüe, 68
- De la marjolaine, 69
- La maniere d’extraire les eſſences, les eaux, teintures & ſels de tous les Sim- ples, 70
- De la betoine, 73
- De la celidoine, 74
- De la morelle, 75
- De la meliſſe, 75
- De l’aluine, ou abſinthe, 76
- Du mille-pertuis, 77
- Des fueilles & racines de violette, 78
- Du pourpier, 79
- De la laictuë, 79
- De la cichorée, 80
- Du fraiſier, 80
|| [ID00021]
- De la bourrache & bugloſſe, 80
- De l’ozeille, 81
- Du chardon-benit, 81
- De la mauve, 82
- De la guimauve, 83
- De la parietere, 83
- De la fume-terre, 84
- Du plantain, 85
- Du cerfueil, 85
- Du perſil, 86
- De la joubarbe, 86
- Des roſes, 87
- De l’eau de roſes, 88
- De la teinture de roſes, 89
- De la conſerve de roſes, 90
- De l’huile roſat, 91
- De la violette, 92
- De l’eau de violette, 92
- Du ſyrop violart, 93
- Du miel violart, 94
- Eau clairette de violette, 95
- Des fleurs de nenu phar, 96
- Des fleurs de bourrache & bugloſſe, 96
- Des fleurs de peſcher, 97
- Des fleurs de pavot rouge, ou rheas, 97
- Des fleurs de camomille, 98
- Des fleurs de ſureau, 99
|| [ID00022]
- Des fleurs de ſoucy, 99
- Des fleurs de boüillon-blanc, 100
- Des fleurs d’orange, 101
- De l’huile de fleurs d’orange, 101
- Des fleurs de jaſmin, 102
- Des fleurs de febves, 102
- Des fleurs de mille-pertuis, 102
- Des pommes de reinette, 104
- Des fraiſes, 105
- Des poires & pommes de coin, 105
- Des groſeilles rouges, 106
- Des noix vertes, 106
- Des fruits d’Alchichange, 108
- Des noiſettes rouges, 108
- Des melons, citroüilles, concombres, & courges, 109
- Des meures, 110
- De la teinture de rheubarbe, 110
- De la teinture de ſenné, 112
- De la teinture ou fecules d’agaric, 112
- De la teinture de ſafran, 113
- De la teinture d’elebore noir, 114
- De lateinture de coloquinte, 114
- De la teinture d’aloës, 115
- De la teinture de gomme-gutte, 116
- Dn cloud de girofle, 116
-
Des vertus de l’eſſence du cloud de gi|| [ID00023]rofle , 118
- De la canelle, 120
- De la muſcade, 121
- Du poivre & zinzembre, 122
- De la therebentine, 124
- Des fleurs de benjoüin, 125
- Tablettes pour le poulmon, 126
- De la myrrhe & encens, 127
- De l’huile de gaiac, 128
- De l’huile de l’écorce de freſne, 129
- De l’huile de buis, 129
- Fecules de brione, 130
- Fecules d’Aaron, 131
- Fecules d’iris, 131
TROISIESME PARTIE.
- Avant-propos, 133
- Du ſang humain, 135
- Magiſtere du crane humain, 138
- De l’huile des os d’hommes, 140
- Eau de chapon, 141
- Autre eau de chair, 142
- Reſtauratif de chair excellent, 142
- De l’extraict de foye de veau, & ratte de beuf, 143
|| [ID00024]
- De l’huile d’œuf, 145
- De l’eſprit, huile & teinture de miel, 146
- De l’huile de cire, 148
- De l’huile de beure, 149
- De l’huile de cheveux, 150
- De l’eſprit de laict, 151
QVATRIESME PARTIE.
- Avant-propos. 153
- Du vitriol, 155
- De l’eſprit de nitre, 158
- Du criſtal mineral, 159
- De l’eſprit de ſel-marin, 161
- De l’eſprit de ſoufre, 163
- Syrop de fleurs de ſoufre, 165
- De l’huile des Philoſophes, 166
- De l’eſſence de carabé, ou ambre, 168
- De la teinture du corail, 168
- Du magiſtere de corail, 169
- Du ſel de corail, 170
- Du crocus d’antimoine, 171
- De l’antimoine duphoretique, 173
- De l’huile ou ſyrop d’antimoine, 174
- De la teinture d’antimoine, 175
- Du crocus de Mars, 177
|| [ID00025]
- Autre crocus de Mars aperitif, 178
- Du vitriol de Mars, 179
- Du vitriol de Venus, 180
- Du ſel ou ſucre de Saturne, 182
- Magiſtere de Saturne, 183
- De l’huile de Saturne, 184
CIN QVIESME PARTIE.
- Avant propos. 185
- Eau contre les douleurs de la teſte, 186
- Eau pour les yeux troubles & chargez, 187
- Eau contre l’inflammation des yeux, & qui les fortifie, 188
- Eau pour les fiſtules lachrymales, 188
- Eau facile à faire pour le mal des yeux, 189
- Eau pour la ſurdité, 190
- Eau pour la ſurdité, 190
- Eau contre la douleur des oreilles, 191
- Eau contre les palpitations de cœur, & contre les affections de là ratte, 191
- Eau contre la melancholie, 192
- Eau qui fortifie l’eſtomac, 192
- Eau qui provoque l’ur???ne ſupprimee, & qui fait vuider le ſable des reins, 193
-
Eau qui diſſout la pierre, & la fait vuider
|| [ID00026]par les urines, 194
- Eau qui guerit la gravelle, 194
- Eau contre la peſte, 195
- Eau ſpecifique contre la peſte, 196
- Eau qui guerit les paſles couleurs, 196
- Eau qui fait venir les purgations, 197
- Eau qui arreſte les purgations immode- rées, & les pertes de ſang, 197
- Autre eau qui arreſte les pertes de ſang, 198
- Eau qui facilite les accouchements, 198
- Eau qui purifie la matrice, & qui arreſte les ſuffocations, 199
- Eau contre l’hydropiſie, 200
- Eau contre les tremblemens de la teſte, & des mains, 200
- Eau qui fait venir le laict aux nourrices, 201
- Syrop de mercuriale, 202
- Syrop pourfaire dormir, 203
- Syrop pour le poulmon, 204
- Syrop contre l’hydropiſie, 204
- Syrop contre la douleur de teſte, & purga- tif, 205
- Syrop violat purgatif, 206
- Syrop de roſes muſcades, 206
- Syrop qui arreſte la diarrhe, & la dyfen- terie, & flux de ſang, 207
|| [ID00027]
- Syrop pour la dyſenterie, 207
- Syrop pour fort??? fier l’eſtomac, 207
- Syrop pourfaire venir les purgations, & guerir les paſles couleurs, 208
- Syrop de pommes purgatif, 208
- Autre ſyrop purgatif, 209
- Ptiſane purgative, 210
- Autre ptiſane purgative, 211
- Ptiſane rafra???chiſſante & aperitive, 212
- Ptiſane qui purifie le ſang, 213
- Ptiſane qui diſſipe les enflures du ventre & des jambes, qui reſtent apres la fiévre, 213
- Ptiſane rafraichiſſante, 214
- Ptiſane pour le poulmon, 215
- Ptiſane qui deſopile la ratte, 215
- Pt ſane qui fortifie, & arreſte la diarr???ée & dyſenterie, 216
- Ptiſane qui guerit les galles, 217
- Pillules pour purger le cerveau, 217
- Autres pillu les qui purgent le cerveau, 218
- Pillules qui purgent la melancholie, 219
- Pillules aperitives, 220
- Pillules contre la peſte, 220
- Pillules contre l’aſthme & toux inveterée, 221.
- Pillules qui purgent les eaux des hydropi- ques, 222
- Pillules co̅tre les ſuffocatio̅s de matrice, 222
|| [ID00028]
- Pillules qui arreſtent les dyſenteries, & qui fortifient, 223
- Pillules contre la gravelle, 224
- Pillules purgatives, 224
- Autres pillules purgatives, 225
- Pillules univerſelles, 225
- Pillules pour faire dormir, 226
- Baume de la Magdelaine, 227
- Baume contre les douleurs de la teſte pro- venantes de bleſſures, 230
- Baume qui arreſte le tremblement de la teſte, des bras, & des mains, 230
- Baume contre la paralyſie, 231
- Baume contreles douleurs de laſcyatique, 233.
- Autre baume pour la ſcyatique, 233
- Baume ou pommade contre les bruſlures, & contre les marques de la petite verolle, 234
- Baume qui fait réprendre les playes, 234
- Baume contre les douleurs de la goutte, ſoit de cauſe chaude ou froide, 235
- Baume contre les douleurs de la goutte froide, 236
- Baume qui arreſte la diarrhée & flux de ſang, 237
- Baume ou pommade qui guerit les hemor- roïdes externes, 237
|| [ID00029]
- Baume contre la ſurdité, 238
- Baume ſouverain pour guerir toutes ſortes de playes, 239
- Baume contre la douleur des dents, 239
- Emplaſtre de ſavon, 240
- Emplaſtre de Minium, 242
- Emplaſtre contre les dartres vives, 242
- Emplaſtre qui fait ſortir le fer, le bois, & les eſquilles des os de dedans les playes, 243
- Emplaſtre qui fait meurir toutes ſortes de bubons, charbons, & apoſthemes, 244
- Emplaſtre contre les douleurs des dents, 245
- Emplaſtre qui guerit les playes de la teſte, 246.
- Emplaſtre co̅tre les duretez de la ratte, 247
- Emplaſtre qui leve les chairs mortes, & arreſte la gangrene, 248
- Emplaſtre contre les coupures, gerſures, & fiſſures, 250
SIXIESME PARTIE.
- Avant-propos. 251
- Des eaux ſimples diſtillees pour l’embelliſ- ſement du viſage, 254
- Eau de la Reine de Hongrie, 255
- Eau de chair pour le viſage, 257
|| [ID00030]
- Eau pour conſerver le teins, 259
- Autre eau pour conſerver le teint, 259
- Eau pour conſerver & embellir les teins, 260.
- Eau pour blanchir les teins, 260
- Eau de lard, 261
- Eau pour rafraichir & blanchir le viſage, 262.
- Eau contre les rougeurs du viſage, & qui nettoye le cuir, 262
- Eau pour les teins groſſiers, 263
- Autre eau pour les teins groſſiers, 263
- Autre eau pour les teins groſſiers, 264
- Eau qui leve le hâle, & oſte les rougeurs, 264.
- Eau contre les dartres farineuſes, & âpre- té de la peau. 265
- Eau contre les tannes du viſage, 265
- Eau contre les rouſſeurs & lentilles, 266
- Eau contre les rides, 266
- Eau pour les teins jaunes & bilieux, 267
- Eau qui oſte les rougeurs du viſage, 267
- Eau qui fait pâlir, 268
- Autre eau pour le meſme, 268
- Eau contre les cicatrices & marques de la petite verolle, 269
- Eau qui blanch???t le viſage, 270
|| [ID00031]
- Eau contre les rouſſeurs & rougeurs, 270
- Eau contre les dartres, 271
- Eau contre les rouſſeurs, 271
- Eau qui leve les cicatrices, 272
- Eau qui fortifie & embellit le corps, 272
- Eau contre les teins groſſiers, & contre les tannes, 273
- Eau pour laver & nourir les teins qui au- ront eſté corodez par l’eau precedente, 274
- Huile de talc, 275
- Autre huile de talc, 277
- Autre huile de talc, 278
- Eau de talc, 279
- Pommade de chevreau, 280
- Pommade pour tenir le tein frais & uni, 282.
- Pommade pour nourrir le tein, & contre les marques de la petite verolle, 283
- Pommade excellente qui ſe fait dans le mois de May, 285
- Pommade de pieds de mouton, 286
- Autre pommade excellente, 288
- Autre pommade excellente, 288
- Autre pommade, 290
- Pommade contre les dartres vives, 291
- Pommade contre les dartres farineuſes, 291
- Pommade contre les âpretez de la peau, 292
|| [ID00032]
- Autre pommade pour le meſme, 293
- Pommade contre le hâle, 293
- Pommade contre les rides, 294
- Autre pommade contre les rides, 294
- Autre pommade pour le meſme, 295
- Pommade contre les lentilles & rouſſeurs, 295.
- Autre pommade contre les lentilles & rouſ- ſeurs, 296
- Pommade contre les fentes qui viennent aux lévres & aux mains, 297
- Pommade contre le hâle du ſoleil, & du froid, 298
- Pommade contre les taches qui viennent au viſage, 299
- Rouge pour le viſage, appellé Carmin, 299
- Autre rouge pour le viſage, 301
- Autre rouge, 301
- Autre rouge, 302
- Mouchoirs pour le viſage, 302
- Fiel de bœuf comme on le prepare à Mont- pellier, 305
- Freparation de verjus, 306
- Des doublures de maſques, 307
- Autre doublures, 308
- Cornettes jaunes de jour, 309
- Autre façon de jaunir les cornettes, 309
|| [ID00033]
- Autre façon, 309
- Pour faire cornettes de nuict, 310
- Autre maniere pour cornettes, 311
- Paſte pour les mains, 312
- Autre paſte pour les mains, 313
- Autre paſte pour les mains, 313
- Autre paſte, 314
- Pommade qui blanchit les mains, 314
- Pommade pour le viſage, & pour les mains, 315
- Autre pommade pour les mains, 316
- Autre pommade, 317
- Pommade contre les fentes & crevaſſes qui viennent aux mains, 317
- Savon pour blanch???r les mains, 318
- Eau pour blanchir les mains, 319
- Ptiſane pour engraiſſer, 320
- Autre ptiſane qui engraiſſe & fait dor- mir, 320
- Autre ptiſane pour le meſme, 321
- Maniere de purifier & cirer des gans, 322
- Autre maniere pour les gans, 323
- Autre pour les gans, 323
- Eau pour blanchir les dents, & fortifier les gencives, 324
- Eau pour les dents gaſtées, 325
- Baſtons pour blanchir les dents, 325
|| [ID00034]
- Opiat pour blanchir & conſerver les dents, 326.
- Autre opiat, 326
- Poudres pour les dents, 327
- Eſprits ou eſſences pour les dents, 328
- Pour preparer les racines & bois pour frot- ter les dents, 328
- Teinture pour faire le poil blond, 329
- Autre pour le poil blond, 329
- Teinture pour faire le poil noir, 330
- Paſte pour teindre le poil en noir, 331
- Leſſive pour faire croiſtre & revenir les cheveux, 331
- Pommade pour faire venir les cheveux, 332.
- Eau pour faire tomber le poil, 332
- Eau de chaux pour le meſme effect, 333
- Pommade pour oſter la farine qui vient à la racine des cheveux, 334
- Eau pour faire friſer les cheveux, 334
|| [ID00035]
Extrait du Privilege du Roy.
PAr grace & Privilege du Roy, il eſt per-
mis à Damoiſelle Marie Meurdrac
de faire imprimer un Livre qu’elle a compoſé,
intitulé La Chymie Charitable & facile, &c.
pendant l’eſpace de dix années: avec defenſes
à tous autres d’en imprimer, vendre ou debi-
ter pendant ledit temps, ſans le conſentement de
ladite Expoſante ou de ceux qui auront droit
d’elle, ſous les peines portées plus amplement
par ledit Privilege. Donné à Paris le 20. De-
cembre 1665. Signé, De Quigy.
Et ladite Damoiſelle Marie Meurdrac a cedé &
tranſporté ſon droit de Privilege pour le temps & aux
clauſes qu’il contient, à Jean d’Hoüry, Marchand
Libraire, ſuivant l’accord fait entr’eux.
Regiſtré ſur le Livre de la Communauté le 5. Ian-
vier 1666. Signé, PIGET.
Approbation des Docteurs en Medecine.
NOus ſouſſignez Docteurs Regens en la
Faculté de Medecine à Paris, certifions
avoir veu & leu un Livre intitulé La Chymic
Charitable & facile: Compoſé par Damoiſelle
Marie Meudrac dans lequel nous ne trou-
vons rien qui ne puiſſe eſtre utile au Public. En
foy dequoy nous avons ſouſcrit. Fait ce 10.
Decembre 1665.Signez, Le Vignon Doyen.
De Caen. De Bourges.
|| [ID00036]
AV ANTPROPOS.
QVand j’ay co̅mencé ce petit
Traité, ç’a eſté pour ma ſeule
ſatisfaction, & pour ne pas
perdre la memoire des con-
noiſſances que je me ſuis acquiſes par
un long travail, & par diverſes expe-
riences pluſieurs fois reïterées. Ie ne
puis celer que le voyant achevé mieux
que je n'euſſe oſé eſperer, j’ay eſté ten-
tée de le publier: mais ſi j’avois des
raiſons pour le mettre en lumiere, j’en
avois pour le tenir caché, & ne le pas
expoſer à la cenſure generale. Dans ce
combat je ſuis demeurée prés de deux
ans irreſoluë: je m’objectois à moy-
meſme que ce n’eſtoit pas la profeſſion
d’une femme d’enſeigner; qu’elle doit
demeurer dans le ſilence, écouter &
apprendre, ſans teſmoigner qu’elle
ſçait: qu’il eſt au deſſus d’elle de don-
ner un Ouvrage au public, & que cette
[ID00037]
reputation n’eſt pas d’ordinaire avan-
tageuſe, puiſque les hommes mépriſent
& blaſment touſiours les productions
qui partent de l’eſprit d’une femme.
D’ailleurs, que les ſecrets ne ſe veulent
pas divulguer; & qu’enfin il ſe trouve-
roit, peut-eſtre, dans ma maniere d’é-
crire bien des choſes à reprendre. Ie me
flattois d’un autre coſté de ce que je ne
ſuis pas la premiere qui ait mis quelque
choſe ſous la Preſſe; que les Eſprits
n’ont point de ſexe, & que ſi ceux des
femmes eſtoient cultivez comme ceux
des hommes, & que l’on employaſt
autant de temps & de dépenſe à les in-
ſtruire, ils pourroient les égaler: que
noſtre ſiecle a veu naiſtre des femmes
qui pour la Proſe, la Poëſie, les Lan-
gues, la Philoſophie, & le gouverne-
ment meſme de l’Eſtat, ne cedent en
rien à la ſuffiſance, & à la capacité des
hommes. De plus, que cet Ouvrage eſt
utile, qu’il contient quantité de reme-
des infaillibles pour la gueriſon des
maladies, pour la conſervation de la
ſanté, & pluſieurs rares ſecrets en fa-
veur des Dames; non ſeulement pour
[ID00038]
conſerver, mais auſſi pour augmenter
les avantages qu’elles ont receus de la
Nature; qu’il eſt curieux, qu’il enſei-
gne fidellement & familierement à les
pratiquer avec facilité; & que ſe ſeroit
pecher contre la Charité de cacher les
connoiſſances que Dieu m’a données,
qui peuvent profiter à tout le monde.
C’eſt le ſeul motif qui m’a fait reſoudre
à laiſſer ſortir ce Livre de mes mains:
j’eſpere du public qu’il m’en ſçaura gré,
& qu’il ne s’arreſtera pas tant à gloſer
ſur la politeſſe de mon ſtile, que le ſujet
que je traite ne pourroit ſouffrir, qu’à
profiter de mes preceptes, pour bien
reüſſir, & ſe rendre exact dans les ope-
rations qu’il ſe donnera la peine de
pratiquer. Ie demande encore cette
grace à ceux qui les voudront entre-
prendre, qu’ils diſtribuent liberalement
aux pauvres les remedes comme j’ay
fait juſques à preſent, puiſque je leur
apprens le moyen de les faire preſque
ſans dépenſe; & puis qu’il eſt iuſte en-
fin que je profite de mes veilles, je les
conjure pour toute reconnoiſſance, de
ſe ſouvenir de moy dans les charitez
[ID00039]
qu’ils feront, & de me faire partici-
pante du merite de leurs bonnes œu-
vres; impetrant pour moy du Ciel par
leurs prieres, & par celles des pauvres
qu’ils ſoulageront, de nouvelles lu-
mieres, & des connoiſſances encore
plus utiles que ie puiſſe derechef leur
communiquer. Pour ce qui eſt des Da-
mes qui ſe contenteront de ſçavoir ſim-
plement, ſans vouloir prendre la peine
de faire les operations qu’elles iugeront
leur eſtre neceſſaires, à cauſe du temps
qu’il y faut employer, & des differen-
tes ſortes de vaiſſeaux, & autres uſtan-
cilles dont on a beſoin, ou qui crain-
dront de ne pas reuſſir, ie m’explique-
ray de vive voix quand on me fera
l’honneur de m’en communiquer, &
prendray ſoin de faire moy-meſme ce
que l’on pourra ſouhaiter de ce que
j’enſeigne. I’ay diviſé ce Livre en ſix
Parties: dans la premiere, ie traite des
principes & operations, vaiſſcaux,
luts, fourneaux, feux, caracteres &
poids: dans la ſeconde, ie parle de la
vertu des Simples, de leurs prepara-
tions, & de la maniere d’en extraire les
[ID00040]
ſels, les teintures, les eaux & les eſſen-
ces: la troiſieſme eſt des Animaux; la
quatrieſme des Metaux; la cinquieſme
la maniere de faire les medecines com-
poſées, avec pluſieurs remedes tous
experimentez: la ſixieſme eſt en faveur
des Dames; où il eſt parlé de toutes les
choſes qui peuvent conſerver & aug-
menter la beauté. I’ay fait ce que j’ay
pû pour me bien expliquer, & faciliter
les operations: je n’ay point voulu
paſſer mes connoiſſances, & puis aſſeu-
rer que tout ce que j enſeigne eſt veri-
table, & que tous mes remedes ſont
experimentez; dont ie louë & glorifie
Dieu.
|| [ID00041]
PREMIERE PARTIE.
- Des Principes, Operations, Vaiſſeaux, Luts, Fourneaux, Feux, Caracteres & Poids de la Chymie.
Du Sel.
LA Chymie a pour object les
Corps mixtes entant que di-
viſibles & reſolubles, ſur leſ-
quels elle travaille, pour en
extraire les trois Principes, qui ſont
Sel, Soufre & Mercure; ce qui ſe fait
par deux operations generales, ſçavoir
Solution, & Congelation. Premiere-
ment nous parlerons du Sel comme du
pere de la generation, puis qu’il ſemble
[ID00042]
que c’eſt luy qui contribuë le plus à la
production. Il s’en trouve de trois ſor-
tes dans chaque corps, Le Fixe, le
Nitre, et l’Armoniac, leſ-
quels ne procedent que d’un, & ſont
diverſifiez par le mélange des deux au-
tres principes. Le Sel Fixe eſt celuy
qui eſt rendu viſible par l’Art, & qui
contient en ſoy une vertu balſamique.
Il ſe diſſout dans l’eau, il ſe condenſe au
chaud; & aprés pluſieurs diſſolutions
& purifications il eſt rendu fuſible
comme metal, & comme baume; & en-
fin, il a la vertu de conſerver toutes les
choſes où il domine, il les purifie, & diſ-
ſipe leur humidité ſuperfluë; c’eſt pour-
quoy ſelon le mixte duquel il eſt ex-
trait, il fait des operations admirables.Le Sel Nitre tient le milieu entre le
Fixe & l’Armoniac: il s’attache au Sou-
fre, il eſt en petite quantité, il n’eſt
point viſible, & conſerve la vertu de
ſon ſuject. S’il eſt extraict d’un Purgatif,
il purgera; d’un Diuretique, il fera uri-
ner, & ainſi du reſte. C’eſt luy qui don-
ne le gouſt & l’odeur au Soufre.L’Armoniac eſt celuy qui paſſe avec
[ID00043]
l’eſprit & l’eau és diſtillations. Sans luy
les eaux diſtillées ne ſe pourroient con-
ſerver ſans ſe corrompre; & ſi les vaiſ-
ſeaux dans leſquels ont les met ne ſont
bien bouchez, il ſe perd & diſſipe, &
elles ſe putrifient.
Du Soufre.
LE Soufre, ſecond principe fait l’u-
nion de l’eſprit & du corps, c’eſt
pourquoy il eſt appellé par quelques
autheurs Ame. Il en eſt de trois ſor-
tes, groſſier, moyen, & ſubtil. Le
groſſier ſe joint au Sel Fixe, le moyen
au Sel Nitre, & le ſubtil à l’A???moniac.
Le groſſier eſt en petite quantité, &
c’eſt luy neantmoins qui donne la ver-
tu balſamique au Sel Fixe.Le Soufre moyen eſt compoſé de
parties graſſes, chaudes, & huileuſes;
il brûle facilement, il eſt viſible par
ſes effects, il domine le Sel Nitre, &
ſe joint avec luy.
|| [ID00044]
Le Soufre ſubtil s’unit au Sel Ar-
moniac; c’eſt luy qui facilite ſon eleva-
tion, & qui fait que les Eſprits s’en-
flamment.Les parties huileuſes & graſſes, que
nous appellons Soufre, ne ſe tirent
pas d’une meſme partie du mixte, &
ne ſont pas en tous également. Aux
uns, elles ſont aux racines & eſcorces;
aux autres, aux fleurs, fueilles ou fruits;
à quelques-uns, aux ſemences. Ce Sou-
fre eſt de facile corruption, dautant
qu il domine le Sel Nitre: cela ſe void
dans les huiles tirées par expreſſion,
leſquelles s’engraiſſent, & ſe purrifient;
ce qui n’arrive pas aux eſſences diſtil-
lées, dautant qu’elles ſont aidées &
corrigées par le feu.
Du Mercure.
TOvtes les choſes qui ſont au
monde proviennent d’un, & cet
un en produit trois: ce qui nous peut
[ID00045]
do̅ner une idée du myſtere adorable de
la tres ſainte Trinité. La Chymie nous
en preſente un crayon, puis qu’elle
trouve une trinitè non ſeulement dans
chaque ſujet, mais dans chaque prin-
cipe. Nous avons veu dans les Cha-
pitres precedens, de trois ſortes de
Sel, & de trois conditions de Soufre;
il eſt auſſi aſſeurément de trois diffe-
rens Mercures, leſquels, comme j’ay dit
au Chapitre des Sels, ne procedent
que d’un, & ne ſont diverſifiez que
par le mélange des deux autres prin-
cipes.Il ſe trouve dans le Sel Fixe joint au
Soufre groſſier un Mercure peſant, re-
belle, & de difficile élevation, qui ne
quitre qu’à force de feu. Nous voyons
cela dans la diſtillation du Sel des Sim-
ples, duquel le Mercure ne ſe tire que
par un long & preſſant feu. L’eſprit de
Sel n’eſt donc autre choſe qu’un Mer-
cure peſant uni au Sel Fixe, qui con-
tient en ſoy un Soufre groſſier, où le
Soufre & le Mercure ſont dominez
par le Sel Fixe.Le ſecond Mercure, le Sel Nitre, &
[ID00046]
le Soufre moyen s’uniſſent & ſe joi-
gnent enſemble, comme eſtans d’une
meſme nature.Le tres-ſubtil Mercure, le Soufre
ſubtil, & l’Armoniac ou Volatil paſſent
enſemble dans les diſtillations, ainſi
nous voyons dans chaque principe une
Trinité tres-unie, leſquels trois prin-
cipes ſont produits par un, & chacun
en produit trois.Vn nombre infini de Philoſophes
ont écrit du Mercure ſelon leur ſenti-
ment, & chacun en particulier a plû-
toſt ſuivi ſon inclination que la rai-
ſon. Quelques-uns veulent que le Mer-
cure des ſimples & des animaux ſoit
coulant & lucide comme celuy des me-
taux; ce qui ne peut eſtre, y ayant une
difference tres-grande entre les trois
regnes. D’autres veulent qu’il ſoit
ſubtil, diaphane, tranſparent & inſi-
pide; ce qui n’a aucune apparence. Ie
demeure d’accord qu’il doit eſtre tres-
clair, tres-ſubtil, & détaché de toute
acrimonie, mais non pas inſipide, puiſ-
que c’eſt cet eſprit de vie, qui eſt d’au-
tant plus penetrant qu’il eſt plus déta [ID00047] ché
de la partie terreſtre, & dont la pu-
reté augmente la force. Nous experi-
mentons cette verité dans la depuration
de l’Eſprit de vin, qui devient ſi ſub-
til, qu’à peine le peut-on conſerver dans
quelque vaiſſeau que ce ſoit. Le Mer-
cure n’eſt donc autre choſe que l’Eſprit
de vie, ſeparé des parties groſſieres, &
rendu par la main de l’Artiſte tres-ſpi-
rituel, & qui eſt en plus grande ou plus
petite quantité ſelon le mixte. Ce n’eſt
pas que l’on le puiſſe reduire à ſon pre-
mier principe; car il eſt impoſſible de
diviſer une choſe qu’elle ne participe
des trois; la nature eſtant ſi ſage ou-
vriere, & faiſant ſi parfaitement ſon
mélange, qu’il n’eſt pas en noſtre pou-
voir de diviſer entierement ce qu’elle
a conjoint, mais ſeulement d’aſſembler
les ſpirituelles avec les ſpirituelles, les
moyennes aux moyennes, & les groſ-
ſieres avec les groſſieres, non toutefois
ſans quelque ſpiritualité dans chacu-
ne, puis qu’autrement il ſe trouveroit
deux principes dénuez de puiſſance.Les trois principes ſont plus diffici-
les à tirer des Animaux que des Vege [ID00048] taux,
& des Mineraux & Metaux en-
core dauantage. Ceux qui ont écrit de
ces matieres ſe ſont moins attachez à la
demonſtration qu’à la ſpeculation, en
quoy bien ſouvent l’on eſt trompé; car
la Theorie & la pratique ſont pour
l’ordinaire differentes, & l’action nous
inſtruit bien davantage que la contem-
plation.
Des Operations de Chymie.
IL eſt neceſſaire qu’un Artiſan ſçache
parler en termes de ſon Art, & qu’il
connoiſſe les outils, & les uſtancilles
dont il ſe doit ſervir. Nous parlerons
premierement des Operations, & par-
ticulierement des Diſtillations.Les Chymiſtes font de trois ſortes
de Diſtillations, qu’ils appellent, Per
aſcenſum, Per medium cornutum, Per
deſcenſum. Per aſcenſum eſt une Diſtil-
lation qui éleve les eſprits en forme
de fumée, où ne trouvant point de ſor [ID00049] tie,
ils ſe condenſent en eau, & tom-
bent par le canal du chapiteau. Per me-
dium cornutum eſt un moyen ou milieu
pour les choſes qui ne peuvent pas s’é-
lever facilement. Per deſcenſum pour
les choſes peſantes. Mais parlons de
chacune de ces Diſtillations en parti-
culier.
Diſtillation per aſcenſum.
LA Diſtillation per aſcenſum ſe fait
en pluſieurs manieres, ſelon la cho-
ſe que l’on veut diſtiller. Si c’eſt Eſprit
de vin, elle ſe doit faire au Bain. Si ce
ſont des Eſſences aromatiques, com-
me Roſmarin, Sauge, Hyſope, Fenoüil,
Anis, & autres de pareille nature, cet-
te diſtillation ne ſe peut faire que dans
un Alambic de cuivre, dautant qu’il
faut un feu violent, quantité d’herbes
pour tirer une once d’Eſſence, & l’on
ne trouve point de vaiſſeaux de ver-
re aſſez grands, & qui ayent de tuyau
refrigeratoire, bien qu’il ſoit neceſſai-
re de rafraîchir pour empeſcher la per-
te des eſprits. C’eſt pourquoy ceux
qui ont dit qu’il ne falloit point abſo [ID00050] lument
ſe ſervir de cuivre ont eu tort,
dautant qu’il eſt impoſſible de le pou-
voir faire autrement. De plus, chaque
diſtillation eſt ſi peu à ſe faire dans ces
vaiſſeaux, que les ſimples n’en peuvent
recevoir aucune mauvaiſe qualité, puiſ-
que trois heures ſuffiſent pour cet ef-
fect. Le raiſonnement feroit croire, com-
me les Aromats ſont de nature chau-
de, que la chaleur du Bain boüillant
ſeroit ſuffiſante pour élever leurs Eſ-
ſences, veu que toutes choſes ſe portent
devers leur centre; mais l’experience
nous apprend qu’il ne s’éleve que fort
peu d’Eſſence dans le Bain.Pour obſerver l’ordre que je me ſuis
preſcrit, je continueray, & diray que
pour faire cette operation, il faut pren-
dre les fueilles & les fleurs de l’Aro-
matique, que l’on voudra diſtiller, &
remplir l’Alembic juſqu’à quatre doigts
prés de l’embouchure, ſi elles ſont
vertes; ſi elles ſont ſeiches, il faut laiſ-
ſer ſix doigts; Verſez de l’eau par deſſus
ſur les ſeches, parties égales; & ſur les
vertes, deux doigts au deſſous deſdites
herbes, autrement le tout ſe brûleroit,
[ID00051]
& ſentiroit l’empyreume, & meſme
toute l’humidité qui en ſortiroit ſeroit
conſommée par la force du feu. Voſtre
vaiſſeau eſtant remply de la ſorte, vous
le mettrez ſur un tripied, ou fourneau,
& luy adapterez ſon chapiteau, auquel
vous joindrez un tuyau refrigeratoire,
lequel paſſera au travers d’un tonneau
rempli d’eau, le petit bout penchant
pour faciliter la ſortie des eſprits, au-
quel vous mettrez un Recipient, & bou-
cherez bien les jointures, & donnerez
un feu de flamme juſqu’à ce que vous
voyez diſtiller dans voſtre Recipient.
Alors il faudra moderer voſtre feu, de
peur que le tout ne gonfle. Si voſtre
Alembic tient deux ſeaux ou environ,
quand vous aurez diſtillé cinq pintes,
ceſſez, & vous aurez l’eau & l’eſſence
de voſtre ſimple méleés enſemble. Vous
les ſeparerez par le vaiſſeau ſeparatoi-
re, qui eſt un Entonnoir de verre que
vous emplirez, & boucherez le bout
d’en bas de voſtre doigt, toute l’Eſſen-
ce s’élevera au deſſus, & lors qu’il n’en
montera plus, faites ouverture de vo-
ſtre doigt, & laiſſez paſſer toute l’eau
[ID00052]
doucement, & rebouchez quand vous
verrez l’Eſſence. Vous la mettrez dans
un autre vaiſſeau que vous boucherez
avec un bouchon de verre; au deffaut
vous y mettrez de la veſſie de porc
moüillée. Si vous voulez que voſtre
eau ſoit ſpirituelle, vous la rectifirez
trois ou quatre fois au Bain. Pour le re-
ſidu quiſe trouve dans l’Alembic, vous
l’exprimerez, & filtrerez pour en faire
l’Extrait, ou Teinture, & mettrez la
maſſe ſecher, de laquelle vous pourrez
extraire le Sel.
Diſtillation au ſable, limailles
& cendres.
CEtte maniere de diſtiller eſt
pour les choſes qu’il faut pouſſer
par le feu. Vous mettrez un doigt de
ſable, limailles de fer, ou cendres dans
une terrine, & mettrez voſtre pot
d’Alembic de verre deſſus, dans lequel
ſeront les ſucs des herbes que vous vou-
drez diſtiller, ou les herbes meſmes
avec leur menſtruë, & le couvrirez de
ſon Chapiteau à bec, auquel vous
[ID00053]
joindrez un Recipient; le tout eſtant
bouché, vous poſerez la terrine ſur
un tripied, fourneau, ou rechaud.
Vous mettrez la hauteur de trois ou
quatre doigts de ſable au tour de vo-
ſtre pot d’Alembic, & ferez feu par de-
grez. La limaille de fer eſt le feu le plus
chaud; le ſable ſuit, celuy de cen-
dres eſt le moindre.
Diſtillation au Bain Marie.
CEtte Diſtillation eſt appellée du
nom de celle qui l’a inventée, qui
eſtoit la ſœur de Moyſe, Marie ſur-
nommée la Propheteſſe, laquelle a fait
le Livre intitulé des trois Paroles. El-
le ſe fait en cette ſorte. Vous prendrez
un Chaudron, au fond duquel vous
mettrez un Cercle ou petit Tripied de
la hauteur de deux doigts pour empeſ-
cher que voſtre vaiſſeau ne touche con-
tre le fond du Chaudron; vous poſe-
rez deſſus voſtre pot d’Alembic rem-
ply juſques aux deux tiers de la liqueur
que vous voulez diſtiller, & mettrez ſon
Chapiteau deſſus, au haut duquel vous
attacherez une ficelle que vous ferez
[ID00054]
tenir aux deux ances du Chaudron, de
peur que le pot d’Alembic ne nage ſur
l’eau; vous mettrez un Recipient,
boucherez bien toutes les jointures, &
ferez le feu ſelon la choſe que vous vou-
drez diſtiller. Si c’eſt de l’Eſprit de vin,
que l’eau du Bain ſoit tiede; de l’eau
Roſe, qu’elle ſoit chaude; du Vinaigre,
qu’elle ſoit boüillante. Le jugement de
celuy qui travaille fait ces diſcerne-
mens. Il y a des Chaudrons faits ex-
prés pour cet uſage appellez Bains Ma-
rie, dans leſquels l’on peut faire plu-
ſieurs diſtillations tout à la fois. Il eſt
à obſerver que l’eau du Bain ſoit bord
à bord de la matiere contenuë dans le
vaiſſeau: & lors qu’elle diminüera, il
en faut mettre de chaude, de peur de
caſſer les vaiſſeaux.
Du Bain Vaporeux.
LE Bain Vaporeux eſt pour humecter
les matieres calcinées, & celles qui
font trop ſeches, deſquelles l’on veut
faire expreſſion. Il ſe fait en cette ſor-
te. Prenez les choſes, ſoit calcinées,
ou ſeches, aprés avoir eſté pilées, &
[ID00055]
les mettez dans de petits ſachets; ſuſ-
pendez les ſur la vapeur d’un Chaudron
plein d’eau boüillante pour humecter
leſdites choſes, & les tournez juſques
à ce qu’elles ſoient tout à fait imbi-
bées. Vous mettrez les calcinées en lieu
froid ſuſpenduës, un vaiſſeau deſſous
pour recevoir ce qui en fortira: cecy
s’appelle par defailla̅ce. L’huile de Tar-
tre calc inéſe fait en cette matiere. Pour
les matieres que vous voulez tirer par
expreſſion, vous les mettrez ſous la
preſſe; c’eſt ainſi que l’on tire l’huile
de Noix, celle des Amandes, & celle
des quatre ſemences froides.
Diſtillation per medium
cornutum.
CEtte Operation tient le milieu
entre les deux extremitez. Elle eſt
pour les choſes extremément rebelles
& condenſées: l’on ſe ſert de pluſieurs
manieres pour faire le feu. Le feu ou-
vert eſt le plus laborieux, dautant qu’il
eſt pour les Mineraux & Metaux qu’il
faut calciner auparavant que de les di [ID00056] ſtiller.
L’humidité ſuperfluë eſtant diſ-
ſipée, il ne reſte plus que l’humidi té ra-
dicale, qui n’en ſort qu’avec difficulté:
c’eſt pourquoy il faut un grand feu, &
violent, qui neantmoins ſoit par de-
grez, de peur de caſſer les vaiſſeaux.Vous prendrez deux Cornuës ou Re-
tortes, dans l’une deſquelles vous met-
trez ce que vous voudrez diſtiller, ſoit
Sel decrepité, Vitriol calciné, Salpetre,
Alun, ou autre choſe. Vous la rempli-
rez juſques à la moitié, ou pour le plus
juſques aux deux tiers, & y adapterez
une autre Cornuë, en ſorte que celle
qui contient la matiere entre dans cel-
le qui ſert de Recipient; il faut que
celle qui reçoit ſoit de beaucoup plus
grande que celle qui contient, afin que
les eſprits ayent le moyen de circuler.
Pour la diſtillation des Eaux fortes, on
ſe ſert pour Recipient d’un grand Ma-
tras à col court, autrement appellé Bal-
lon. Il faut bien luter les deux vaiſ-
ſeaux enſemble, & donner le feu par
degrez, tant & ſi fort que requiert la
matiere que l’on veut diſtiller. Au dé-
faut d’un Fourneau, l’on peut faire le
[ID00057]
feu à la Cheminée avec des briques,
& approcher le feu de temps en temps.
Ce feu s’appelle de Roüe. L’on peut
auſſi diſtiller par la Retorte au ſable,
limailles & cendres, le Vinaigre, la
Canelle, le Clou de girofle, la Tere-
bentine, & autres; obſervant l’ordre
comme il a eſté dit aux diſtillations
precedentes.
Diſtillation per deſcenſum.
CEtte Operation eſt fort peu uſi-
tée, celle n’eſt que pour les Gom-
mes Raiſineuſes & peſantes, deſquelles
l’on tire la liqueur en cette maniere.
Il faut avoir un pot de terre verniſſé,
large de cul, & percé fort prés à prés
de petits trous, comme pour paſſer un
grain de bled; vous le remplirez à moi-
tié de la Gomme que vous voudrez di-
ſtiller, & le couvrirez d’un couvercle
que vous luterez, & mettrez une ter-
rine ſous ledit pot. Entourez voſtre
terrine de terre, mettez des charbons
allumez ſur le couvercle, augmentez le
feu juſques à ce que le tour du pot qui
ſera vuide ſoit entouré; & lors que vous
[ID00058]
n’entendrez plus d’ebullition l’opera-
tion ſera faite. Il faut laiſſer refroidir
le vaiſſeau dans ſon feu; & quand il ſe-
ra froid, il faut prendre ce qui ſera di-
ſtillé dans la terrine, & le rectifier par
la Cornuë. L’on peut diſt???ller des Ro-
ſes de cette ſorte par un feu doux.
Sublimation.
PLvsievrs ont confondu la Di-
ſtillation avec la Sublimation; il eſt
bien vray qu’en toutes les deux il ſe fait
élevation en l’une des parties fluides
& liquides, c’eſt pourquoy elle eſt ap-
pellée diſtillation, dautant que les fu-
mées qui s’élevent, tombent en eau: il
n’en eſt pas de meſme de la Sublima-
tion, car ce ſont les parties les plus ſpi-
rituelles, legeres, & ſeches qui s’é-
levent & adherent au col du vaiſ-
ſeau. Il eſt à remarquer que quand on
ſublime choſes minerales ou metalli-
ques, les parties les plus élevées com-
me folle farine ſont veneneuſes, & que
la Medecine defend abſolument de
s’en ſervir.La Sublimation ſe fait ſimple, ou par
[ID00059]
addition. La ſimple eſt lors que la ma-
tiere ſe ſublime ſeule, l’autre quand il
faut adjoûter de la limaille de fer, Sel
preparé, ou des Cailloux calcinez pour
arreſter les parties les plus terreſtres &
groſſieres. Le vaiſſeau de Sublimation
eſt un Matras ou haute Cucurbite, avec
un Alembic aveugle percé à la cime, ou
un vaiſſeau de verre appellé Aludel: le
feu doit eſtre de ſable, limailles ou cen-
dres dans une Terrine, comme il a eſté
dit. Souvenez-vous qu’il eſt neceſſaire
en toutes Operations de garder les de-
grez du feu.
Rectification.
CEtte Operation eſt fort neceſſai-
re pour rendre les eſprits plus purs
& plus ſpirituels, & pour les détacher
de ce qu’ils pourroie̅t avoir encore d’im-
pur & de terreſtre, apres avoir eſté di-
ſtillez ſoit par la Retorte ou par l’A-
lembic. Vous rectifirez au Bain Marie
à feu doux ou boüillant, ſelon la nature
de la choſe. Plus vous rectifirez, plus il
faudra diminuer le feu; car les parties
qui s’éleveront ſeront plus ſpirituelles.
|| [ID00060]
Calcination.
IL eſt de deux ſortes de Calcination;
l’une ſimple, l’autre corroſive; &
toutes les deux ne ſont que pour les Mi-
neraux & Metaux. La ſimple ſe fait en
mettant voſtre metail ou mineral dans
un Creuſet, & luy donnant un feu fort
juſques à ce que vous ayez reduit ledit
Metail, ou Mineral en poudre impal-
pable. La corroſive ſe fait par les eaux
fortes, laquelle reduit les Metaux en
chaux. Le nom de Calcination eſt fort
mal donné à cette Operation, dautant
que Calcination eſt deſtruction; & l’or
& l’argent ne ſont point détruits par les
eaux fortes, mais ſeulement corrodez
& alterez; puiſqu’ils reprennent corps
à feu violent, ce n’eſt point Calcination,
mais ſeulement diſſolution imparfaire.
Cohobation.
COhober n’eſt autre choſe que
mettre ce qui ſera diſtillé ſur ce qui
reſte au fond du vaiſſeau diſtillatoire,
afin que la partie ſpirituelle penetre
plus facilement la maſſe, & qu’elle s’au [ID00061] gmente
en vertu. Cette Operation ſe
fait plus au Bain qu’autrement. Celle
qui ſe fait à la Cornuë, le feu doit eſtre
doux, de peur de rendre les choſes di-
ſtillées de mauvaiſe odeut.
Coagulation.
COagvler eſt rendre une choſe
liquide, en conſiſtence ferme: elle
ſe fait en deux façons, l’une par le feu,
l’autre par le froid: celle du feu eſt lors
que vous aurez extrait quelque teintu-
re; vous en ferez evaporer l’humidité
dans une Terrine ou vaiſſeau de verre
juſques à conſiſtence de Miel ou Ex-
traict, ſelo̅ l’uſage auquel vous voudrez
vous en ſervir. Celle qui ſe fait au froid
eſt des Sels diſſouds, lors que vous au-
rez fait evaporer les deux tiers de l’eau,
& qu’il ſe fait au deſſus une petite pelli-
cule, vous mettrez voſtre vaiſſeau au
froid à la cave, & une partie ſe coagu-
lera en Criſtaux, leſquels vous acheve-
rez de ſecher dans un Creuſet, & gar-
derez dans un vaiſſeau bien bouché:
faites evaporer comme deſſus, & met-
tez au froid juſques à ce qu’il ne ſe faſſe
plus de criſtaux.
|| [ID00062]
Filtration.
FIltrer en termes vulgaires, c’eſt
paſſer, ou couler une choſe pour la
rendre plus claire & plus nette. Elle ſe
fait par le papier gris, ou la chauſſe
d’Hypocras, ou par la languette, tant de
fois que celuy qui opere ſoit ſatisfait.
Cette Operation eſt fort neceſſaire pour
l’extraction des Teintures & des Sels.
Deßication.
CAlcination & Deſſication
ſo nt preſque une meſme choſe, à la
reſerve du plus ou du moins. Deſſica-
tion eſt pour deſſecher & rendre la ma-
tiere capable d’impregner la liqueur qui
luy ſera appoſée, ou s’impregner de la-
dite liqueur pour eſtre plus facile à
broyer & piler.
Dulcoration.
DVlcorer eſt laver la Chaux
des Metaux pour en oſter la corro-
ſion que les eaux fortes leur pourroient
avoir co̅muniquées. Elle ſert auſſi pour
dulcorer le Soufre des Metaux & Mi [ID00063] neraux
qui pourroient eſtre corroſifs
par l’addition qui auroit eſté faite pour
avancer leur calcination. Les Pomades
& choſes molles, meſme la Terebenti-
ne ſe peuvent dulcorer.
Inclination.
L’Inclination ſe fait lors que
la choſe eſt lavée & dulcorée, &
qu’elle eſt raſſiſe au fond du vaiſſeau, on
verſe par inclination l’eau de deſſus, la-
quelle ſe ſepare de la matiere facile-
ment.
Amalgamation.
SAns chercher l’origine de ce mot,
lequelſelon quelques Auteurs, n’eſt
que pour le mélange de l’argent vif avec
la Chaux des Metaux; je dis qu’amal-
gamer eſt méler, incorporer, & broyer
une maſſe avec une liqueur tellement
qu’elles ne ſe puiſſent ſeparer.
Digeſtion.
LA Digeſtion s’explique d’elle-meſ-
me. Elle n’eſt autre choſe qu’une
chaleur douce & penetrante & dige [ID00064] rente,
quiſe fait en cette façon. Prene
la choſe que vous voudrez digerer, ſoit
Vegetal ou Animal, & luy donnez un
Menſtruë s’il eſt neceſſaire, & le mettez
dans un Matras, ou Cucurbite bien bou-
chée avec un Alambic aveugle; vous le
mettrez au fumier de Cheval, ou Bain
Marie, tant & ſi peu que le requerera
la matiere que vous voulez digerer.
Cette Operation ne ſe fait que pour dé-
tacher plus facilement les parties pures
d’avec les impures, & les ſubtiles d’a-
vec les groſſieres.
Putrefaction.
PVtrefaction, & Digeſtion
ne ſont qu’une meſme choſe, à la re-
ſerve que l’une eſt plus longue que l’au-
tre, & qu’elles ont deux fins. La Di-
geſtion eſt une coction, & la Putrefa-
ction une pourriture, afin que la matie-
re change de gouſt, d’odeur, & de cou-
leur pour produire une choſe plus par-
faite, & dépoüillée de toutes ſes mauvai-
ſes qualitez; & cette Putrefaction eſt une
diſpoſition à une nouvelle generation.
Elle ſe fait dans le fumier ou au Bain, y
[ID00065]
adjoûtant un Menſtruë, s’il eſt neceſ-
ſaire pour la corrompre.
Menſtruë.
MEnstrve eſt une liqueur qui
ſert pour aider à tirer, & extraire
toutes ſortes d’eſprits, eſſences, tein-
tures, ſels; digerer, & corrompre tou-
tes les choſes qui ont beſoin d’humidi-
té. Il en eſt de pluſieurs ſortes; ſelon la
nature de la choſe que l’on veut extrai-
re ou corrompre, on ſe ſert d’eſprit de
vin, eſprit de roſée, d’eaux fortes,
ſucs de limon, vinaigte diſtillé, eau
commune ou eau diſtillée, ſelon que
l’Artiſte le juge à propos.
Fermentation.
PRenez les choſes que vous vou-
drez fermenter, & les pilez ſi elles
ſont vertes; & ſi elles ſont ſeches, il les
faut arrouſer, & les mettre dans un vaiſ-
ſeau de verre que vous boucherez, &
mettrez à la cave dans du ſable; vous
l’y laiſſerez juſques à ce qu’elles com-
mencent à s’aigrir, puis qu’elles ſeront
alors aſſez fermentées pour les diſtiller.
[ID00066]
Cette operation ſe fait pour rendre les
eſprits faciles à s’élever, & à ſe déta-
cher des parties plus groſſieres.
Circulation.
CIrcvlation eſt proprement
monter, & deſcendre. Cette ope-
ration ne ſert qu’à rendre les choſes
ſpirituelles plus parfaites. Prenez deux
Matrats de grandeur convenable, qui
aye̅t le col court, dans l’un deſquelsvous
mettrez les choſes que vous voulez fai-
re circuler: lutez bien les deux vaiſ-
ſeaux enſemble, & les mettez dans le
fumier de cheval, on au Bain Marie. Il
faut qu’il n’y ait que le Matras dans le-
quel eſt la matiere, qui ſoit entouré de
fumier, ou d’eau; le reſte eſtant décou-
vert, afin que les eſprits puiſſent cir-
culer, & par la fraicheur de l’air ſe con-
denſer en eau, & retomber en bas. Le
Pelican eſt un vaiſſeau fort propre à
cette operation, & s’appelle commu-
nément vaiſſeau circulatoire; au defaut
duquel on ſe ſert de Matras, comme j’ay
dit.
|| [ID00067]
Defaillance.
I’Ay parlé cy-devant de la Defail-
lance en l’article du Bain Vaporeux,
c’eſt pour les choſes calcinées, & hu-
mectées, qui ſe diſſolvent au froid;
leſquelles tombent par defaillance, &
pour celles qui s’exprime̅t ſous la preſſe.
Reverberation.
LA reverberation eſt comme la cal-
cination, excepté que la reverbe-
ration ſe fait dans un vaiſſeau clos, la
calcination à feu découvert. L’on ſe
ſert de cette operation à deux fins;
l’une, afin que les eſprits ſe calci-
nent avec les corps; & l’autre, afin
que la choſe que l’on veut calciner
ait plus de force, & ſoit plus par-
faite.
Precipitation.
PRecipitation eſt une opera-
tion, de laquelle on uſe aprés que
l’on afait diſſolution de quelque metal
par l’eau forte, & qu’il eſt reduit en
chaux. On ſeſert d’eau marinée, pour
[ID00068]
affoiblir la force de ladite eau, & pre-
cipiter le metal en bas, pour l’adoucir
aprés pa???dulcorations d’eau ſimple.
Eau marinée.
L’Eav marinée n’eſt autre choſe que
de l’eau commune dans laquelle on
à mis diſſoudre du ſel commun autant
qu’elle en aura pû prendre. Elle ſert à
precipiter la chaux des metaux, comme
il a eſté dit cy-deſſus.
Stratification.
STratifier, eſt mettre une cho-
ſe en forme de lict dans un vaiſſeau,
& mettre une autre choſe deſſus, &
recommencer lict ſur lict juſques à ce
que toutes vos matieres ſoient miſes.
Elle ſe fait dans deux differens vaiſ-
ſeaux, ſçavoir creuſet & cucurbite. Le
creuſet eſt pour les choſes minerales; la
cucurbite pour celles que l’on veut di-
ſtiller ou mettre en digeſtion. Les Chy-
miſtes appellent cette operation, Stra-
tum ſuper ſtratum.
|| [ID00069]
Torrification.
IOrs qu’il faut torrifier un mixte,
c’eſt qu’il a de l’impureté que l’on
veut corriger, en diſſipant l’humidité
ſuperfluë ou dangereuſe, dont il abon-
de. On fait ainſi. Reduiſez les matieres
que vous voulez torrifier, ou pluſtoſt
purifier & deſſecher en poudre ſi elles
fe peuvent piller, ou coupez-les par
tranches, & les mettez dans un vaiſ-
ſeau propre, c’eſt à dire d’eſtain, parce
qu’il ne peut reſiſter à une chaleur vio-
lente, & qu’il en faut une tres-douce;
vous le mettrez ſur un rechaud, & re-
murez toûjours juſques à ce que vos
matieres ne rendent plus de fumée:
donnez-vous de garde de cette fumée,
car elle eſt dangereuſe. Pour l’Opion,
l’Ellebore, la Scamonée, l’Antimoine,
& quelques autres, ils ſe preparent de
differentes manieres. L’on ſe ſert à quel-
ques-uns de la flâme du Soufre pour
torrifier, en mettant les drogues dans
de petits quarrez de papier que l’on paſ-
ſe par deſſus juſques à ce qu’ils ne fu-
ment plus: quelques-uns les portent
[ID00070]
ſur eux dans de petits ſachets, & par
long-temps les deſechent.
Decrepitation.
CEtte operation n’a qu’un ſeul
object, qui eſt le Sel, & ne ſe pra-
tique que pour le purifier. Dans toutes
ſortes de Sel, il ſe trouve des eſprits
fougueux, leſquels ne peuvent s’aſſu-
jetir, ils s’emportent, & font un bruit
tres-grand, lors qu’ils ſont enfermez, &
caſſent tout ce qui s’oppoſe à leur vio-
lence; mais la Chymie evite tous ces
accidens, en purifiant les Sels de leurs
méchantes qualitez. Cette operation
ſe fait dans un vaiſſeau de terre qui re-
ſiſte au feu, dans lequel vous mettrez
le Sel que vous voudrez decrepiter, &
poſerez ſur des charbons ardans le pot
couvert avec quelque choſe de ſi pe-
ſant, qu’il puiſſe reſiſter, il ſe fera un
grand bruit: lors qu’il ſera appaiſé, laiſ-
ſez refroidir voſtre Sel, & il ſera decre-
pité & preparé.
Feces.
L’On appelle Feces ce qui reſte au
fond des vaiſſeaux aprés les diſtil [ID00071] lations,
& qu’elles ſont demeurées ſe-
ches: l’on peut les brûler pour en ex-
traire les Sels.
Teſte morte.
LA teſte morte eſt une choſe qui n’eſt
propre à rien, inſipide, ſans gouſt
& ſans ſaveur, de laquelle l’on ne peut
rien extraire; c’eſt pourquoy elle eſt
appellée teſte morte, terre damnée ou
condamnée.
Des vaiſſeaux.
LEs vaiſſeaux propres pour les diſtil-
lations per aſcenſum, ſont l’Alembic
de cuivre avec ſa cape & tuyau refrige-
ratoire, le Recipient s’appelle Mattas.Pour diſtiller au Bain-Marie, & aux
feux de cendre, ſable, limaille & fu-
mier, il faut une courge ou cucurbite de
verre avec ſon chapiteau à bec, & ſon
Recipient qui eſt un Matras à col long.Pour diſtiller per medium cornutum,
[ID00072]
il faut deux cornuës, ou bien une cor-
nuë, & un grand Recipient appellé
Balon.Pour ſublimer, il faut un Matras ou
cucurbite avec ſon chapiteau troüé en
haut, ou un Aludel.Pour circuler, il faut deux Matras, ou
un Pelican, au defaut une petite courge
avec un Alembic aveugle.Pour la digeſtion & putrefaction il
faut des courges avec leurs chapiteaux
aveugles; & lors que la putrefaction ou
digeſtion eſt faite, ſi l’on veut diſtiller,
l’on n’a qu’à changer le chapiteau aveu-
gle, & mettre celuy à bec avec ſon Re-
cipient.Pour calciner, il faut un creuſet ou un
pot qui reſiſte au feu.Pour reverberer, il faut deux creu-
ſets, ou deux pots bien lutez les uns ſur
les autres.Pour decrepiter, il faut un pot cou-
vert.Pour torrifier un vaiſſeau d’eſtain.Il eſt encore neceſſaire d’avoir des ter-
rines, des cruches, & des fioles. La
quantité des vaiſſeaux ne fait pas l’ha [ID00073] bile
Artiſte, & ne contribuë que peu
à la perfection des remedes: plus un
ouvrier eſt ſçavant, plus il trouve de fa-
cilité à faire ſon ouvrage, & eſt moins
embaraſſé; c’eſt pourquoy ces grands
laboratoires, & ces nouvelles inven-
tions de verre & de fourneaux, ne ſer-
vent que de montre & de parade.
Du Lut des vaiſſeaux.
PLvsievrs ont eſcrit des Luts des
vaiſſeaux, & les ont compoſé de
tant de drogues, que huit jours ne ſuffi-
roient pas pour les faire; pour moy, ſui-
vant ma ſimplicité ordinaire, voicy ce
que je vous conſeille.Prenez de la terre à potier ſeche, &
reduite en poudre ſubtile, que vous de-
layerez avec des blancs d’œufs bien bat-
tus, un peu de bourre ouverte, de la li-
maille de fer bien deliée, ou du ſable,
& un peu d’urine, petriſſez le tout en-
ſemble en conſiſtence de paſte molle,
[ID00074]
& en lutez vos cornuës & matras, ou
autres vaiſſeaux que vous laiſſerez ſe-
cher doucement à l’air ſans feu, ny So-
leil. Ce Lut reſiſte au feu.Pour refaire les vaiſſeaux caſſez, vous
reduirez la chaux vive en poudre, & de-
layerez avec du blanc d’œuf; vous trem-
perez un linge bien delié dedans, &
l’appliquerez promptement ſur les caſ-
ſures.Pour lurer les Recipiens & les Cour-
ges avec leurs chapiteaux, il ne faut que
de l’empois & du papier.Ayant enſeigné à luter les vaiſſeaux,
il eſt juſte de donner la maniere de les
rogner, & de les percer.Pour les percer, faites fondre du Sou-
fre dans un creuſet, trempez une ficelle
dedans, & la roulez de la grandeur que
vous voudrez percer le vaiſſeau, met-
tez-y le feu, & lors que la ficelle ſera
preſque brûlée, jettez un peu d’eau deſ-
ſus, le morceau de verre tombera.Pour caſſer le col des vaiſſeaux, ex-
poſez-les ſur la flâme de la chandelle,
tournez juſques à ce qu’ils ſoient bien
chauds, & les trempez dans l’eau par
[ID00075]
l’endroit chaufé ils caſſeront; on peut
les unir avec les dents d’une clef.
Des Feux.
IL eſt de pluſieurs ſortes de feux; il
en eſt de naturels & d’artificiels. Le
premier eſtLe feu du Soleil, auquel on expoſe les
choſes faciles à diſſoudre ou reſoudre.
Il faut obſerver en ce feu, que les vaiſ-
ſeaux ne ſoient jamais pleins, parce qu’ils
caſſent.Le feu de fumier de pigeon, qui ſert
pour les digeſtions & putrefactions,
doit eſtre excité par le fumier de cheval.Le feu de fumier de cheval ſert pour
les meſmes choſes: il veut eſtre renou-
vellé tous les trois jours.Le feu de lampe eſt le feu égal.Le feu de charbon, pour les diſtilla-
tions par la cornuë, & le feu de bois
pour l’Alembic refrigeratoire.Il eſt abſolument neceſſaire de ſça [ID00076] voir
conduire ſon feu, d’en garder les
degrez, & de l’augmenter ou dimi-
nuer ſelon le beſoin, puiſque de la con-
duite du feu dependent la perfection
de l’ouvrage, & la conſervation des
vaiſſeaux.
Des fourneaux.
L’Vſage des fourneaux n’eſt pas per-
mis à toute ſorte de perſonnes, pour
quelques conſiderations particulieres,
ce qui eſt cauſe que pluſieurs ſont pri-
vez de faire les operatio̅s Chymiques, ſe
perſuadans que l’on ne peut pas travail-
ler ſans fourneaux: pour les deſabuſer de
cette erreur, & leur donner de la faci-
lité, je dis que les fourneaux ne ſont
point abſolument neceſſaires, puiſque
l’on peut faire toutes les operations ſur
un tripied entouré de brique, ou ſur un
rechaut, ou au coin de la cheminée; il
eſt bien vray que l’on dépenſe un peu
plus de bois & de charbon. Ceux qui
[ID00077]
ſeront ménagers, & qui auront pouvoir
d’avoir des fourneaux, les pourront bâ-
tir ſelon leur deſir; la ſymmetrie n’e-
ſtant point reglée, un chacun les fait à
ſa volonté.Les matieres pour faire les fourneaux,
ſont de la terre à potier, & du ſable; il
faut couper la terre par petits morceaux,
puis l’arrouſer d’eau, & la laiſſer imbi-
ber peu à peu; lors qu’elle ſera en conſi-
ſtence de paſte molle, il faut méler avec,
en diverſes fois, les trois parts de ſable
qui aura eſté ſacé; il faut peſtrir le tout
enſemble juſques à ce que le ſable ne
paroiſſe plus, & que la paſte ne s’atta-
che point aux mains, à lors l’on pourra
faire leſdits fourneaux: quand ils ſont
faits, il les faut laiſſer ſecher doucement
à l’ombre, & les mettre cuire au four de
potier, s’il ſe peut, au defaut les cou-
vrir de braiſe, ou les entourer de mot-
tes à Tanneur, auſquelles on mettra le
feu.Quelsques-uns au lieu de ſable ſe
ſervent de pots à beure reduits en pou-
dre; il y a de la peine à la faire, auſſi eſt-
elle meilleure que le ſable. Il faut meſler
[ID00078]
bien peu de terre avec, dautant qu’il y
en a desja une part.
Des Caracteres Chymiques.
LEs Philoſophes ont fait tout ce
qu’ils ont pû pour ne pas rendre
leurs operations co̅munes Ils ont caché
ſous de certains caracteres le nom de la
matiere des operations, & des vaiſ-
ſeaux, ce qui a eſté cauſe que pluſieurs
ſecrets n’ont pas eſté pratiquez. C’eſt
pourquoy j’ay voulu les expliquer en
faveur de ceux qui liront ce Livre, pour
leur faciliter toutes ſortes d’operations,
& pour les exempter de chercher ail-
leurs leurs explications.
|| [ID00079]
- ſignifie Antimoine.
- Mercure, ou vif argent.
- Les ſept Metaux.
- Mars, ou Fer.
- Venus, ou Cuivre.
- Saturne, ou Plomb.
- Iupiter, ou Eſtain.
- La Lune, ou Argent.
- Le Soleil, ou Or.
- Le Belier.
- Le Lyon.
- Le Sagittaire.
- La Balance.
- Le Verſeur d’eau.
- Les Gemeaux.
- L’Eſcrevice.
- Le Scorpion.
- Les Poiſſons.
- Le Capricorne.
- Le Taureau.
- La Vierge.
- Le Iour.
- La Nuict.
- L’Heure.
- Le Mois.
- L’Année.
- Le Feu.
|| [ID00080]
- L’Eau.
- L’Air.
- La Terre.
- L’Amalgame.
- L’Arſenic.
- Alun commun.
- Alun de Plume.
- Atrament ou Vitriol rougi.
- Azur.
- Airain.
- Atrament, ou Couperoſe blanche.
- Aymant.
- Briques en poudre.
- Borax.
- Ceruſſe.
- Chaux vive.
- Cinabre.
- Cendres commu̅nes.
- Cendres gravelées.
- Eau Forte.
- Eau Royale.
- Fleurs d’Antimoine.
- Fleurs d’Airain.
- Huile.
- Litarge.
- Limaille de Mars.
- Laton.
|| [ID00081]
- Mercure de Vie.
- Minium.
- Magneſie.
- Mercure ſublimé.
- Marcaſſite.
- Mercure precipité.
- Orpiment.
- Poudres.
- Realgar.
- Soufre en canon.
- Soufre vif.
- Sel Armoniac.
- Salpetre.
- Sel marin.
- Tartre.
- Tutie.
- Talc.
- Soude.
- Vitriol commun.
- Vrine.
- Vinaigre diſtillé.
- Vinaigre rouge.
- Vin blanc.
- Verre.
- Sable.
- Cornuë.
- Stratification.
|| [ID00082]
- Eſprit de vin.
- Eſprit en general.
- Vert de gris.
- Feu de roüe.
- Sel Gemme.
- Sel Alkali.
- Soufre des Philoſophes.
- Creuſet.
- Alambic.
- Camphre.
- Meche.
- Mort, ou teſte morte.
- Signifie, Prenez.
- Grain peſant.
- Demy Scrupule.
- Vn Scrupule.
- Demi Drachme.
- Vne Drachme.
- Demi-Once.
- Vne Once.
- Vne Livre.
- Quantité égale.
- Suffiſante quantité.
- Manipule.
- Pugille.
|| [ID00083]
- L’obſervation des poids eſtant neceſ- ſaire en la Medecine, je les ay voulu inſerer à la fin de cette Partie. Voicy leur explication.
- Le grain vaut le poids d’un gros grain d’orge.
- Le demy Scrupule vaut dix grains.
- Le Scrupule vingt grains.
- La demy Drachme eſt de 30. grains.
- La Drachme eſt de 60. grains.
- La demy Once eſt de 4. Drachmes.
- L’Once de huit Drachmes.
- La livre de Medecine eſt de douze onces.
- Ana ſignifie parties égales de pluſieurs drogues differentes qui entrent dans la compoſition d’un remede, qui ſont écrites devantce mot Ana.
- Manipule ſigniſie ce que l’on peut con- tenir dans la main.
- Pugille eſt ce que l’on peut tenir avec trois doigts, ou pincée.
|| [ID00084]
Des Vegetaux.
SI je voulois eſcrire tous les
avantages du Vegetal, &
toutes ſes prerogatives, j’au-
rois une ample matiere, &
je ferois connoiſtre qu’il doit eſtre pre-
feré & à l’animal & au mineral. La Ge-
neſe nous apprend que le Vegetal fut le
premier creé pour les delices, & le ſer-
vice de l’homme dans ſon eſtat de Gra-
ce. Il contribua à ſes plaiſirs par l’em-
belliſſement du Paradis terreſtre, dont
il eſtoit tout l’ornement; & depuis ſa
diſgrace, il en eut beſoin comme de
me dicament: ce qui au precedent ſem-
bloit n’avoir eſté fait que pour ſon plai-
ſir, devint par ſa faute tellement neceſ [ID00085] ſaire,
qu’il a eſté depuis impoſſible de
s’en pouvoir paſſer. Auſſi n’eſt-’il pas
vray, que dans le Vegetal il ſe trouve
dequoy ſatisfaire le gouſt des plus deli-
cats. Il nous fournit dequoy faire de di-
verſes ſortes de pains. Les boiſſons les
plus delicieuſes en proviennent. Il nous
donne un nombre infini de differens
fruits & en diverſes ſaiſons. C’eſt luy
qui produit les huiles, le ſucre, les eſpi-
ceries, le bois, le charbon, & quanti-
té de choſes utiles & neceſſaires pour
l’entretien de la vie. Les animaux meſ-
me ne peuvent ſubſiſter que par luy, &
ne vivent que de luy. Nous remarquons
encore que dans ſon uſage, il ſe trouve
moins de corruption que dans celuy des
animaux. Nos premiers Peres, qui n’a-
voient pour nourriture que les Simples,
l’ont experimenté; la longueur de leur
vie, la vigueur & force de leur corps
auſſi bien que la vivacité de leur eſprit
nous le font connoiſtre. La ſaincte Eſcri-
ture nous donne encore un puiſſant té-
moignage de leur avantage, quand Dieu
voulut purifier la terre de ſes crimes par
unc inondation univerſelle, le Vegetal
[ID00086]
ne participa point à cette punition, puiſ-
que tous les ſimples parurent aprés ce
deſaſtre plus verds qu’ils n’eſtoient au-
paravant. Le rameau d’olive que la Co-
lombe apporta témoigne leur victoire
ſur les autres regnes, & la neceſſité que
les hommes en devoient avoir. Mais il
paroiſt dans tous ces rencontres quelle
eſt leur utilité pour la conſervation de
la vie & de la ſanté. Il eſt pareillement
veritable qu’ils ne le ſont pas moins
pour la rétablir, quand elle eſt alterée.
L’on eſt aſſeuré d’y trouver un prompt
& veritable ſecours dans toutes ſortes
de maladies. David nous le confirme,
lors qu’il dit, Seigneur lavez-moy d’hy-
ſope, & je ſeray nettoyé; deſirant que
ſon corps, qui avoit contribué à ſon pe-
ché, fuſt renouvellé en force auſſi bien
que ſon ame en Grace. Iſaye guerit le
Prophete Ezechias par un cataplaſme
de figuier. Le Samaritain qui deſce̅doit
de Hierico compoſa ſon remede de
deux ſimples pour guerir le bleſſé qu’il
trouva à ſon chemin. Il ſemble meſme
que Salomon n’auroit pas eu avec ju-
ſtice le nom de Sage, s’il n’avoit poſſedé
[ID00087]
parfaitement la connoiſſance des ſim-
ples. L’Eſcriture ſaincte nous en aſſeure,
en mettant entre ſes éloges l’avantage
d’avoir connu depuis le Cedre du Li-
ban juſques à l’hyſope. Si les hommes
s’eſtoient appliquez avec ſoin à leur
connoiſſance, leur vie en ſeroit plus lon-
gue & moins languiſſante. Les deſerts
de la Paleſtine ont veu un nombre infi-
ny de ſaincts Hermites paſſer le terme
que le Prophete do̅ne à la vie de l’hom-
me, & vivre des cent & ſix vingt ans
ſans prendre autre nourriture que celle
des ſimples. Nous voyons encore tous
les jours des Religieux & Religieuſes
mourir tous chenus de vieilleſſe, qui
n’ont veſcu que de legumes. Concluons
donc, que l’on doit preferer avec ju-
ſtice le Vegetal, & à l’Animal, & au
Mineral pour les remedes, comme auſſi
il le peut diſputer à l’Animal pour la
nourriture. Mais comme toutes les cho-
ſes qui ſont an monde ont participé à la
punition de l’homme; elles ont beſoin
de preparation, afin d’en retrancher les
mauvaiſes qualitez pour reünir les prin-
cipes purs & nets de toute corruption,
[ID00088]
pour porter la ſanté à la partie malade.
C’eſt ce que fait la Chymie, en faiſant la
diviſion des ſubſtances, & rendant les
medicamens purs, & ouverts, & ca-
pables de penetrer juſques à la plus
cachée & interieure partie de noſtre
corps. Voicy pluſieurs manieres de les
preparer avec leurs proprietez &
vertus.
De la Vigne.
IE commence par le Vegetal le plus
parfait & le plus neceſſaire à la vie
de l’homme, qui eſt la vigne. La diſtil-
lation de ſon vin doit eſtre abſolument
faite au Bain-Marie, dans des vaiſſeaux
de verre, dautant que le vin a beaucoup
d’eſprits, & qu’il abonde en Vitriol; il
ne peut eſtre mis en aucun vaiſſeau de
metal, ou terre plombée, ſans alterer
le vaiſſeau, ou eſtre alteré luy-meſme,
tant il a de ſympathie avec les metaux.
Ce qu’a bien remarqué un Philoſophe,
[ID00089]
lequel defend meſme de faire le Sel de
Tartre dans aucun vaiſſeau plombé,
ny de metal; il faut donc ſe ſervir de
vaiſſeaux de verre. Vous prendrez ſix
pintes d’excellent vin, & les mettrez
dans la cucurbite, & la couvrirez de
ſon chapiteau avec ſon Recipient, le
tout bien luté; & diſtillez au Bain à feu
doux, & lors que vous aurez une pinte
de diſtillée, changez de Recipient, &
y en mettez un autre pour tirer le phle-
gme qui reſtera dans voſtre vaiſſeau, &
lors que vous verrez qu’il commencera
à monter de l’aigreur, oſtez ce qui ſe-
ra dans voſtre Recipient & le remettez;
faites boüillir voſtre Bain, il diſtillera
un vinaigre, qui ſera parfaitement bon,
lequel vous pourrez rectifier pour le
rendre plus fort; les feces reſtantes aprés
la diſtillation du vinaigre ne ſont pro-
pres à rien, quoy que pluſieurs Autheurs
ayent écrit, qu’il falloit tirer le Sel des
feces; ſans ſe donner cette peine, le Sel
& creſme de Tartre ont plus de force,
& il s’en tire plus grande quantité; c’eſt
pourquoy je n’approuve point cette
operation eſtant penible, longue, &
[ID00090]
inutile. Pour l’huile elle n’eſt point ne-
ceſſaire a la Medecine, & je n’ay point
trouvé d’Autheur qui traite de ſes ver-
tus. Pour perfectionner l’Eſprit de vin
que vous avez cy-devant diſtillé, met-
tez-le ſur deux pintes de bon vin dans
voſtre vaiſſeau, & diſtillez à feu doux,
comme a eſté dit cy devant, & lors que
vous aurez retiré voſtre pinte, ceſſez;
reïterez cette operation ſix ou ſept fois,
en adjoûtant touſiours de nouveau vin,
& vous aurez un Eſprit de vin animé
tres-parfait. Vous pourrez à chaque
fois tirer voſtre vinaigre, ſi vous n’ai-
mez mieux mettre tous les reſidus en-
ſemble, & les dephlegmer & diſtiller
tout à la fois. Pour rendre voſtre Eſprit
de vin plus ſpirituel, vous le mettrez
circuler au fumier, ou au Bain, dans des
vaiſſeaux propres à cet effet, comme il
a eſté dit à l’article de la Circulation.Les vertus de cet Eſprit ſont incom-
parables, tous ceux qui en ont écrit luy
attribuent des effects prodigieux. Ru-
peciſſa l’éleve juſques au Ciel, & en fait
ſon or potable. Il eſt à croire que c’eſtoit
de cet Eſprit que les Poëtes entendoient
[ID00091]
parler par le nectar, qui ſe beuvoit à la
table de leurs fauſſes divinitez. Remond
Lulle le fait paſſer pour un Specifique à
toutes ſortes de maladies, & luy donne
des eloges ſur leſquels on ne peut en-
cherir. Il eſt vray, qu’il eſt fort neceſſai-
re à la Medecine, quoy que la médiſan-
ce puiſſe dire contre luy, tant pour cor-
riger, cuire, & extraire les vertus des
ſimples, animaux, mineraux & metaux,
que pour fortifier les membres affoiblis,
pris en petite quantité dans un vehicu-
le propre au mal: Il réjoüit le cœur, for-
tifie les eſprits vitaux, réveille la me-
moire, aiguiſe l’entendement, aide à
la digeſtion, guerit l’hydropiſie, & fait
pluſieurs autres effects; c’eſt avec cet Eſ-
prit que ſe pratique l’eau de Bellegar-
de, & c’eſt avec ce meſme Eſprit que ce
fait celle de la Reine de Hongrie, qui a
eu la force de rajeunir cette venerable
Princeſſe, & qui ſert aujourd’huy à
conſerver la ſanté à pluſieurs perſonnes,
& contribuë àl’embeliſſement des Da-
mes. Les vertus de cet Eſprit merite-
roient un Volume entier, mais com-
me pluſieurs Autheurs en ont écrit,
[ID00092]
le Lecteur y peut avoir recours.
De l’Eſprit de Tartre.
LE vin produit un Tartre, ou Sel qui
s’attache aux paroiſts des vaiſſeaux
dans leſquels on met le vin. Le Tartre
du vin blanc eſt le meilleur. Ceux qui
ont traité des vertus & perfections de
la vigne, diſent que le vin blanc eſt le
maſle, & que le rouge eſt la femelle. Ie
ne ſçay ſi c’eſt pour cette raiſon que le
Tartre blanc eſt preferé. Prenez du Tar-
tre blanc de Montpellier, que vous pil-
lerez tres-delié, & mettrez dans une
cornuë, que vous remplirez pour le
plus à moitié. Vous y adapterez un
grand Recipient: diſtillez à feu de roüe,
& gardez les degrez du feu, l’Eſprit
ſortira le premier, aprés une huile; &
lors qu’il ne diſtillera plus rien, laiſſez
refroidir vos vaiſſeaux, & ſeparez l’hui-
le d’avec l’Eſprit par le vaiſſeau ſepara-
toire, vous cohoberez l’Eſprit deux ou
trois fois ſur les feces à feu de cendres.Cet Eſprit eſt fort penetrant, il inci-
ſe les humeurs & les deterge, il eſt a-
peritif & diuretique; la doze eſt d’une
[ID00093]
Drachme juſqu’à deux, priſe dans quel-
que eau convenable au mal: il eſt ne-
ceſſaire auparavant que de s’en ſervir de
ſe purger avec de la Caſſe, ou de la
Rheubarbe.L’huile ne s’applique que par dehors
pour mondifier, & deſecher les playes.
Creſme ou Criſtal de Tartre.
PRenez du Tartre, comme il a eſté
dit, & le mettez en poudre ſubtile,
ſur laquelle vous verſerez de l’eau dans
un vaiſſeau de verre de la hauteur de ſix
doigts. Faites boüillit ladite eau demie-
heure, & la verſez par inclination dans
un autre vaiſſeau de verre; remettez
d’autre eau ſur le Tartre reſtant au fond
du vaiſſeau, faites boüillir, & rever-
ſez comme il a eſté dit. Reïterez juſ-
ques à ce que voſtre Tartre ſoit tout
diſſout; prenez toutes ces eaux, & les
faites boüillir juſques à diminution des
trois quarts. La partie reſtante, vous la
mettrez dans un lieu froid, en douze
heures de temps ſe formeront des cri-
ſtaux ſur la ſuperficie que vous leverez
avec une cuillier d’argent, & les deſſe-
[ID00094]
cherez dans un creuſet, puis les garde-
rez dans un vaſe de verre que vous bou-
cherez. Faites reboüillir ladite eau, &
la mettez au froid, & prenez les cri-
ſtaux & deſechez, comme il a eſté dit,
continuez juſques à ce qu’il ne ſe forme
plus de criſtaux. Cette operation s’ap-
pelle Criſtal de Tartre, dautant qu’il
eſt blanc, clair & diaphane comme le
Criſtal, on le doit appeller avec plus de
raiſon Sel fixe du vin.Les Chymiques appellent ce medica-
ment par excellence Medecine benite,
& luy donnent laperfection d’eſtre pro-
pre à toutes ſortes de maladies. La do-
ze eſt d’une Drachme priſe dans un
boüillon, ou autre liqueur. Il ſe fait un
magiſtere du Tartre, lequel je paſſe
ſous ſilence, trouvant les deux opera-
tions cy-deſſus preferables.
Huile de Tartre par defaillance.
PRenez du Tartre, pillez, & le
mettez dans un creuſet ſur des char-
bons ardans, remuez de temps en temps,
& continuez un feu fort, juſques à ce
que le Tartre devienne blanc. Cette
[ID00095]
operation eſt longue, vous pourrez met-
tre une partie de Soufre pillé avec-
que, pour aider à faire brûler le Tartre;
quand le Soufre ſera conſommé, vous
en remettrez d’autre, & continurez juſ-
ques à ce que le Tartre ſoit en cendre
blanche, ou griſe, alors vous le mettrez
dans un ſachet que vous ſuſpendrez à
la cave, & mettrez deſſous un vaiſſeau
pour recevoir la liqueur qui tombera
par defaillance. Cette huile ſert pour
mondifier les playes: Elle guerit les
brulures; il la faut appliquer avec un
plumaceau: elle ſert auſſi à faire preci-
piter les diſſolutions des magiſteres,
comme il ſera dit en quelques articles
cy-apres.
Du Vinaigre & de ſes vertus.
LE vinaigre ſe diſtille à la façon qu’il
a eſté dit au commencement de ce
Chapitre, ou bien vous prendrez du
vinaigre blanc ou rouge, & le diſtille-
rez au Bain-Marie, ou à la cornuë, en
laiſſant la troiſiéme partie des vaiſſeaux
vuides de peur que les Eſprits ne mon-
tent avec le phlegme, dephlegmez à feu
[ID00096]
doux, & augmentez le feu lors qu’il
montera de l’aigreur, & diſtillez juſ-
ques à ce qu’il ne vienne plus rien. Vous
pourrez rectifier tant de fois qu’il vous
plaira, & dephlegmez à chaque fois. Il
eſt à remarquer, que toutes choſes aci-
des ſont froides, & qu’elles ont un phle-
gme inſipide, qui vient le premier. L’on
peut auſſi tirer du vinaigre une huile,
& un ſel, leſquels j’obmets pour n’en
connoiſtre point les vertus.Le vinaigre diſtillé ſert pour extraire
les teintures, il diſſout les perles, & les
coraux. Le vinaigre blanc & diſtillé eſt
pour decraſſer les teints gras & huil-
leux.
Des fueilles, pepins & cendres
de la vigne.
LA vigne nous fournit encore des
fueilles & des tendrons utiles à la
Medecine, pillez enſemble gueriſſent
les douleurs de la teſte appliquez ſur le
front, & les temples; mis en cataplaſme
ſur l’eſtomac le rafraichiſse̅t; l’eau diſtil-
lée deſdites fueilles, & tendrons arreſte
les dyſenteries & crachements de ſang,
[ID00097]
en beuvant un verre le matin; les larmes
de la vigne, quand on la coupe au Prin-
temps nettoye le cuir, éclaircit la veuë
au matin; priſe avec partie égale de vin
blanc fait ſortir le gravier de la veſſie.Les pepins des raiſins reduits en pou-
dre, meſlez avec les trois parts de cen-
dres de ſerment dilayées avec vinaigre
& huile roſat en conſiſtence de boüillie
diſſipe̅t les tumeurs & duretez qui vien-
nent au fondement, appliquées dans un
ſachet; mis à la teſte appaiſent les dou-
leurs de la Migraine.
Du Roſmarin.
CE n’eſt pas ſans raiſon que les Phi-
loſophes ont donné au Roſmarin
l’avantage ſur tous les autres vegetaux;
il s’accommode aux infirmitez des hom-
mes, il échauffe les froids, tempere les
chauds, & tient en eſtat les moderez,
[ID00098]
Rupeciſſa le met au rang des choſes
temperées: Avicenne, Mathiole, Dio-
ſcoride, Dalechamps & autres, luy don-
nent des puiſſances & des facultez capa-
bles de regenerer l’homme, & de luy
donner des forces nouvelles. La pluſ-
part de ces Autheurs ont ignoré les pre-
parations des ſimples, & les ont ordo̅nez
tous crus, ou en decoctions groſſieres;
mais s’ils en diſent tant de merveilles
eſtant mal apreſtez, qu’en pouvons nous
eſcrire & aſſurer, eſtant bien preparez,
purifiez, & détachez de leurs mauvaiſes
qualitez.Vn Philoſophe moderne a eu raiſon
de dire, que tout homme qui aimoit la
vie devoit avoir de l’eſſence de Roſma-
rin en ſa maiſon, comme un Antidote
univerſel à toutes ſortes de maux. Ie
m’en ſuis ſervie heureuſement, & en ay
fait des cures admirables. L’on peut
prendre de ſon eſſence depuis ſix goutes
juſque à dix dans du vin, ouda̅s une cuil-
lerée d’eau ſucrée le matin à jeun. Elle
preſerve de tout air infecté, guerit la
jauniſſe, inciſe les humeurs craſſes, ré-
jouït le cœur, chaſſe la melancholie
[ID00099]
deſopile la rate, guerit de l’Apoplexie,
Eſquinancie, Litargie ſur le champ; rend
l’haleine douce, & fait le teint vermeil,
conforte l’eſtomac, aide à la digeſtion,
priſe comme deſſus.
De l’eau de Roſmarin.
CEtte eau a preſque les meſmes
vertus que l’eſſence; mais il en faut
prendre en plus grande quantité: la do-
ze eſt de cinq à ſix cuillerées. Les bains
faits d’eau de Roſmarin, co̅tinuez quin-
ze jours aprés avoir eſté purgé gueriſ-
ſent la Paraly ſie pour vieille & invete-
rée qu’elle ſoit, ralonge les nerfs ra-
courcis, oſte l’engourdiſſement des
membres, & les fortifie, en baſſinant
les parties affligées de ladite eau tiede,
& les enveloppant d’vn linge trempé
dedans, il faut renouveller trois ou qua-
tre fois le jour.
Teinture ou extraict de Roſmarin.
ELle ſe prend en pillules le poids
d’une Drachme pour faire mourir les
vers; eſtenduë en forme d’onguent ſur
un morceau de cuir guerit les doulours
[ID00100]
qui proviennent de cauſe froide. Cet
emplaſtre ne ſe doit point lever, il faut
le laiſſer tomber de luy-meſme; eſtant
aiguiſé de trois ou quatre goutes de ſon
eſſence il eſt meilleur, & eſt bon pour
les Rheumatiſmes, appliqué ſur les par-
ties douloureuſes.
Du Sel de Roſmarin.
SOn uſage eſt pour les eſtomacs foi-
bles, & debiles, s’en ſervant pour
aſſaiſonner les viandes au lieu de ſel
commun; il provoque l’vrine, tuë les
vers, excite les ſueurs, & purifie le
ſang.
De la Sauge.
LA Sauge eſt un ſimple qui a telle
ſympathie avec toutes les parties de
noſtre corps, qu’elle les peut renouvel-
ler & rendre vigoureuſes: ce qui a fait
dire aux Docteurs de Salerne avec aſſu-
rance, qu’ils s’eſtonnoient qu’un hom-
me fuſt mortel qui avoit de la Sauge à
fon jardin. Dioſcoride luy attribuë une
vertu univerſelle, voicy ce que mon
experience m’en a appris.
|| [ID00101]
De l’Eſſence de la Sauge.
ELle eſt un ſpecifique pour toutes
les maladies du cerveau; elle arre-
ſte, & detourne toutes ſortes de flu-
xions; elle fait ſortir le fruit mort, &
aide la nature à le pouſſer dehors; la
doſe eſt de ſix goutes juſqu’à dix dans
une cuillerèe d’eau de vie, ou eau ſu-
crée; elle fait concevoir la femme ſte-
rile en prenant huict matins de ſuite,
comme il a eſté dit, & s’abſtenant pen-
dant ce temps de la compagnie de ſon
mary.
De l’eau de Sauge.
CEtte eau mondifie les playes, ſi
on les en lave; elle noircit les che-
veux, en faiſant leſſive, fortifie le cer-
veau & les membres, arreſte le ſang ti-
rée par le nez, guerit les picqueures,
ſoulage le mal des dents, reſerre les
genſives, en lavant tout ce que deſſus
de ladite eau un peu chau de.
|| [ID00102]
De la Teinture ou extraict de Sauge.
CEtte Teinture eſt bonne contre
les douleurs froides jettée ſur des
charbons ardans. La fumée priſe par bas
arreſte les pertes de ſang des femmes.
Le poids d’un eſcu pris en pillules arre-
ſte le vomiſſement. La meſme doſe di-
layée dans demy verre de vin blanc, büe
par trois matins à jeun, guerit la fievre
quarte.
Le Sel de Sauge.
CE Sel doit eſtre appellé Benit pour
les biens qu’il produit; il eſt uni-
verſel pour toutes ſortes de maladies
pris dans un vehicule convenable au
mal. La doſe eſt d’un ſcrupule juſques
à deux: il a les meſmes vertus que l’eſ-
ſence, l eau & la teinture; reüniſſez tou-
tes les quatre parties enſemble, & adjoû-
tez un peu de moüelle de cerf, mettez
le tout dans un vaſe de verre, duquel
le tiers ſera vuide, & bien bouchè; expo-
ſez-le un mois au Soleil, & vous aurez
un Baume pour toutes ſortes de playes
& de douleurs.
|| [ID00103]
De l’Hyſope.
LE Vegetal eſt un des plus neceſſai-
res à la Medecine, particuliere-
ment pour les maladies des femmes,
neantmoins il s’en trouve peu de pre-
paré comme il faut.
De l’Eſſence.
L’Eſſence eſt ſouveraine pour les ma-
ladies du poulmon provenantes de
cauſes froides; elle guerit les paſles cou-
leurs des filles, & leur fait venir leurs
purgations; elle fait vuider l’arrierefaix,
qui reſte aprés l’accouchement; elle ai-
de à la reſpiration, & donne des forces;
la doſe eſt de huict à dix goutes priſe
dans ſon eau, ou vin blanc.
De l’eau d’Hyſope.
CEtte eau ſert de vehicule à ſon
Eſſence; elle eſt propre pour toutes
les maladies ſufdites. La doſe eſt d’un
demy verre juſques à vn verre.
|| [ID00104]
De la Teinture ou extraict de l’Hyſope.
IL ſe fait des pillules de cette Teintu-
re aiguiſée de dix ou douze goutes de
ſon Eſſence. Vne Drachme de ſel de
Mars, une demie-Drachme de pithyme,
une goute d’Eſſence de clou de girofle,
deux de canelle, quatre grains de tein-
ture de Safran, le tout incorporé dans
trois Drachmes de teinture, deſquelles
l’on fera quatre priſes. Elles font reve-
nir les purgations de long-temps arre-
ſtées en les prenant le matin, il faut con-
tinuer juſqu’à gueriſon.
De la Taneſie.
LA Taneſie eſt preſque inconnuë en
France, quoy qu’elle ait des quali-
tez tres-particulieres. Les Alemans &
les Griſons s’en ſervent comme de The-
riaque contre toutes ſortes de maladies;
je l’ay experimenté à toutes les maladies
ſuivantes.
|| [ID00105]
De l’Eſſence de Taneſie.
ELle facilite les accouchemens des
femmes, priſe de dix à douze goutes
dans deux cuillerées d’eau de canelle;
quatre goutes priſes dans deux cuille-
rées de ſon eau fait mourir & ſortir les
vers. La meſme doſe priſe en eau de per-
ſil fait vriner facilement, diſſout &
rompt la pierre.
De l’eau de Taneſie.
CEtte eau n’eſt point deſagreable,
quand on a mis du miel de Narbon-
ne dedans; elle fait ſortir les vers des
petits enfans, leur en donnant à boire le
matin quatre ou cinq cuillerées, trois
ou quatre jours de ſuite dans le decours
de la Lune. Au défaut de l’Eſſence l’on
peut donner un verre de cette eau à la
femme en travail d’enfant; elle facilite-
ra ſon accouchement; & ſi l’on prend
huict matins de ſuite un verre de cette
cau, avant que d’accoucher, & que l’on
ſe promene une heure dans la chambre,
l’on accouchera heureuſement & faci-
lement.
|| [ID00106]
Teinture de Taneſie.
CEtte Teinture eſtenduë ſur un
morceau de cuir appliqué ſur le
ventre des enfans, fait mourir & ſortir
les vers.
Du Sel de Taneſie.
LE Sel a les meſmes vertus que deſ-
ſus, pris dans un œuf ou boüillon
le poids d’un demy-Scrupule, juſques à
un Scrupule.
Du Thim.
GAllien donne des propriete z à
la ſeule decoction du Thim tres-
grandes, à plus forte raiſon le pur eſtant
ſeparé de l’impur, on en doit eſperer
d’heur eux effects. Prenez une Drach-
me d’eſſence, deux livres d’eau, deux
Drachmes de Teinture, une Drachme
de Sel, meſlez le tout dans une livre de
vinaigre diſtillé, faites diſſoudre de-
dans du miel blanc à diſcretion. Ce re-
mede eſt pour les Aſmatiques, & pour
ceux qui ne peuvent reſpirer; il aide à
cracher la pourriture qui eſt dans la poi [ID00107] trine,
il fait reſoudre les tumeurs & en-
flures froides. Il reſout le ſang caillé, il
eſt bon aux toües inveterées, il guerit
du haut mal en continuant d’en pren-
dre un mois entier le matin à jeun. La
doſe eſt d’un demy verre. L’Eſſence ſeu-
le eſt bonne appliquée au dehors pour
les ſciatiques, & goutes froides.
Du Fenoüil.
L’Essence du Fenoüil, priſe cinq
ou ſix goutes dans un demyverre de
ſon eau fortifie la veuë, & fait ſortir les
vents.L’eau eſt bonne pour laver les yeux
malades, & pour faire les infuſions de
Rheubarbe, & de Sené.La Teintur??? priſe en pillules ſait ſor-
tir les vents, & fortifie l’eſtomach, de-
layez la groſſeur d’une noiſette dans
une chopine de ſon eau, & un Scrupu-
le de ſon Sel, ce ſera un lavement ad-
mirable pour les coliques venteuſes.Son Sel eſt excellent pour aſſaiſonner
les viandes de ceux qui ont des vents.
|| [ID00108]
De la Menthe ou Baume.
IL eſt de pluſieurs ſortes de Baumes
ou Menthes, de rouges, blanches,
cultivées & ſauvages; mais ſans faire
leurs diſcernemens, je diray de quelque
façon qu’elles ſoient, que l’Eſſence en
eſt chaude, qu’elle rend l’haleine dou-
ce & agreable, priſe cinq ou ſix goutes
le matin à jeun dans une cuillerée d’eau
de Canelle; deux ou trois goutes tirées
par le nez font revenir l’odorat perdu;
ſon eau chaude fortifie les membres re-
froidis & affoiblis, les en eſtuvant un
peu trois ou quatre fois le jour l’eſpace
de quinze jours.Le Sel, l’eau, l’Eſſence & la Teinture
reünis enſemble, mis dans une phiole,
expoſez un mois au Soleil, deviennent
un vray Baume pour toutes les playes,
particulierement pour celles de la teſte.
De la Ruë.
L’Essence de la Ruë eſt un ſpecifique
pourſe garantir de la peſte, en pre-
nant dans le temps de peſte, tous les ma-
tins cinq ou ſix goutes dans une cuille [ID00109] rée
d’eau de vie; elle chaſſe les vents;
elle deſſeche & inciſe les groſſes hu-
meurs, priſe dans un boüillon cinq à
ſix goutes.Son eau appaiſe les douleurs de la poi-
trine, conforte la veuë, en beuvant un
demy verre le matin à jeun. Vn demy
verre de ſon eau, & ſept ou huict gou-
tes de ſon Eſſence purgent doucement
le phlegme.S??? Teinture appliquée en forme de
cataplaſme ſur les cuiſſes appaiſe les
douleurs qui proviennent de laſſitude.
De la Marjolaine.
L’Essence de la Marjolaine eſt ex-
cellente pour appaiſer les douleurs
de teſte, priſe huict à dix goutes dans
une cuillerée d’eau roſe; deux ou trois
goutes tirées par le nez fait le meſme
effet.Son eau un peu chaude conforte la te-
ſte, & guerit les douleurs des aureilles,
lavant leſdites parties d’icelle.De ſa Teinture meſlée avec eſprit de
Therebentine & cire neufve, il s’en fait
un amplaſtre pour les douleurs des han [ID00110] ches,
& des reins, il s’applique ſur du
cuir.Ses feüilles ſechées à l’ombre redui-
tes en poudre, priſes par le nez font
eternüer doucement, & dechargent le
cerveau.
Maniere de diſtiller toutes ſortes de
Simples Aromatiques, & tendres.
I’Ay reſolu pour le ſoulagement du
Lecteur de reïterer la methode de di-
ſtiller les Simples Aromatiques, & Sim-
ples tendres, & la maniere d’en extrai-
re les Teintures & Sels. Pour diſtiller les
Aromatiques, il eſt neceſſaire de leur
donner un Menſtruë, dautant que dans
leur bois il ſe trouve de l’Eſſence, &
les bois ne ſe peuvent piller, de plus ils
n’ont pas tant d’humidité que les Sim-
ples tendres. Vous les diſtillerez dans
l’Alembic de cuivre par le Refrigera-
toire, comme il eſt dit au premier ar-
ticle de la diſtillation.
|| [ID00111]
Pour les herbes tendres, ſi elles ſont
vertes, vous les pillerez dans un mor-
tier de marbre, ou de pierre, & les met-
trez fermenter trois ou quatre jours à
la cave dans un vaiſſeau de verre, ou à
ſon deffaut dans des vaiſſeaux de terre
verniſez, vous en exprimerez le ſuc par
la preſſe que vous filtrerez, & diſtille-
rez au Bain, faiſant le feu ſelon que l’eau
aura de la facilité à s’élever, lors qu’il
ne montera plus d’eau, ceſſez, ce qui
reftera au fond du vaiſſeau s’appelle
Teinture ou Extraict, lequel vous ferez
evaporer juſques à conſiſtence de vin
cuit, ou miel, ou bien vous y adjoûterez
du ſucre pour en faire du Syrop, co̅me il
ſe fait de Bugloſſe, Bourrache, Dendive,
& autres, leſquels ont tous leurs pro-
prietez particulieres des Extraicts ou
Teintures. Vous vous en pourrez ſervir
à former des pillules, & faire des lave-
mens. Vous prendrez gros comme une
noiſette de chacun de ceux quiſont pro-
pres pour cet effect, que vous delairez
dans quelque eau convenable, & l’ai-
guiſerez des Sels deſdits ſimples, &
vous verrez que cette diſſolution aura
[ID00112]
des effects tous autres que les decoctio̅s
ordinaires deſquelles on fait les lave-
mens.Pour les herbes ſeches, il les faut ar-
rouſer, ſoit pour les diſtiller, ou pour
en extraire la Teinture. L’eau de pluye
diſtillée eſt la meilleure au deffaut de
l’eau co̅mune de riviere, la quantité doit
eſtre égale aux herbes, vous n’en tirerez
que la ſixiéme partie de l’eau que vous
y aurez miſe: toutes les Teintures ne ſe
tirent pas avec de l’eau, il faut un Men-
ſtruë, ſelon leurs facultez; aux Aſtrin-
gentes il faut du vinaigre diſtillé, aux
diuretiques du vin blanc, aux laxatifs
de l’eau de Bourrache, Bugloſſe, ou Ci-
chorée; aux ſudorifiques du Chardon
Benit. Il ſe trouve des corps rebelles, &
qui ont des qualitez veneneuſes qu’il
faut penetrer & corriger par l’Eſprit
de vin, ou des eaux aromatiques.
Des Sels.
POvr faire du Sel, il faut avoir des
cendres; c’eſt pourquoy Frere Ba-
ſile Valentin a dit dans ſon Traité des
douze Clefs, ſi tu n’as point de cen [ID00113] dres,
tu n’auras point de Sel: il faut
brûler les ſimples, & les rendre en cen-
dres blanches, & en tirer le Sel par leſ-
ſive que vous ferez en cette ſorte. Vous
ferez chaufer de l’eau plus que tiede,
& la verſerez ſur vos cendres, qu’elle
ſurnage de ſix doigts, & laiſſerez re-
froidir, puis filtrerez & ferez evaporer
juſques à conſiſtence de Sel. Si voſtre
Sel n’eſt aſſez blanc, faites-le decrepi-
ter dans un creuſet, & rediſſoudre dans
ſon cau, ou cau commune; filtrez, &
deſſechez, comme il a eſté dit tant de
fois, que vous ſoyez ſatisfait, à la ſept
ou huictiéme fois il ſera fuſible.
Betoine.
L’Eav diſtillée de la Betoine tous
les matins büe à jeun le poids de
quatre onces fortifie la veuë, conforte
l’eſtomac, fait vuider le ſang meurtry
& caillé, & les eaux des Hydropiques,
[ID00114]
mondifie la poitrine, adoucit les dou-
leurs de la ratte, purge les ſeroſitez de
la teſte, & fortifie les membres. Elle
oſte la rougeur des yeux ſi on les en la-
ve, nettoye les dents, & appaiſe la dou-
leur, reſſerre les genſives, s’en garga-
riſant la bouche eſtant un peu tiede.La Teinture meſlée avec un peu de
cire pour luy donner corps, eſt mer-
veilleuſe pour les playes de la teſte: elle
fait ſortir les eſchilles, & diſſout le ſang
meurtry.Ses racines infuſées dans du vin blanc
du ſoir au matin font vomir; c’eſt pour-
quoy il faut oſter les racines des tiges
lors que l’on veut diſtiller, autrement
l’eau ſeroit vomitive.
Chelidoine.
CEtte eau a la vertu de faire vui-
der les humiditez ſuperfluës, qui
ſont entre le cuir & la chair. Elle deſen-
fle les membres büe un mois tous les
matins un demy verre avec partie égale
de vin blanc. Elle mange les tayes des
yeux, mais il la faut corriger avec une
part d’eau de plantain ou lait de femme,
[ID00115]
& en mettre trois ou quatre fois le jour
ſur la taye.Sa Teinture leve les chairs mortes,
& mondifie les vlceres, incorporée avec
de la cire en forme d’emplaſtre.
Morelle.
GEtte eau eſt rafraichiſſante &
aſtringente; elle arreſte toutes ſor-
tes de cours de ventre, les fleurs blan-
ches, les pertes de ſang des femmes büe
ſoir & matin quatre onces à chaque pri-
ſe; ilfaut continuer juſqu’à gueriſon. Ses
fueilles pillées & meſlées avec cendres
de ſerment en conſiſtence de boüillie
en faire fronteau entre deux linges, ap-
paiſe la douleur de teſte qui provient
de chaleur, provoque doucement le
dormir.Sa Teinture aiguiſée de ſon Sel, ap-
pliquée ſur les excroiſſances de chair,
diſſipe & guerit.
Meliſſ???.
CEtte cau a des proprietez uni-
verſelles, & eſt utile en toutes ſor-
tes de maladies; particulierement elle
[ID00116]
réjoüit le cœur, diſſipe la melancholie,
purifie le ſang, arreſte le battement de
cœur, aide à la digeſtion, affermit le cer-
veau, tient le ventre libre, priſe tous les
matins le poids de trois à quatre onces.Sa Teinture priſe en pillules arreſte
le devoiment: meſlée avec ſon ſel, & de
la charpie, guerit les écrouelles; il faut
mettre par deſſus une emplaſtre de dia-
palma, & changer ſoir & matin de char-
pie: fonduë en forme d’onguent, ap-
paiſe les douleurs de la goutte, en fro-
tant doucement la partie malade.
Aluine, ou Abſinthe.
L’Eau titée de cette herbe, conforte
l’eſtomac, rend l’haleine agreable,
excite l’appetit, provoque l’vrine, fait
venir les purgations aux filles, ſoulage
les Hydropiques, deſopile la ratte. La
doſe eſt de deux onces juſqu’à trois,
dans un demy verre de vin blanc büe le
matin, il faut continuer un mois.Sa Teinture a les meſmes vertus que
l’eau, priſe en pillules le matin, & une
heure devant ſouper le poids d’une
Drachme à chaque fois.
|| [ID00117]
Son Sel guerit de la peſte, priſe
en eau de rüe; il fait vuider les eaux des
Hydropiques, diſſout dans du vin blanc.
La doſe eſt de vingt à trente grains.
Mille-pertuis.
L’Eau qui ſe tire des fleurs & des
fueilles de Mille-pertuis, guerit les
abcés qui viennent dans le corps, em-
péche la corruption, fait ſortir, & mou-
rir les vers, & empeſche qu’il ne s’en
forme pour l’advenir, ſi l’on en boit
ſoir & matin deux onces deux fois la
ſemaine; elle guerit du haut mal en bu-
vant un an de temps tous les matins
quatre onces de ladite eau, & ſe pur-
geant d’agaric toutes les ſemaines une
fois. Elle fortifie les Paralytiques, s’ils
en uſent long-temps, & s’ils frotent les
parties paralytiques d’Eſſence de Roſ-
marin, ou de l’eau de la Reine de Hon-
grie; elle arreſte le crachement de ſang,
meſlée partie égale d’eau d’hyſope avec
du miel blanc.Sa Teinture dans laquelle on aura di-
layé de la poudre de chaux vive, arreſte
la gangrene, & ſepare la chair morte
[ID00118]
d’avec la vive, meſlée avec emplaſtre,
dont on panſe les playes, les preſerve
de gangrene: de ſes fleurs avec huile
d’Olive & eſprit de Terebentine ſe
fait un Baume, qui guerit les coupures
& meurtriſſeures.Son Sel a meſmes vertus que l’eau &
reinture: diſſout dans ſon eau le poids
d’une Drachme, le meſme poids diſ-
ſout dans un verre de vin d’Eſpagne
guerit ſoudain la pleureſie.
Violette.
L’Eau de fueilles, & racines de Vio-
lette tempere les ardeurs de la cole-
re; elle rafraichit, fait dormir, appaiſe
les douleurs de teſte, adoucit les ardeurs
de la poitrine, deſaltere, & deſopile le
foye, guerit la jauniſſe en buvant matin
& ſoir un grand verre, dans lequel on
diſſoudra un peu de ſucre.Ses racines, infuſées une nuict dans
un verre de vin blanc, exprimé & bu le
matin, purgent doucement.Sa graine reduite en poudre le poids
d’une demie-once, priſe dans un verre
de ſon eau fait faire trois ou quatre ſel-
les ſans tranchées.
|| [ID00119]
Sa Teinture eſt bonne pour allier les
poudres, deſquelles on veut former
des pillules, & pour delayer dans des
lavements rafraichiſſants. L’on la peut
auſſi appliquer ſur les parties où il y
aura inflammation, meſlée auec les
quatre farines, & en faire cataplaſme.
Pourpier.
CEtte eau eſt fort rafraichiſſan-
te; elle deſaltere ceux qui ſont
travaillez de la ſoif; dans les fiéures ar-
dantes, elle fait dormir. Son uſage doit
eſtre moderé; car elle eſt nuiſible à
l’eſtomac. La doze eſt de deux à trois
cueillerées dans un verre d’eau com-
mune.
Laictuë.
IL faut ſe ſervir de cette eau avec
grande circonſpection, & corriger
ſa froideur par le ſucre, ou par quelque
aromatique. Elle eſt dangereuſe, priſe
en trop grande quantité. Elle rafrai-
chit beaucoup, & fait dormir.
|| [ID00120]
Cichorée.
CEtte eau a de grandes avantages;
elle rafraichit & fortifie l’eſto-
mach, excite le ſommeil doucement,
réjoüit le cœur, purge la ratte, tient le
ventre libre. Elle eſt excellente à faire
les infuſions de Sené & de Reubarbe,
meſlée avec partie égale de Fenoüil.
Fraiſier.
L’Eav de fucilles & racines de
Fraiſier eſt cordiale & rafraichiſ-
ſante, & peut eſtre beüe en tout temps,
& en toutes maladies où il y a ardeur
du foye. Elle n’a aucune mauvaiſe
qualité, conſerve l’embon-point, for-
tifie & tient le teint frais.
Bourrache & Bugloſſe.
CEs deux herbes ont beaucoup de
rapport entre-elles: Elles ont les
meſmes vertus, & ſont miſes au nom-
bre des cordiales. Elles rafraichiſſent
ſans accident, fortifient & purgent
doucement. La doſe eſt de trois à qua-
tre onces, beüe le matin.
|| [ID00121]
Ozeille
L’Vsage de cette eau a la vertu de
guerir les Catarres de quelque na-
ture qu’ils ſoient: il en faut prendre le
matin quatre onces, & continuer un
mois de temps. Il faut la faire chauffer,
& diſſoudre dans chaque priſe une
cuillerée de miel blanc: Il faut viure
de regime pendant ledit temps, & ſe
purger deux ou trois fois, ſelon le lieu,
ou la partie malade.
Chardon benit.
CE n’eſt pas ſans ſujet que cette
Herbe porte la benediction avec
elle. Son eau eſt confortative; elle
pouſſe les mauvaiſes humeurs au de-
hors par les ſueurs, renouvelle les for-
ces. L’on en peut prendre depuis qua-
tre iuſques à ſix onces. Il eſt bon d’en
donner à ceux qui ont la fiéure, & qui
ont peine à ſuer à la fin de leur accés.Son Sel eſt ſudorifique; une drachme
diſſout dans un verre de ſon eau, fait
fuer abondamment.
|| [ID00122]
Mauves.
CEtte eau eſt bonne pour des per-
ſonnes enroüées, qui ont peine à
parler. Il en faut boire le matin un ver-
re avec du ſucre; & le ſoir, deux heures
apres le repas autant. Elle aide les fem-
mes dans leurs accouchemens, ſi elles
en prennent quatre onces avec une on-
ce d’huile d’amande douce. Elle appa ſe
la douleur des aureilles, & guerit de la
ſourdité nouvellement arrivée, ſi l’on
la meſſe avec jus d’oignon, & eau de
Morelle, partie égale. Il la faut chauf-
fer, & mettre trois ou quatre gouttes
dans l’aureille, & tremper un morceau
de coton, & le mettre deſſus le ſoir en
ſe couchant. Il ne ſe faut pas coucher
ſur le coſté où l’on a mis le remede. En
cas que toutes les deux aureilles fuſſent
malades, l’on mettra le ſoir à l’une, &
le ſoir ſuivant à l’autre. Il ſe fait une
emplaſtre de ſa Teinture, de celle de
bois de Sault, therebentine de Veniſe,
partie égale, avec un peu de cire: pour
les playes où il y a inflammation, il
faut delayer gros comme une noiſette
[ID00123]
de ſa Teinture dans la decoction des
lavemens.
Guimauves.
L’Eav des fueilles & des racines
de cette herbe, le poids d’une once,
avec une once d’huile d’amande douce,
beue le matin un mois de temps, appai-
ſe les ardeurs de l’urine, & fait ſortir
le ſable qui ſe trouve dans la Veſſie. Ses
fueilles cuites dans du gros vin, avec
une once de miel en conſiſtence, un
peu époiſſe, étenduë ſur de la filaſſe
rouſſie, appliquée ſur les mammelles
enflées & dures, les amollit & reſout
les apoſtemes. Il en faut appliquer
trois ou quatre fois le jour, & conti-
nuer.
Parietaire.
L’Eav de Parietaire eſt rafraichiſ-
ſante, büe le poids de deux à trois
onces; laſche l’urine ſupprimée, guerit
les échauffures qui viennent en la bou-
che, appaiſe la douleur des dents, ſi
on la tient dans la bouche vn peu
chaude.
|| [ID00124]
Sa Teinture meſlée avec graiſſe de
chappon guerit les bruſlures. Il en faut
appliquer trois ou quatre fois le jour
avec une plume. Elle reſout les apo-
ſtemes des mammelles, diſſipe les in-
flammations, arreſte les douleurs de la
colique, appliquée ſur les mammelles
& ventre, comme deſſus.Son Sel pris le poids d’une drachme
dans un boüillon, provoque les ſueurs.
Fume-terre.
L’Eav de Fume-terre eſt laxative,
purge la bile, fortifie le foye, & le
deſopile; guerit les fiéures bilieuſes,
diſſipe les humeurs coleriques & adu-
ſtes; conforte les membres, & les affer-
mit, priſe le poids de quatre onces le
matin dans un bouillon. Elle nettoye le
cuir de toute galle & rougeur, éclaircit
les yeux ſi on les en lave.Sa Teinture en conſiſtence de pillu-
les, priſe le poids de deux drachmes,
purge la bile.Son Sel diſſout dans un boüillon, le
poids d’une drachme, fait le meſme
effect.
|| [ID00125]
Plantain.
L’Eav de Plantain guerit les opi-
lations de foye, & de la ratte. Elle
rafraichit le ſang échauffé, reſerre le
ventre, preſerve des hemorroïdes,
guerit les ulceres du poulmon, arreſte
le crachement de ſang, chaſſe les fié-
ures tierces, en beuvant trois ou quatre
matin, depuis quatre iuſques à ſix on-
ces. Elle guerit & deſſeiche les playes
nouvelles, en les lavant trois fois le
jour de ladite eau; appaiſe les douleurs
de la bruſlure, mettant un linge trem-
pé dedans ſur la partie bruſlée, qu’il
faudra ſouvent renouveller.Sa Teinture en conſiſtence d’extraict,
animée de ſon Sel, app???iquée ſur une
playe nouvelle, pourveu qu’elle ne ſoit
profonde que d’un demy-doigt, les
guerit en cinq jours.
Cerfeuil.
CEtte eau purifie le ſang, fait vui-
der les eaux des hydropiques, ap-
paiſe les douleurs de coſté, fait ſortir
la pourriture de dedans le corps, tuë
[ID00126]
les vers, fortifie l’eſtomac, büe le matin
un grand verre. Il eſt neceſſaire de ſe
promener moderément apres l’avoir
büe.
Perſil.
L’Eav de Perſil eſt admirable pour
décharger les reins, & faire vui-
der le ſable: Il en faut boire un verre
le matin, dans lequel on mettra deux
gouttes d’eſprit de vitriol. Elle nettoye
& conforte l’eſtomac, & tient le ventre
libre.
Ioubarbe.
CEtte eau eſt fort froide: elle
amortit les ardeurs de la fiéure
chaude, guerit les ulceres des boyaux,
appaiſe la douleur de teſte, arreſte rou-
te ſorte de flux, priſe le poids de qua-
tre à cinq onces.Sa teinture repercute les apoſtemes
chaudes, appaiſe les douleurs de la
goutte provenante de chaleur; meſlée
avec huile roſat, guerit les bruſlures.
|| [ID00127]
Des Roſes.
IL eſt de pluſieurs ſortes de Roſes, de
rouges, d’incarnates, de blanches,
de ſauvages, appellées Roſes de chien;
leſquelles ont toutes leurs proprietez
particulieres. La façon de les diſtiller
eſt commune: chacun en uſe comme il
luy plaiſt; pour moy voicy ma methode.Prenez des Roſes à diſcretion, & les
nettoyez de toutes ſortes d’ordures,
que vous pillerez dans un mortier de
marbre, ou de pierre; & les mettrez
dans un vaſe de verre bien bouché
fermenter huit ou dix jours dans la ca-
ve, juſqu’à ce qu’elles commencent à
s’aigrit. Alors exprimez leſdites Roſes
ſous la preſſe, dans un ſac de toile bien
forte: filtrez ladite expreſſion, & la
diſtillez au bain, & luttez toutes les
[ID00128]
jointures de vos vaiſſeaux, & faites un
petit feu au commencement; car la pre-
miere eau qui mo̅te n’eſt que phlegme,
& n’eſt pas odoriferante, mais bien
celle qui tient le milieu. Mettez la pre-
miere, ſeconde, & troiſiéme à part, &
vous verrez que la ſeconde a plus de
force & d’odeur. Pour ce qui reſte au
fond de voſtre vaiſſeau, en conſiſtence
de ſyrop, eſt une Teinture, qui a les
meſmes facultez que le ſyrop de Roſes.
Il ſe garde pluſieurs années ſans ſe gâ-
ter, bien qu il ſoit ſans ſucre. I’ay ex-
perimenté pluſieurs fois qu’il eſtoit
plus purgatif que le ſyrop vulgaire.
Pour voſtre Eau-roſe, vous la pourrez
rectifier ſur de nouveau ſuc de Roſes,
& la faire circuler, comme l’eſprit de
vin, pour la rendre plus ſpirituelle.Prenez le marc des ſuſdites Roſes, &
le remettez dans le vaiſſeau de verre;
& verſez par deſſus de l’eau commune,
qu’elle ſurnage de deux doigts, & bou-
cherez & mettrez fermenter à la cave
quinze jours: puis exprimez, filtrez &
diſtillez comme au precedent, & vous
aurez encore de meilleure Eau-roſe que
[ID00129]
celle qui ſe vend communément. Faites
ſecher voſtre marc, & le bruſlez, pour
en tirer le Sel par leſſive, & ranimerez
voſtre Eau dudit Sel. Elle ſe gardera &
conſervera pluſieurs années.Cette Eau a des qualitez tres-utiles:
Il ſe fait peu de médicaments dans leſ-
quels elle n’entre en compoſition:
ſon uſage frequent fait connoiſtre ſes
vertus.
De la Teinture de Roſes.
CE qui eſt reſté au fond de vo-
ſtre vaiſſeau apres vos diſtillations,
eſt une Teinture, laquelle eſt purga-
tive. Il eſt une autre ſorte de Tein-
ture de Roſes, laquelle eſt fort commu-
ne. Elle ſe fait en cette façon. Prenez
une once de Roſes rouges ſeches; ver-
ſez deſſus deux liures d’eau dans un
vaiſſeau de verre, ou de grais: adjoûtez-
y une demy drachme d’eſprit de ſou-
fre, ou de vitriol; couurez voſtre vaiſ-
ſeau, & le mettez infuſer ſur des cen-
dres chaudes, dans quatre heures vous
aurez une Teinture fort rouge, que
vous filtrerez par le papier broüillart,
[ID00130]
ou chauſſe d’hypocras, & diſſoudrez
du ſucre à diſcretion.Cette Teinture eſt bonne pour tou-
tes les maladies du foye, aux fiéures
ardantes, aux exceſſives chaleurs; aide
à la digeſtion, conſerve l’embon-point,
purifie le ſang, en beuvant deux ou trois
verres par jour.
Conſerve de Roſes.
PRenez des Roſes de Provins, les
boutons à demy ouverts: couppez
les ongles avec des ciſeaux, & les pilez
dans un mortier de marbre, tant qu’ils
deviennent comme de la pâte: Par cha-
que livre mettez deux livres de ſucre,
ou caſſonade en poudre; incorporez
bien le tout enſemble; & puis les met-
tez dans une Cucurbite de verre, que
vous couvrirez d’un Alembic aveugle:
lutterez bien les jointures, que vous
laiſſerez ſecher; puis mettrez vos vaiſ-
ſeaux dans du ſable en la cave, & les y
laiſſerez quarante jours: apres leſquels
vous retirerez vos vaiſſeaux, & met-
trez voſtre Conſerve dans des vaſes
propres pour la garder.
|| [ID00131]
Sa vertu eſt un remede pour toutes
les maladies du poulmon: Elle confor-
te l’eſtomac, aide à la digeſtion, pro-
voque doucement le dormir. Il en faut
prendre ſoir & matin gros comme une
noix.
De l’huile de Roſes.
VOvs prendrez des Roſes paſles,
que vous ferez ſecher à demy en-
tre deux ſachets; puis les mettrez infu-
ſer au ſoleil dans une phiole de verre,
avec de l’huile d’oliue qui ſoit claire,
& ſans odeur, qu’elle ſurnage la hau-
teur de quatre doigts; & les laiſſez in-
fuſer quinze jours: puis tirez voſtre-
dite huile, & Roſes, & les exprimez,
& remettez de nouvelles Roſes dans
voſtre phiole auſoleil, le plus que vous
pourrez; & verſez voſtre ſuſdite huile
deſſus, & remettez au ſoleil: reïterez
cette operation juſques à trois fois, &
laiſſez voſtre phiole au ſoleil, le plus
que vous pourrez. Il faut qu’il y ait
l’eſpace de quatre doigts de vuide à
voſtre phiole, & que le bouchon ſoit
de parchemin, percé de trous d’épin [ID00132] gle,
afin que les phlegmes ſe diſſipent.Ses vertus ſont aſſez connuës, c’eſt
pourquoy je les paſſe ſous ſilence.Le Miel-roſat ſe fait comme le vio-
lat; dont il ſera parlé cy-apres.
De la Violette.
PRenez vos fleurs de Violettes, & les
épluchez, comme pour faire ſyrop;
que vous pilerez, ferme̅terez, exprime-
rez, & filtrerez co̅me les roſes; & diſtil-
lerez au bain juſques à ce qu’il ne mon-
te plus rien. Deux cueillerées de cette
eau, miſe dans un verre d’eau d’orge,
rafraichiſſent plus que deux onces de
ſyrop violat. Elle fortifie l’eſtomac,
engraiſſe, fait dormir. Elle eſt bonne à
toutes ſortes d’âges, & de perſonnes.
L’on peut changer de vehicule. On la
peut prendre dans un boüillon, ou dans
du vin; ſelon la diſpoſition & tempe-
rament de la perſonne. Vous pour-
rez remettre de l’eau ſur voſtre mare,
que vous mettrez fermenter cinq ou ſix
jours; puis diſtillerez comme au pre-
cedent. Cette eau n’a pas tant de force
que la premiere: auſſi elle ſe prend
[ID00133]
ſeule avec un peu de ſucre. Il en faut
boire le matin un verre.Sa Teinture, reſtée au fond du vaiſ-
ſeau, eſt une maniere de ſyrop; auquel
on peut adjouſter du ſucre pour le ren-
dre plus agreable. Deux cueillerées
purgent doucement.Il eſt de pluſieurs ſortes de ſyrops
violats, que je ſupprime: je me conten-
te d’écrire la maniere de le faire ſans
feu. Vous prendrez des Violettes bien
épluchées, que vous pillerez dans un
mortier de marbre, avec partie égale
de ſucre fin. Lors que tout ſera bien
incorporé enſemble, vous le mettrez
dans un Matras, auquel vous en join-
drez un autre, de ſorte que celuy dans
lequel ſont vos Violettes entre dans ce-
luy qui doit ſervir de recipient. Lut-
tez-les bien enſemble, avec du papier
& de la colle, & les laiſſez ſecher. Vous
les mettrez trois jours fermenter dans
la cave; & puis les expoſerez au ſoleil,
en lieu où il ſoit la plus grande partie
du jour; & placez vos vaiſſeaux de fa-
çon qu’ils ſoient en penchant, afin que
le ſirop puiſſe tomber dans celuy de
[ID00134]
deſſous. Le ſucre & le ſuc des fleurs
diſtilleront enſemble doucement, & le
ſyrop ſe cuira au ſoleil dans quinze
jours. L’operation ſera faite; le marc
reſtant au fond, eſt propre pour faire
du miel.
Miel Violat.
VOvs prendrez voſtre maſſe, ou
les éplucheures de vos Violettes,
que vous mettrez dans telle quantité de
miel qu’il vous plaira, que vous aurez
premierement fait boüillir, & écumé.
Vous les ferez boüillir enſemble envi-
ron un quart d’heure; puis les paſſerez
tous chauds dans un linge, & l’expri-
merez ſous la preſſe, & l’expoſerez
quinze jours au ſoleil. Vous vous en
ſervirez à ſon uſage.Il s’extraict auſſi une Teinture des
Violettes par l’eſprit de ſoufre, ou de
vitriol, de la meſme façon que celle
des roſes.L’huile Violat ſe fait comme l’huile
Roſat.
|| [ID00135]
Eau clairette de Violette.
PRenez de l’eſprit de vin, dans le-
quel vous mettrez infuſer des fleurs
de Violettes bien épluchées, & nettes,
dans un vaiſſeau de verre; que l’eſprit
de vin ſurnage de quatre doigts les
fleurs: faites infuſer au Bain juſques à
ce que les fleurs déviennent blanches;
voſtre eſprit ſera rouge, que vous fil-
trerez par la chauſſe d’hypocras, & le
remettrez ſur de nouvelles fleurs, com-
me deſſus. Vous adjouſterez un ſachet
de linge, dans lequel il y aura de la ca-
nelle concaſſée. A cette ſeconde infu-
ſion, voſtre eſprit deviendra violet,
que vous filtrerez comme au prece-
dent. Vous diſſoudrez du ſucre à diſ-
cretion dans de l’eau-roſe; puis le met-
trez avec voſtre eſprit, que vous expo-
ſerez au ſoleil le plus long-temps que
faire ſe pourra. Cette eau a la vertu de
conforter l’eſtomac, d’aider à faire cra-
cher les phlegmes, & d’appaiſer la
toux. Sa doſe eſt d’une cueillerée.
|| [ID00136]
Fleurs de Nenuphar.
L’Eav de fleurs de Nenuphar ra-
fraichit; elle fait dormir; elle eſt
bonne aux ardeurs de la fiévre; deux
cueillerées meſlées dans un verre de
ptiſanne. Elle arreſte la diſſenterie, &
les fleurs blanches, buë le poids de
quatre onces, trois matins de ſuite. Elle
appaiſe les gouttes qui proviennent des
cauſes chaudes, & ſoulage la douleur
de teſte.Sa Teinture, en conſiſtence d’extrait,
avec de la cire, fait une emplaſtre pour
les inflammations, rafraichit les par-
ties, & repercute les humeurs.L’on fait du miel de ſes fleurs, pour
les lavemens rafraichiſſans, qui ſe fait
comme le violat.
Fleurs de Bourrache, & de
Bugloſſe.
LEs eaux des fleurs ont quelque
choſe de plus ſpirituel, & de deli-
cat, que celles qui ſe tirent des fueilles,
tiges & racines: Celles des fleurs de
Bourrache & Bugloſſe ſont meilleures
[ID00137]
que celles de leurs fueilles. Elles ſont
cordiales, ſtomacales, & tiennent le
corps en bon eſtat. Elles purifient le
ſang, ouvrent l’appetit, excitent les
ſueurs, diſſipent la bile, en beuvant un
verre une fois ou deux la ſemaine.Leurs teintures priſes le poids de deux
drachmes, laſchent le ventre doucemét.
Fleurs de Peſcher.
L’Eav diſtillée des fleurs de Peſ-
cher, purge autant que ſon ſyrop;
mais il en faut prendre en plus grande
quantité.La doſe eſt de trois à quatre onces.
Vne drachme de ſa teinture, en conſi-
ſtence d’extraict, purge la bile & les
ſeroſitez: ſi l’on bruſle ſon bois & ſes
fueilles pour en faire le Sel, pour rani-
mer ſon eau, ſur une pinte demie once
dudit Sel, elle en ſera plus purgative.
Fleurs de Pavot Rheas rouge.
VOvs émonderez les fueilles de
vos Pavots, que vous pillerez &
diſtillerez au Bain, comme les prece-
dentes. Cette eau appaiſe les douleurs,
[ID00138]
& fait dormir, priſe le poids d’une on-
ce: appliquée ſur les inflammations,
elle les amortit, & rafraichit les par-
ties. Elle appaiſe la douleur de teſte,
provenant de fiévre chaude.Sa teinture fait dormir, priſe le poids
d’une drachme.
Fleurs de Camomille.
VOvs oſterez ſeulement les queües
de vos fleurs, que vous pillerez
& diſtillerez comme les autres. Les ver-
tus de cette eau ſont admirables pour
les ulceres, apoſthemes, & douleurs
interieures, büe le matin & le ſoir un
verre. Elle mondifie les ulceres exte-
rieures, appaiſe les douleurs des mem-
bres, aſſouplit les nerfs tendus, l’appli-
quant deſſus un peu chaude, & enve-
loppant les parties malades d’un linge
trempé dedans, le plus chaud que l’on
pourra ſouffrir: & lors qu’il refroidira,
il faut le renouveller.Sa reinture, en conſiſtence d’extrait,
priſe par la bouche le poids d’une
drachme, a le meſme effet; & appliquée
par le dehors en cataplaſme, appaiſe les
[ID00139]
douleurs des nerfs & des jointures:
délayée dans les lavemens avec de la
teinture de Mille pertuis, guerit les
ulceres des boyaux.Son huile ſe fait par infuſion, com-
me celle des roſes.
Fleurs de Sureau.
CEtte eau a la vertu de faire vuider
les eaux des hydropiques, en beu-
vant matin & ſoir le poids de quatre
onces un mois entier. Elle excite les
ſueurs en prenant trois onces, en ſe
mettant au lict; & purifie le ſang.Sa teinture, en conſiſtence de pillu-
les, le poids de deux drachmes, dans
lequel on incorporera trente grains de
Ialap, purge les hydropiques, & leur
fait vuider les eaux. Ils doivent ſe pur-
ger ſouvent.
Fleurs de Soucy.
CEtte eau eſt excellente pour for-
tifier, éclaircir, & oſter la rougeur
des yeux, appliquant une compreſſe
trempée dedans le ſoir, & luy laiſſant
toute la nuit. Il faut continuer neuf
[ID00140]
jours. Elle appaiſe la douleur des mam-
melles par fomentation.Sa teinture, meſlée avec huile d’oli-
ves & beurre-frais, partie égale, miſe
dans une phiole de verre, expoſée par
quarante jours au ſoleil, eſt un baume
pour toutes les douleurs de membres,
de nerfs, & de jointures. Elle s’appli-
que tiede.
Fleurs de Bouillon-blanc.
IL faut piller les fleurs de Boüillon-
blanc, & les imbiber de vin blanc,
qui les ſurnage de trois doigts, & les
mettre fermenter à la cave trois ſemai-
nes, puis il les faut exprimer, filtrer,
& diſtiller au Bain. Cette eau appaiſe
les douleurs de la goute, & de la poda-
gre. Il en faut boire le matin un verre,
& en baſſiner la partie malade, le plus
chaud que l’on pourra. De la meſme
eau, miſe un peu chaude dans la bou-
che, appaiſe la douleur des dents.Sa teinture eſt aſtringente: elle ar-
reſte le dévoiment; & délayée dans des
lavemens, reſerre.
|| [ID00141]
Fleurs d’Orange.
VOvs mettrez vos fleurs d’Orange,
ſans autre preparation, dans une
Courge de verre, & les preſſerez un
peu, afin qu’elles ne tiennent pas tant
de place. Luttez bien le Chapiteau & le
Recipient, de peur que les eſprits ne ſe
perdent: diſtillez au Bain boüillant,
juſques à ce qu’il ne monte plus rien.
Tirez le Sel de la maſſe, & ranimez vo-
ſtre eau, & l’expoſez au ſoleil, bouchée
d’un parchèmin percé, comme il a
eſté dit.Cette eau arreſte les ſuffocations qui
proviennent de la matrice. L’on en peut
prendre une once juſques à trois, dans
le commencement de l’accés. De plus,
elle provoque les vomiſſemens ſans
effort.
Huile de fleurs d’Orange.
VOvs ferez infuſer des fleurs d’O-
range dans de l’huile de Ben, d’a-
mandes douces, ou des quatre ſemen-
ces froides, tirée ſans feu dans un vaiſ-
ſeau de verre; que l’huile ſurnage de
[ID00142]
quatre doigts leſdites fleurs. Bouchez
voſtre vaiſſeau, & faites voſtre infuſion
au ſoleil, ou au Bain tiede trois ou qua-
tre jours: apres leſquels vous paſſerez,
& exprimerez voſtre huile du marc de
vos fleurs, & en remettrez de nouvelles,
& ferez comme au precedent. Reïterez
trois ou quatre fois, juſques à ce que
voſtre huile ſoit tres-odoriferante.
Vous l’expoſerez au ſoleil, comme il a
eſté dit de l’huile de Roſes.
Fleurs de Mille-pertuis.
CEtte eau ſe tire comme les deux
precedentes. L’huile ſe fait auſſi de
meſme, à la reſerve qu’il faut à celle-
cy de l’huile d’olive. Ses vertus ſont
eſcrites au Chapitre des Simples ten-
dres.
Fleurs de Febves.
L’Eav des fleurs de Febves ſe fait
comme il a eſté dit de la fleur d’O-
ranges.
|| [ID00143]
Pommes de Reinette.
IL eſt juſte de commencer ce Chapi-
tre par la Reine des fruits. Ce n’eſt
pas ſans raiſon que nos Anciens luy ont
donné le nom de Renette. Elle a des
vertus tres-particulieres pour l’entre-
tien de noſtre ſanté, elle contribuë à la
rétablir. Vous coupperez vos pommes
par tranches tres-minces, & en oſterez
les pepins, & les mettrez lict ſur lict
dans une Cucurbite de verre, que vous
remplirez pour le plus des deux tiers.
Luttez la Cape & le Recipient, & di-
ſtillez au Bain boüillant, & continucz
juſqu’à ce qu’il ne monte plus rien. Cet-
te eau eſt agreable: elle rafraichit, &
humecte: elle eſt amie du poulmon:
elle conſerve l’embon-point; fait dor-
mir, deſaltere, & tient le corps en bon
[ID00144]
eſtat. L’on y peut adjouſter du ſucre, &
en faire une Limonade. La doſe n’eſt
point limitée; car elle n’eſt point nuiſi-
ble. Elle oſte les inflammations des
yeux ſi on les en lave.Les feces, reſtantes apres la diſtilla-
tion, cuites en conſiſtence d’extraict, &
meſlées avec partie égale de miel, font
avancer les bubons, & apoſtemes.
Syrop de pommes de Renette cruës,
tirées ſans feu.
PRenez des pommes de Reinet-
te, pelez-les, & les couppez par
tranches tres minces, & les rangez dans
un plat-baſſin. Couvrez-les de ſucre
pillé, & les arroſez d’un peu d’eau-
roſe. Mettez le plat en lieu humide, &
le placez de façon qu il ſoit en pan-
chant. Mettez un vaiſſeau deſſous pour
recevoir la liqueur qui en dégoutera:
en douze heurestout le ſyrop ſera tom-
bé. Il eſt excellent pour les maux de
gorge, & pour les maladies du poul-
mon. Il humecte & rafraichit les cha-
leurs de la bouche, provenantes des
ardeurs de la fiévre.
|| [ID00145]
Fraiſes.
LEs Fraiſes ſe diſtillent en deux ma-
nieres, au Soleil, & au Bain. Pour
les deux operations, il faut piler le fruit,
& le mettre fermenter à la cave. Celles
que vous voudrez diſtiller au Soleil,
vous les mettrez dans des vaiſſeaux,
comme il eſt dit à l’Article du Syrop
violat tiré ſans feu.Cette eau eſt bonne pour conſerver le
teint, & pour oſter les taches du viſage.
L’autre maniere de diſtiller eſt au Bain.
Cette eau eſt bonne contre toutes ſortes
de venins. Elle provoque les purga-
tions, fortifie l’eſtomac, ſi l’on en boit
un demy verre au matin. Si on lave les
yeux larmoyeux de cette eau, apres
avoir eſté purgé, elle les deſſeche, &
arreſte la fluxion.
Des poires & pommes de Coin.
CEtte eau ſe tire comme celle des
pommes de Reinette. Elle eſt aſtrin-
gente: elle arreſte la dyſenterie, & la
diarrhée. Elle conforte l’eſtomac, aide
à la digeſtion. L’on peut faire marme [ID00146] lade
de ce qui reſte au fond du vaiſſeau.
Apres la diſtillation, il y faut mettre du
ſucre, & luy faire faire un ou deux
boüillons. Elle eſt bonne pour les maux
d’eſtomac.
Groiſeilles rouges.
L’Eav de Groiſelles ſe fait comme
celle de Fraiſes. Il faut fermenter,
exprimer, filtrer, & diſtiller au Bain
boüillant. Si vous mettez quatre pin-
tes de ſuc dans la Cucurbite, vous en
tirerez deux par la diſtillation: & dans
les deux autres reſtantes, vous mettrez
du ſucre cuit, & vous aurez une belle
& excellente gelée. La vertu de l’eau
eſt de rafraichir, & de deſalterer. Elle
excite le ſommeil, & humecte le poul-
mon. Elle eſt bonne aux fiévres ardan-
tes, & fort utiles dans les grandes cha-
leurs.
Noix vertes.
COvppez les Noix vertes par tran-
ches, & les mettez lict ſur lict dans
voſtre Cucurbite, que vous remplirez
pour le plus des trois parts. Diſtillez au
[ID00147]
Bain boüillant, juſqu’à ce qu’il ne mon-
te plus rien. Mettez l’eau au Soleil, bou-
chée d’un parchemin troüé d’épingles,
pour diſſiper le flegme. Le temps de
faire cette eau eſt dix ou douze jours
apres la Saint Iean. Cette eau eſt un
ſouverain remede contre la peſte, &
contre les maux d’eſtomac, & de cœur.
Elle provoque les ſueurs: elle diminuë
l’ardeur des fiévres chaudes: elle gue-
rit le mal caduc, les vertiges, ou tour-
noyements de teſte, la paralyſie. Elle
rafraichit le foye, chaſſe les eaux des
hydropiques, büe avec le vin blanc, &
un peu de creſme de Tartre. Si on con-
tinuë ſon uſage durant trente jours, elle
détache les phlegmes, & humeurs viſ-
queuſes des inteſtins, & chaſſe les ven-
toſitez. Elle tuë les vers, en gargariſme.
Elle oſte la corruption des genſives, &
la pourriture des dents; & rend l’halei-
ne bonne exterieurement. En frottant
les tempes, elle provoque le ſommeil.
Elle eſt un ſouverain remede pour les
playes, ulceres, contuſions, & contri-
buë à embellir le viſage, & oſte les ta-
ches du cuir: & l’on tient meſme qu’elle
[ID00148]
eſt admirable pour les abcés, apoſthe-
mes, & fiſtules du dedans du corps. Sa
doſe, pour l’ordinaire, eſt de deux à
trois cuillerées.
Fruicts Dalchichange.
VOvs prendrez les fruicts d’Alchi-
change qui ſont enfermez dans
une petite cloche; vous les pillerez,
fermenterez, exprimerez, filtrerez, &
diſtillerez au Bain, juſques à ce qu’il ne
diſtille plus rien. C’eſt un aſſeuré reme-
de pour faire ſortir l’urine ſupprimée.
Elle fait vuider le ſable des reins, & de
la veſſie. Sa doſe eſt de deux onces juſ-
ques à trois, dans un verre de vin
blanc.Sa teinture, en conſiſtence d’extraict,
priſe le poids de deux drachmes, fait les
meſmes effects de l’eau.
Noiſettes rouges.
VOvs caſſerez vos Noiſettes, & en
prendrez les fruicts, que vous
pillerez, & mettrez diſtiller ſeules, ſi
elles ſont vertes. Si elles ſont ſeches,
vous leur donnerez pour menſtruë de
[ID00149]
l’eau de Noix vertes diſtillées, & les
ferez infuſer vingt-quatre heures au
Bain. Apres, diſtillez juſques à ſiccité.
Exprimez les feces qui reſteront au
fond ſous la preſſe, pour en extraire
l’huile.Cette eau eſt un aſſeuré remede
contre la courte-haleine, en prenant
matin & ſoir deux cuillerées avec un
peu de ſucre Roſat.L’huile empeſche les cheveux de
blanchir, & les teint en blond, ſi on les
en frotte pluſieurs fois.
Melons, Citroüilles, Courges, &
Concombres.
LEs eaux qui ſe tirent de ces quatre
fruits, ont les meſmes qualitez &
vertus. Elles ſe diſtillent d’une meſme
maniere. Vous les coupperez par tran-
ches, & en oſterez les ſemenc es, & di-
ſtillerez comme les pommes. Ces eaux
ſont rafraichiſſantes. Elles arreſtent
toutes ſortes de flux, font dormir. El-
les ſont bonnes pour tremper le vin
dans les grandes chaleurs, & ne ſont
pas ſi nuiſiblesque la glace. Elles ſervent
[ID00150]
à laver & purifier les gans, pour tenir
les mains fraiches.
Meures.
VOvs procederez à la diſtillation
des Meures, comme à celle des
Fraiſes. Cette eau eſt pour les maux de
gorge, & pour laver les ulceres de la
bouche. Elle affermit les dents, & reſ-
ſerre les genſives.Sa teinture, avec du ſucre, arreſte le
dévoyement. La doſe eſt de trois ou
quatre cuillerées.
Teinture de Reubarbe.
PRenez de bonne Reubarbe, & la
couppez par petites tranches, & les
mettez dans un uaiſſeau de verre. Ver-
ſez deſſus de l’eau de Cichorée, ou
d’Endive, qu’elle ſurnage de quatre
doigts. Bouchez voſtre vaiſſeau, & le
[ID00151]
mettez en digeſtion au Bain, juſqu’à ce
que voſtre cau ſoit teinte. Verſez par
inclination voſtreteinture, & mettez
de nouvelle eau deſſus ce qui reſte dans
voſter vaiſſeau. Faites infuſer comme
au precedent, & continuez juſqu’à ce
que voſtre eau ne ſe teigne plus. Prenez
toutes vos Teintures, & les filtrez, &
les mettez dans une Cucurbite: retirez
l’eau par diſtillation au Bain; la Tein-
ture demeurera au fond, que vous gar-
derez pour vous en ſervir. Si vous en
voulez former pillules, vous la ferez
evaporer en conſiſtence d’extraict.
Quoy que les Teintures ſoient plus pu-
res que les choſes d’où elles ſont extrai-
tes, elles doivent neantmoins eſtre pri-
ſes le meſme poids que devant leur pu-
rification; dautant que plus les reme-
des ſont puriſiez, & moins ils ſont vio-
lents.Les vertus de cette Teinture ſont de
purger la bile, & la pituite tartarée &
viſqueuſe du ventricule, & des par-
ties voiſines. C’eſt un ſpecifique pour
le foye. Il guerit la jauniſſe, & fortifie
apres avoir purgé, c’eſt pourquoy l’on
[ID00152]
s’en ſert avec heureux ſuccés dans les
dyſenteries, diarrhées, & autres flux
où il faut de l’aſtriction.
Teinture de Senné.
TOvtes les Teintures s’extrayent
d’une meſme façon par infuſions
& digeſtions; mais les menſtruës ſont
differe̅t es pour extraire celles du Senné.
Prenez de l’eau de Fenoüil, Anis, Bu-
gloſſe, Bourrache, ou Cichorée, com-
me il vous plaira. Il n’eſt que trop con-
nu que le Senné eſt le plus uſité de tous
les remedes purgatifs; mais il eſt plus
ſingulier de ſ avoir qu’il purge les hu-
meurs bruſlées & careuſes, la bile & la
pituite, ſoit dans le cerveau, ou dans
le foye, ou la ratte, & meſme par un
uſage continu, les parties les plus eſloi-
gnées. Il excite quelquefois des tran-
chées: il eſt à propos de le corriger
avec de la Canelle, ou du Zingenvre.
Teinture, ou Fecule d’Agaric.
CEtte operation ſe doit plutoſt ap-
peller Fecule que Teinture, dau-
tant qu’il ne rend aucune Teintu???e, &
[ID00153]
a fort peu de liaiſon. Elle s’extraict com-
me celle de Reubarbe, avec eſprit de
vin. Ses vertus ſont de purger la pitui-
te ſubtile, & les humeurs viſqueuſes de
tout le corps; mais principalement des
poulmons, du cerveau, & du mezen-
te re.
Teinture de Safran.
VOvs extrairez cette Teinture
comme la precedente, avec eſprit
de vin. Elle eſt amie du cœur, & du
poulmon. Elle a une grande familiarité
avec tous les autres viſceres, & particu-
lierement avec la matrice. Elle ouvre,
digere, & ramolit: appaiſe les dou-
leurs, excite le ſommeil, provoque les
mois, & aide à faire ſortir l’enfant.
L’uſage de cette Teinture eſt tres-fre-
quent dans l’apoplexie, les vapeurs de
la matrice, la jauniſſe, l’aſthme, & dans
toutes les maladies veneneuſes, & ma-
lignes. La doſe eſt de cinq à ſix gouttes
dans quelque eau convenable.
|| [ID00154]
Teinture d’Elebore noir.
L’On ſe ſert d’eſprit de vin pour ex-
traire les Teintures des Mixtes diffi-
ciles à penetrer. L’Elebore a beſoin d’un
menſtruë penetrant, c’eſt pourquoy il
faut que l’eſprit ſoit bon. Vous coup-
perez le bois par petites pieces, & pra-
tiquerez comme vous avez fait cy-deſ-
ſus. Ses vertus ſont de purger toutes les
humeurs melancholiques, & par con-
ſequent toutes les maladies qui en pro-
viennent, comme ſont la manie, la fo-
lie, les paſſions hypochondriaques, les
vertiges, les cancers, la fiévre quarte,
l’apoplexie, l’epileptie, les galles &
gratelles noires, & autres maladies de
meſme genre: Mais il faut conſiderer
la force des malades auant que de s’en
ſervir. Il eſt à propos de conſulter un
prudent Medecin, dautant que le re-
mede eſt violent.
Teinture de Coloquinte.
VOvs coupperez les pommes de
de Coloquinte, & vous vous ſer-
virez pour menſtruë d’eau de Roſma [ID00155] rin.
Faites digerer au Bain comme aux
operations precedentes, juſques à ce
que vos pommes ſoient diſſoultes; que
vous exprimerez, & retirerez au Bain
voſtre eau de Roſmarin, la Teinture
reſtera au fond du vaiſſeau. Elle a la
vertu de tirer la pituite groſſiere & viſ-
queuſe des parties les plus profondes
& eſloignées du corps, comme du cer-
veau, des nerfs, & des jointures. Et pour
cet effect elle eſt ordonnée aux verti-
ges, aux migraines, à l’apoplexie, & à
l’epilepſie. La doſe eſt de ſix grains juſ-
ques à douze. Son uſage n’eſt que pour
les perſonnes fortes & robuſtes, par-
ce qu’elle eſt ennemie du ventricule,
& des inteſtins.
Teinture d’Aloës.
MEttez voſtre Aloës dans un vaiſ-
ſeau de verre: verſez deſſus quel-
que eau aromatique, ou eſprit de vin,
& procederez comme aux autres Tein-
tures. Sa vertu eſt de purger & deſſe-
cher. Elle eſt chaude, à cauſe dequoy
elle provoque les mois, & les hemor-
roïdes: elle fortifie le ventricule, tuë
[ID00156]
les vers, & les chaſſe dehors; empeſ-
che la pourriture & corruption. Elle
nettoye, conſolide, & fortifie. Elle eſt
un inſigne remede pour les playes.
Teinture de Gomme-gutte.
VOvs extrairez cette Teinture
comme deſſus, avec eſprit de vin.
Elle a la vertu de chaſſer les ſeroſitez
par haut & par bas, qu’elle tire de tout
le corps, & les humeurs viſqueuſes &
pourries C’eſt pourquoy l’on s’en ſert
dans les hydropiſies, & aux fiévres lon-
gues, aux galles & gratelles. La doſe
eſt depuis ſix grains juſques à quinze.
Du Cloud de Giroffle.
LEs eaux & eſſences du Cloud de Gi-
roffle, & de Canelle, ſe tirent d’u-
ne meſme façon. Voicy la maniere de
[ID00157]
les extraire. Vous prendrez lequel il
vous plaira, & le concaſſerez groſſiere-
ment, & le mettrez dans une Cornuë.
Verſez de l’eau commune deſſus, qu’el-
le ſurnage de quatre doigts, & que le
tiers de voſtre vaiſſeau demeure vuide;
lequel vous boucherez, & mettrez en
infuſion au Bain trois jours: apres le-
quel vous joindrez un Recipient à
voſtre Cornuë, de telle ſorte que voſtre
vaiſſeau qui diſtille entre librement de-
dans, & donne au milieu. Luttez bien
le tout; & lors que le lut ſera ſec, diſtil-
lez au feu de ſable, & gardez les de-
grez du feu: lors que les trois parts de
l’eau que vous aurez miſe deſſus ſeront
diſtillées, ceſſez voſtre operation, &
laiſſez refroidir vos vaiſſeaux. Puis ſe-
parez l’huile d’avec l’eau par l’enton-
noir. Laquelle huile eſt au contraire de
celle de Sauge & de Roſmarin. Elle
demeure au fond par ſa peſanteur: elle
vient la premiere par le vaiſſeau ſepa-
ratoire. Vous la mettrez dans une phio-
le, que vous boucherez. Pour l’eau
vous la rectifierez au Bain, dautant
qu’elle ne vient pas claire, à cauſe que
[ID00158]
la diſtillation par la Cornuë eſt toû-
jours plus violente; parce que les eſ-
prits n’ont pas eu le temps de circuler.
Vertus de l’Eſſence du Cloud de
Giroffle.
L’Eſſence de Giroffle fortifie la
nature affoiblie, ſoit pour l’avoir
trop ſurchargée par les excés du boi-
re ou du manger, ou pour l’avoir fait
pâtir, en ne luy donnant point d’ali-
ment. Elle travaille par la digeſtion de
l’un, & reſtaure les forces & chaleur
naturelle, & donne de la vigueur qui
ſeroit affoiblie par le manque de l’autre.
De toutes ſortes d’âges l’on peut tom-
ber dans ces deux extremitez: c’eſt
pourquoy elle eſt bonne aux vieux, &
aux jeunes, lors qu’ils manquent de
chaleur naturelle, & a toutes les mala-
dies froides. La doſe eſt de trois à qua-
tre gouttes dans du vin, ou en eau de
Bugloſſe, Bourrache, Meliſſe, Char-
don-benit, ou en ſon eau propre. Elle
fortifie les membres refroidis, & les
ranime. Elle aſſouplit les nerfs: elle ſert
à faire de l’Hypocras, en mettant une
[ID00159]
goutte ſur une pinte de vin, & autant
d’eſſence de canelle, & du ſucre à diſ-
cretion. D’une livre de cloud, quand il
eſt bon, & qu’il n’a point eſté alteré,
l’on en peut tirer deux onces d’eſſence.L’eau de Giroffle a les meſmes effects
que l’Eſſence. Elle ſe prend en plus
grande quantité, dautant qu’elle n’a
pas tant de force. Sa doſe eſt d’une de-
mie cuillerée juſques à une cuillerée.Sa Teinture, qui eſt reſtée au fond de
voſtre vaiſſeau, a pluſieurs vertus. Elle
peut ranimer les parties dénüées de
chaleur naturelle, l’appliquant deſſus.
Elle eſt bonne pour les gouttes froides
& ſciatiques, & pour toutes les dou-
leurs qui proviennent de froideur. Il
s’en fait un baume avec de l’extraict de
Mille-pertuis, & therebentine de Ve-
niſe; le tout mis dans une phiole de ver-
re double, bien bouchée, le quart de
vuide, expoſé quarante jours au So-
leil. Ce baume guerit toutes les ulceres;
guerit la gangrene. Pour l’appliquer il
le faut chauffer.Vous tirerez du Sel de voſtre Cloud,
comme celuy des autres Simples. Son
[ID00160]
uſage eſt bon pour les vieilles perſon-
nes, pris le poids de trois à quatre
grains deux fois la ſemaine, dans quel-
que vehicule, comme boüillon, vin,
ou ſyrop.
De la Canelle.
L’Essence de Canelle eſt ſouveraine
pour le cœur: elle le réjoüit, &
chaſſe la melancholie, priſe deux gout-
tes dans deux cuillerées d’eau de Me-
liſſe, une fois tous les mois. Elle facilite
les accouchemens, & provoque les pur-
gations des femmes, priſe en eau d’Hy-
ſope. Conforte le cerveau, rend l’halei-
ne douce & ſuaue en eau de Roſes; cuit
le phlegmegroſſier, & le fait jetter de-
hors: guerit les toües provenantes de
froidure: fait revenir de ſyncope, priſe
dans demy cuillerée de ſon eau.L’eau de Canelle a les meſmes vertus
que l’Eſſence. Comme elle eſt plus com-
mune, & qu’il ſe tire peu d’Eſſence,
elle ſuppléra au defaut.La teinture, le ſel, l’eau & l’eſſen-
ce reünis enſemble, avec un peu de the-
rebentine; le tout mis dans une phiole,
[ID00161]
& expoſé un mois au ſoleil, eſt un bau-
me qui conſolide toutes ſortes de
playes, appliqué ſur l’eſtomac le forti-
fie. D’une livre de Canelle, l’on ne peut
tirer que ſix gros d’eſſence tout au plus.
De la Muſcade.
LA Muſcade ne ſe diſtille point, ſes
eſprits ſont condenſez enſemble, &
n’ont point de facilité pour s’élever.
Ce que l’on appelle eſſence de Muſca-
de, eſt plutoſt une teinture qu’une eſ-
ſence. Elle s’extraict en cette ſorte.
Couppez par tranche voſtre Muſcade,
& la mettez dans une Cucurbite de
verre, & verſez de l’eſprit de vin deſſus:
puis mettez un Chapiteau aveugle, &
faites digerer au Bain à feu tiede, juſ-
ques à ce que voſtre eſprit ſoit coloré.
Alors verſez-le par inclination, & re-
mettez d’autre eſprit ſur les feces re-
ſtantes au fond du vaiſſeau. Reïterez
juſques à ce que voſtre eſprit ne tire
plus de teinture. Prenez toutes vos
teintures, & retirez voſtres eſprit par la
diſtillation du Bain; l’eſſence, ou plu-
toſt la teinture demeurera au fond.
[ID00162]
L’on fait extraction d’huile de Muſca-
de par l’expreſſion, comme l’on fait
celle des Noix; mais il s’en tire ſi peu,
que je ne conſeille à perſonne de faire
cette operation. Pour la teinture ſuſdi-
te, elle a quantité de vertus: une gout-
te priſe dans une cuillerée d’eau ſu-
crée, fortifie la veüe & l’eſtomac; priſe
avec eau de Saulge ou de Fenoüil, elle
chaſſe les vents; en eau de Capres elle
diſſipe l’enflure de la ratte; en eau de
Roſes, ou Meliſſe elle corrige les puan-
teurs de l’haleine; en eau d’Alchecha̅ge
elle fait uriner; appliquée par dehors
elle eſt ſinguliere aux douleurs des
nerfs & jointures; elle diſſipe les dure-
tez qui proviennent de froidures.
Du Poivre & Zinzembre.
LE Poivre eſt un fruict, & le Zin-
zembre une racine, deſquels il ne
ſe tire que fort peu d’huile par la diſti-
lation, non plus que par expreſſion;
mais bien par impregnation. Vous pil-
lerez voſtre Poivre groſſierement, &
coupperez voſtre Zinzembre, & met-
trez lequel il vous plaira infuſer dans
[ID00163]
de l’huile d’amandes douces, ou huile
d’olives, dans une phiole de verre au
ſoleil, ou au Bain, & l’y laiſſerez juſ-
ques à ce que voſtre huile ait attiré le
gouſt, & l’odeur de la choſe que vous
y aurez miſe. Si la premiere fois ne ſuf-
fit, vous en remettrez d’autre, & con-
tinuërez juſqu’à ce que vous ſoyez ſa-
tisfait. Vous prendrez voſtre Poivre, ou
Zinzembre imbibé d’huile, & le diſtil-
lerez par la Retorte; il en ſortira une
huile qui aſſeurément aura le gouſt de
la choſe ſur laquelle elle aura eſté miſe:
Vous expoſerez cette huile au ſoleil. Si
elle eſt tirée du Zinzembre, elle eſt
chaude à l’eſtomach, & le fortifie, &
ſa chaleur n’eſt point violente. Son
uſage eſt meilleur que celuy du Poivre.
Il faut uſer de l’un & de l’autre mode-
rément. Ils ne ſervent que de correctifs
pour les remedes internes; & par le
dehors, ils échauffent les membres re-
froidis, & font meurir les bubons &
apoſthemes.
|| [ID00164]
Therebentine.
TOvtes les Gommes & Raiſines ſe
diſtillent per Deſcenſum, comme il
eſt dit en ſon lieu. De quelques-unes
l’on en extraict la teinture en la manie-
re que j’ay dit en l’extraction des Tein-
tures. De toutes les Gommes raiſineu-
ſes, il n’y a que la ſeule Therebentine
qui ſe diſtille par la Cornuë en cette
maniere. Prenez de la Therebentine de
Veniſe; la plus blanche eſt la meilleure,
& la mettez dans une Cornuë; verſez
de l’eau par deſſus, qu’elle ſurnage de
deux doigts; que voſtre vaiſſeau, pour
le plus, ne ſoit remply qu’à moitié.
Adaptez une autre Cornuë, & luttez
bien les jointures: diſtillez à feu doux,
de peur que la matiere ne gonfle: con-
tinuez voſtre operation juſques à ce
que vous voyez monter une huile rou [ID00165] ge.
Alors changez de Recipient, &
augmentez voſtre feu, juſques à ce qu’il
ne monte plus rien dans voſtre premier
Recipient; vous aurez une eau, & une
eſſence que vous ſeparerez par un en-
to̅noir; l’eſſence demeurera deſſus. Tou-
tes les deux ont meſme faculté, mais
les doſes ſont differentes. L’eſſence ſe
prend juſques à vingt gouttes; & l’eau
d’une demy cuillerée à une cuillerée.
Elles laſchent l’urine ſupprimée, deſ-
chargent les reins; & elles ſont bonnes
pour les indiſpoſitions de poitrine. El-
les appaiſent la colique, aident à la di-
geſtion, priſes dans un vehicule conve-
nable, comme vin blanc, & eau d’Hy-
ſope.Pour l’huile rouge, qui eſt venuë la
derniere, c’eſt un baume pour les playes
nouvelles: il les conſolide, il fait aſſou-
plir & ralonger les nerfs racourcis, &
retirez par froideur. Il aide à la dige-
ſtion mis ſur l’eſtomac.
Fleurs de Benjoüin.
PRenez la quantité de Benjoüin
qu’il vous plaira, & le mettez dans
[ID00166]
un Creuſet qui ſoit de grandeur con-
venable: accommodez un cornet de
papier gris deſſus, de façon que le
Creuſet ſoit entouré par le haut dudit
cornet. Poſez voſtre Creuſet ſur un re-
chaut, & faites un feu doux. Et lors
que voſtre papier jaunira par bas, ceſſez
voſtre operation, & oſtez voſtre cor-
net, vous trouverez les fleurs ſubli-
mées au haut: abbattez-les avec une
plume.Ses fleurs ſont bonnes pour les touxs
inveterées: il en faut former tablettes
en cette ſorte. Prenez une demie livre
de ſucre, faites-la cuire en conſiſtence
de tablettes, & y mettez une once de
fleurs; puis jettez ſur le marbre, &
avec un couteau coupez vos tablettes
en forme de loſenge.
Autres Tablettes pour le poulmon.
FAites cuire du ſucre co̅me il a eſté
dit, & y adjouſtez les choſes ſuivan-
tes reduites en poudre ſubtile; fleurs de
Roſes de Provins demie once, muſcade,
Iris de Florence, & Regliſſe, de chacune
une drachme: demie drachme de fleurs
[ID00167]
de Benjoüin, & trois drachmes de fleurs
de Soufre. Vſez de toutes ces choſes, &
en prenez ſoir & matin.
De la Myrrhe & Encens.
L’On peut tirer de ces deux Gom-
mes une liqueur à laquelle on don-
ne le nom d’huile. Vous prendrez des
œufs frais, que vous ferez durcir, puis
les couperez par la moitié, & en oſte-
rez le jaune, & remplirez leurs places
de Myrrhe, ou d’Encens pillé, & ré-
joindrez les deux moitiez enſemble, &
mettrez vos œufs ainſi remplis dans un
vaiſſeau de verre, que vous mettrez
quarante jours dans du fumier de che-
val: à la fin de ſquels vous deffairez vo-
ſtre vaiſſeau, & oſterez tous les œufs,
& prendrez la liqueur qui ſera au fond,
que vous filtrerez. Cette liqueur a la
vertu de conſeruer de putrefaction, &
eſt ſouveraine pour les douleurs. L’on
en peut former paſtille qui rend une
odeur fort agreable.
|| [ID00168]
Huile de Gaïac.
COvpez le bois de Gaïac par pe-
tits morceaux, que vous mettrez
dans une Cornuë: verſez deſſus de
l’eau commune, qu’elle ſurnage de deux
doigts le bois; que la Cornuë pour le
plus ne ſoit remplie qu’à moitié: met-
tez en digeſtion au Bain par trois jours,
puis diſtillez à feu de roüe, & gardez
les degrez du feu; l’eau & l’huile diſtil-
leront enſemble: vous ſeparerez l’huile
d’avec l’eau par le vaiſſeau ſeparatoire.
Toutes les huiles des Bois, Eſcorces, &
Racines s’extrayent en cette maniere;
quand on les diſtille verds il n’eſt point
neceſſaire de leur donner de menſtruë.
Les vertus de cette huile ſont d’exciter
[ID00169]
les ſueurs, priſes par la bouche; & au
dehors il eſt ſouverain aux vieilles ul-
ceres eſtimées incurables.
Vertus de l’huile & eſcorce de
Freſne.
L’Hvile d’eſcorce de Freſne atte-
nuë, conſomme & ramolit les du-
retez de la ratte: elle eſt diuretique &
chaſſe le ſable des reins, priſe dans un
vehicule approprié au mal. La doſe eſt
de dix à douze gouttes.
Vertus de l’huile de Buis.
CEtte huile eſt narcotique, ou
aſſoupiſſante: pour cet effet l’on
s’en ſert aux douleurs violentes des
dents, en appliquant une goutte à la
racine de la dent malade avec un cure-
dent; ſoit qu’elle ſoit gaſtée par corro-
ſion, ou par des vers. Il y en a qui s’en
ſervent auſſi contre l’epilepſie.
|| [ID00170]
Fecules de Brione.
PRenez des racines de Brione, &
les coupez, puis les pillez dans un
mortier de marbre, & les exprimez
ſous la preſſe; il en ſortira une eau
eſpoiſſe & blanche, que vous mettrez
dans une terrine douze heures à la cave;
toute la blancheur deſcendra au fond
de la terrine. Verſez l’eau de deſſus par
inclination, & faites ſeicher la matiere
blanche à douce chaleur. Si vos Racines
font ſeiches quand vous les pillerez,
vous les imbiberez d’eau commune, &
ferez comme deſſus. Toutes les fecules
ſe preparent de cette ſorte. Les vertus
de celle cy ſont de purger les humeurs
ſereuſes & pituiteuſes; elle degage les
obſtructions du foye, & de la ratte; fait
vuider les eaux des hydropiques par
haut & par bas; provoque les mois,
[ID00171]
empeſche les ſuffocations de matrice,
ſoulage les aſthmatiques, & ſert à la
goutte, employée dedans & dehors. La
doſe eſt de dix grains juſqu’à vingt,
dans un boüillon, œuf, ou conſerve.
Fecule d’Aaron, & de ſes vertus.
ELle purge la pituite viſqueuſe &
gluante, & l’une & l’autre bile par
le vomiſſement, & quelquefois par bas,
mais avec quelque ſorte de violence.
Elle ouvre les obſtructions de la ratte,
du foye, & de la veſſie du fiel, & les
chaſſe par les urines. La doſe eſt de ſix
juſqu’à douze grainſ.
Fecule d’Iris, & de ſes vertus.
L’On ſe ſert principalement de l’Iris
de Florence, qui eſt chaude & ſeche
au ſecond degré, pour faire Fecule. Elle
inciſe & attenuë les humeurs; digere,
deterge & amolit; aide à dégager la
poitrine par les crachats; fait ſortir les
humeurs viſqueuſes & gluantes des
poulmons: c’eſt pourquoy l’on s’en ſert
[ID00172]
à l’aſthme, à la toux, aux mois arreſtez,
aux tranchées de ventre des enfans: elle
nettoye & oſte les taches & lentilles de
la peau, meſlée avec Elebore & miel:
il corrige la puanteur de l’haleine. La
doſe eſt de dix juſques à quinze grains.
|| [ID00173]
Avant-propos.
LES Animaux auſſi-bien
que les Simples contri-
buent à l’entretien de la vie
de l’homme, & à la conſer-
vation de ſa ſanté; & meſme aident à
la rétablir quand elle eſt affoiblie. L’ex-
perience nous le fait connoiſtre, puis
qu’ils nous fourniſſent des remedes
pour cet effect: S’ils nous cauſent des
infirmitez par noſtre mauvaiſe condui-
te, ils nous ſervent d’antidote pour les
détruire. Dieu par une prevoyance ad-
mirable a voulu que le remede fuſt
proche du mal. Si la Viue picque, &
fait une playe dangereuſe; ſon foye eſt
[ID00174]
un remede aſſeuré au mal qu’elle a fait
eſtant appliqué deſſus. Celuy qui eſt
offenſé de la Vipere, s’il en mange, il
eſt vengé & guery. Si le Scorpion, la
Fourmis, & la Mouche à miel ſont écra-
ſées ſur les picqueures qu’elles ont fai-
tes, elles gueriſſent auſſi-toſt. Les Ani-
maux fourniſſent non ſeulement des
remedes aux maux qu’ils ont cauſé,
mais auſſi à quantité de maladies auſ-
quelles ils n’ont en rien contribué.
N’eſt-il pas vray qu’vn Poulet couppé
tout vif par la moitié, & appliqué ſur
la teſte, fortifie le cerveau, & arreſte
les extravagances qui proviennent
d’une fiévre violente? Le ſang de Pi-
geon, picqué ſous l’aiſle, empeſche les
marques de la petite verolle, ſi l’on en
applique trois ou quatre fois le jour ſur
la verolle avec une plume, quand elle
commence à ſortir, & que l’on conti-
nuë juſques à ce que les petites peaux
tombent. Les petits Chiens vivans ap-
pliquez ſur l’eſtomac, aident à la dige-
ſtion, fortifient, & appa ſent la dou-
leur de la colique. L’Archange Raphaël
ſe ſervit du fiel d’un poiſſon pour réta [ID00175] blir
la veüe du vieil Tobie: & du foye
du meſme animal il chaſſa le demon
homicide, qui faiſoit mourir les maris
de Sara. Les Animaux nous fourniſſent
non ſeulement des remedes topiques,
mais auſſi des medicaments tres-neceſ-
ſaires, tant pour nourrir, fortifier, &
reſtaurer les forces abbatuës, que pour
purger les humeurs corrompuës. Il
ſemble, comme nous ſommes d’un
meſme genre, qu’ils ont plus de ſym-
pathie avec noſtre temperament. Ie
laiſſe ce jugement à faire aux experi-
mentez, & me contente d’eſcrire la
maniere de preparer les remedes qui
s’en tirent.
Du Sang humain.
PLvsievrs ont eſcrit la maniere
de diſtiller le Sang humain, & ont
fait cette operation fort laborieuſe: ce
qui a dégouſté beaucoup de perſonnes,
& les a empeſché de l’entreprendre.
[ID00176]
Voicy une methode tres-facile, laquel-
le eſt experimentée. Prenez le fang
d’un jeune homme, âgé depuis dix-
huit juſqu’à vingt-quatre ans, qui ſoit
bien temperé, le reint frais & vermeil,
ny trop gras, ny trop maigre. Laiſſez
refroidir le ſang, & repoſer douze
heures; puis vous oſterez toute l’eau
qui ſera deſſus, & ne prendrez que la
maſſe, que vous coupperez par petits
morceaux, & mettrez dans une Cucur-
bite de verre, & les diſtillerez au Bain
à feu doux juſqu’à ſiccité. Faites ſecher
à petit feu ce qui ſera au fond de voſtre
vaiſſeau, en ſorte qu’il devienne en
poudre, & conſervez cette poudre dans
une phiole de verre bien bouchéc, pour
vous en ſervir comme il ſera dit cy-
apres. Mettez de nouveau ſang comme
le premier dans voſtre Cucurbite; ver-
ſez l’eau que vous avez diſtillée deſſus,
& diſtillez comme au precedent: reïte-
rez cette operation cinq fois, & à cha-
que fois oſtez voſtre poudre; mettez
voſtre eau diſtillée circuler au Bain, ou
au fumier quinze jours; puis diſtillez
pour la derniere fois au Bain à feu
[ID00177]
doux, & ne tirez que les deux parts de
l’eau que vous aurez miſe circuler; la
partie reſtante n’eſt que phlegme, qui
n’eſt propre à rien. Cette eau ſe doit
appeller eſprit des Eſprits, à cauſe de ſa
grande ſubtilité, & du ſujet d’où elle
eſt extraicte. Ses vertus ſurpaſſent cel-
les que l’on attribuë à l’or potable. Elle
combat nos inſirmitez; elle rafraichit,
& modere les bilieux & coleres; elle
échauffe les froids, & ranime la cha-
leur naturelle; elle remet la comple-
xion ruinée à ſon temperament; elle
corrige le vice des parties qui ſervent à
la reſpiration: elle fortifie le cœur, de-
ſopile le foye & la ratte: elle diſſipe le
phlegme craſſe & époix; elle affermit
le cerveau, & purifie les organes d’ice-
luy, de telle ſorte que les facultez de
l’eſprit font librement & ſans peine
leurs fonctions: elle augmente le ſang,
& le purifie: bref, elle purge toutes
ſortes de mauvaiſes humeurs, & les pouſ-
ſe au dehors par les voyes naturelles. La
doſe eſt d’une cuillerée iuſques à deux,
dans quelque eau cordiale, ou appro-
priée au mal.
|| [ID00178]
La poudre que vous avézcy-devant
gardée a les meſmes vertus. Elle purge
par les ſelles, urines & ſueurs, priſe
dans un boüillon, ou dans un verre de
vin blanc, le poids d’une demie drach-
me juſques à une drachme.
Du magiſtere du Crane humain.
DIev par une providence admira-
ble a voulu que l’homme trouvaſt
dans ſon eſpece dequoy le guerir, & le
ſoulager dans ſes maladies. Nous avons
veu dans les vertus du Sang humain
preparé, combien il y contribuë; les
effects du Crane humain ne ſont pas
moins conſiderables. Prenez le Crane
d’une teſte ſeche, s’il ne l’eſt pas vous
le ferez ſecher au ſoleil, ou au feu, ou
en le portant longtemps ſur vous: ra-
pez-le, & le reduiſez en poudre, & le
mettez dans un vaſe de verre: Verſez
deſſus du ſuc de citron, ou du fort vi-
naigre diſtillé, qu’il ſurnage de trois ou
[ID00179]
quatre doigts; bouchez voſtre vaiſſeau,
& le mettez en digeſtion au Bain cinq
ou ſix heures; verſez par inclination
voſtre ſuc, ou vinaigre, & en mettez
d’autre, & faites digerer comme vous
avez fait: continuez juſques à ce que
tout voſtre Crane ſoit diſſout; prenez
toutes vos diſſolutions, & les filtrez
par le papier gris, & les mettez dans
une Cucurbite de verre: verſez deſſus
goutte à goutte de l’huile de Tartre, ti-
rée par défaillance; toute la diſſolution
ſe precipitera au fond: verſez par incli-
nation le ſuc, ou vinaigre: lavez &
dulcorez la poudre dans quelque eau
cordiale, comme de Roſes, Canelle,
Bugloſſe, Bourrache, Chardon benit,
ou Meliſſe: puis vous deſſecherez ladi-
te poudre dans un vaiſſeau de verre, &
la metrrez dans une phiole bien bou-
chée.Cette poudre eſt pour toutes les ma-
ladies du cerveau; particulierement
pour les epileptiques, & pour ceux qui
ont des vertiges. Elle ſe prend dans
quelque liqueur, comme eau de Sauge,
ou Marjolaine, ou dans la conſerve de
[ID00180]
Roſes, le poids d’un Scrupule. Si c’eſt
par precaution que l’on la prend, il faut
diminuer la doſe de moitié, & conti-
nuer neuf matins.
De l’hùile admirable des Os d’hommes.
PRenez les Os d’un homme, les plus
gros que vous pourrez avoir; caſſez-
les, & les faites rougir dans le feu: &
quand ils ſeront rouges, vous les met-
trez dans un pot de terre verniſſé, dans
lequel vous aurez mis une ſuffiſante
quantité de ſain, ou graiſſe d’homme:
couvrez le pot, & les laiſſez imbiber,
puis les oſtez de dedans, & les pillez
& mettez dans une Cornuë, avec la
graiſſe qui ſera reſtée dans le pot: diſtil-
lez au feu de ſable, & continuez vo-
ſtre diſtillation juſques à ce qu’il ne
monte plus rien, expoſez cette liqueur
au ſoleil. C’eſt un ſpecifique pour toutes
douleurs de nerfs & de jointures, &
pour les ſciatiques.
|| [ID00181]
De l’eau de Chapon.
SI vous voulez diſtiller vn Chapon,
ou Poulet, vous l’écorcherez tout
vif, & luy oſterez les pieds, la teſte, &
toutes les entrailles. Vous caſſerez ſes
os dans un mortier de pierre, avec un
pilon de bois, & le mettrez par pieces
dans une Cucurbite de verre, avec une
poignée d’orge mondé. Verſez deſſus
une pinte d’eau de Bugloſſe, ou Bour-
rache, diſtillez au Bain boüillant, aſin
que les eſprits du Chapon montent
avec l’eau; tirez une pinte de liqueur,
puis ceſſez voſtre operation.Cette eau eſt reſtaurative & pectora-
le. Elle renouvelle les forces des per-
ſonnes debilitées par maladie, en pre-
nant quatre ou cinq cuillerées, cinq ou
ſix fois le jour de cette façon. L’on peut
diſtiller toutes ſortes de chairs, & y
[ID00182]
augmenter & diminuer, ſelon qu’il
ſera neceſſaire.
Autre maniere de diſtiller les Chairs.
VOvs mettrez la chair que vous
voudrez diſtiller, ſoit Bœuf, Veau,
Mouton, ou Volailles, boüillir dans un
pot neuf verniſſé, & bien bouché: &
lors que tout ſera bien cuit, vous en
exprimerez le ſuc ſous la preſſe, que
vous ferez diſtiller au Bain, comme il
eſt dit cy-deſſus. Vous pourrez y ad-
jouſter des conſerves, & telles choſes
qu’il vous plaira.Apres les diſtillations de Chair, il de-
meure au fond une teinture, laquelle
coulée & cuite en conſiſtence d’ex-
traict, meſlée avec partie égale de the-
rebentine, & de cire, eſt un emplaſtre
pour les douleurs des nerfs, & gouttes
froides.
Reſtauratif de Chair excellent.
PRenez un vieil Coq, un jaret de
Veau, & un bout-ſeigneux de Mou-
ton; couppez le tout par morceaux, &
[ID00183]
les mettez dans un pot neuf, de gran-
deur ſuſſiſante: bouchez bien le pot
avec un couvercle, & le luttez avec des
blancs d’œufs, & de la chaux vive: met-
tez-le boüillir dans le Bain-Marie. Il ne
faut pas oublier de mettre le petit cer-
cle ſous le cul du pot, que le Bain ſoit
boüillant l’eſpace de deux heures; puis
exprimez ſous la preſſe ce qui ſera dans
le pot, & le laiſſez refroidir pour en
oſter la graiſſe, que vous leverez avec
une cuilliere. Il faut donner au malade
une cuillerée ou deux de ce Reſtauratif,
cinq ou ſix fois le jour. Il eſt fort nour-
riſſant.
De la Teinture ou extraict de foye de
Veau, & de ratte de Bœuf.
LEs Teintures ou extraicts de foye
de Veau, & de ratte de Bœuf, ſe
font en cette ſorte. Pillez le foye & la
ratte dans un mortier de marbre, puis
le mettez dans un vaiſſeau de verre:
[ID00184]
verſez de bon eſprit de vin deſſus, qu’il
ſurnage de trois ou quatre doigts; bou-
chez voſtre vaiſſeau, & le mettez infu-
ſer au Bain tiede, juſques à ce que vo-
ſtre eſprit ſoit teint. Verſez-le par incli-
nation, & remettez de nouvel eſprit,
& continuez juſques à ce qu’il ne vien-
ne plus de teinture. Prenez l’eſprit
teint, & le mettez dans la Cucurbite,
& le retirez par la diſtillation du Bain,
juſques à ce qu’il ne monte plus rien; la
teinture demeurera au fond, à laquelle
vous meſlerez du ſucre à diſcretion.
Vne cuillerée de teinture de foye de
Veau, juſques à deux, priſe matin &
ſoir, guerit la poulmonie; elle réjoüit
le cœur; elle chaſſe la melancholie; elle
deſopile le foye. L’on peut mettre cet-
te teinture en conſiſtence d’extraict,
pour en former pillules, qui auront le
meſme effect priſes le poids d’un Scru-
pule juſques à deux, dans la conſerve
de Roſes.La teinture ou extraict de ratte de
Bœuf deſopile la ratte, & en fait ſortir
toutes les impuretez. Elle empeſche
qu’elle ne gonfle; elle eſt utile contre
[ID00185]
toutes les maladies qui peuvent atta-
quer cette partie.
De l’huile d’Oeuf.
PRenez telle quantité d’Oeufs qu’il
vous plaira, & les faites durcir. Pre-
nez tous les jaunes, & les mettez dans
une Cornuë, & diſtillez à feu de roüe.
Cette huile eſt bonne contre l’apople-
xie, ſi ceux qui ſont menacez de ce mal
s’en frottent la cime de la teſte une fois
la ſemaine. Elle guerit les dartres, &
deſſeche les ulceres: elle guerit les brû-
lures, & particulierement celles de la
teſte, & leve les cicatrices qui en ſont
provenus. Elle fait revenir le poil ſi on
en frotte le lieu: elle oſte la maille des
yeux, y en mettant une goutre dedans
tous les jours; elle deſſeche la teigne,
il faut raſer les cheveux devant que de
l’appliquer; elle appaiſe la douleur de
la goutte qui prend aux pieds. Vne
goutte miſe dans l’oreille, diſſipe le
bruit d’icelle.
|| [ID00186]
De l’Eſprit, Huile & Teinture
de Miel.
MEslez une livre de ſable blen
net avec deux livres de miel eſcu-
mé, & les mettez dans une Cornuë, &
diſtillez au feu de ſable: il ſortira une
eau blanche la premiere; & lors qu’il
montera une liqueur rouge, changez
de Recipient: c’eſt l’eſprit du Miel,
qu’il ne faut pas meſler. Quand vous
verrez qu’il ne diſtillera plus rien,
augmentez voſtre feu, il ſortira une
huile époiſſe, qu’il ne faut pas meſler
non plus, avec l’eſprit. Rectifiez l’eſprit
au Bain, la teinture demeurera au fond,
& l’eſprit diſtillera comme de l’eau.Les vertus de l’eſprit de Miel ſont
tres-grandes: ſi elles eſtoient connuës,
ſon uſage ſeroit plus frequent qu’il n’eſt
pas. Il defend le corps de toute pourri-
ture, & conſerve la ſanté un tres-long-
temps. Pline eſcrit qu’un ſoldat âgé
[ID00187]
d’un grand nombre d’années, fort &
en bonne ſanté, fut interrogé par Octa-
ve Auguſte de ce qu’il faiſoit pour ſe
conſerver la ſanté, & vivre ſi long-
temps, il fit réponſe qu’il mettoit de
l’huile par dehors, & qu’il prenoit du
miel au dedans. Ce teſmoignage eſt
conſiderable, & ſans doute le Miel a
des qualitez excellentes; ſi l’on conſi-
dere de quelle maniere il eſt produit,
& de quelles choſes il eſt compoſé, on
auoüera, ſans doute, qu’eſtant preparé
il ne peut produire que de bons effects.
Cinq ou ſix gouttes d’eſprit pris dans
une cuillerée d’eau de Canelle, appaiſe
les douleurs de la colique. Il tuë les
vers, & les fait ſortir, & empeſche qu’il
ne s’en forme dans le corps, pris en eau
de Roſmarin: il guerit la paralyſie en
eau de Sauge; il faut continuer quaran-
te jours. La doſe eſt de dix gouttes juſ-
ques à quinze. L’huile & la teinture
ſont bonnes pour faire revenir les che-
veux, s’en frottant la teſte ſept ou huit
fois. La teinture meſlée avec de la fari-
ne d’orge en forme de cataplaſme,
reſout les duretez, & fait meurir
[ID00188]
les bubons & apoſthemes.
De l’huile de Cire.
PRenez de la Cire jaune, & de bon-
ne odeur, à diſcretion; faites-la
fondre, & meſlez avec une quatrieſme
partie de brique pillée, ou de ſable bien
net, & en faites de petites pelottes qui
puiſſent entrer dans la Cornuë, que
vous remplirez pour le plus qu’à moi-
tié. Donnez-vous de garde de faire
gonfler voſtre Cire: vous diſtillerez au
feu de cendres, & garderez les degrez
du feu. Lors qu’il ne ſortira plus de fu-
mée voſtre operation ſera faite. Sepa-
rez l’eau d’avec l’huile par le vaiſſeau
ſeparatoire, & remettez l’huile ſur les
feces, & cohobez deux fois, & vous
aurez une huile claire & nette. Ses ver-
tus ſont de reſoudre les duretez; elle
penetre & diſſipe les cicatrices, ſi l’on
continuë d’en mettre long-temps: elle
guerit les playes qui ſont faites par
[ID00189]
coups de feu; elle appaiſe les douleurs
de la goutte, & guerit les ulceres; ra-
longe les nerfs, & conſolide les fiſſures
des mammelles, & des lévres.
De l’huile de Beure.
PRenez du Beure frais qui ſoit nou-
vellement fait, vous en ferez de pe-
tites pelottes comme vous avez fait de
la cire, avec des cendres, ou du ſable,
& les mettez dans la Cornüe, & diſtil-
lerez à feu de cendres. Separez l’eau
d’avec l’huile, & cohobez comme cy-
deſſus.Cette huile eſt excellente pour tou-
tes ſortes de toux, & rheumes. La doſe
eſt de cinq ou ſix gouttes dans de l’eau
ſucrée, ou d’Hyſope, büe ſoir & matin.
Elle appaiſe les douleurs de coſté, ſi
l’on en fait cataplaſme avec de la farine
de Cumin. Il en faut mettre trois fois
le jour.
|| [ID00190]
De l’huile de Cheveux.
PRenez des Cheveux, & en faites
des petites pelottes, & les mettez
dans une Cornüe, que vous emplirez
pour le plus des trois parts, & adapte-
rez un Recipient à la Cornüe, que
vous lutterez: puis diſtillez au feu de
roüe juſques à ce qu’il ne ſorte plus de
fumée.Cette huile a l’odeur fort penetran-
te. Elle eſt bonne contre les ſuffoca-
tions de la matrice: il en faut frotter les
tempes, & les narines. Elle fait auſſi
venir les cheveux, ſi l’on en met huit
ou dix jours de ſuite ſur le lieu où l’on
les veut faire venir. Devant que de l’ap-
pliquer, il faut bien frotter la teſte avec
un linge un peu chaud.
|| [ID00191]
De l’eſprit de Laict.
FAites boüillir du laict un boüillon;
verſez dedans une cuillerée de vi-
naigre, puis filtrez ledit laict, & le met-
tez dans une Cucurbite de verre, &
diſtillez au Bain boüillant, & conti-
nuez juſques à ce qu’il ne monte rien.
Oſtez les feces qui ſont dans la Cucur-
bite, & rectifiez voſtre eſprit. Dimi-
nuez voſtre feu d’un degré, & de quatre
pintes que vous aurez vous n’en retirez
que trois pintes & choppine: oſtez les
feces, & rectifiez encore une fois, &
diſtillez à feu tiede, & ne diſtillez que
trois pintes. L’uſage de cet eſprit eſt
plus ſain & plus rafraichiſſant que le
petit-laict commun; ſa froideur eſt
corrigée par le feu, & les mauvaiſes
qualitez ſeparées. Il n’eſt point nuiſible
à l’eſtomac: l’on y peut adjouſter du
ſucre roſat, ou violat, ſelon le ſujet
[ID00192]
pour lequel on le prendra. L’on peut
diſtiller toutes ſortes de laicts de cette
maniere. Le laict d’aſneſſe preparé de
cette ſorte, eſt facile à digerer, & n’eſt
point nuiſible à l’eſtomac.
|| [ID00193]
Avant-propos.
BIen que les Metaux, &
Mineraux ſemblent eſtre
eſloignez de l’homme, &
que l’Eſcriture Sainte ne
faſſe aucune mention de leur creation,
neantmoins ils ne laiſſent pas de nous
fournir des remedes tres-ſalutaires. Au-
jourd’huy la Medecine s’en ſert avec
d’heureux ſuccés. Il eſt neceſſaire que
leurs preparations ſoient exactement
faites, dautant que ce ſont remedes
violens; bien que l’on ne les prenne
qu’en petite quantité, & dans des ma-
ladies rebelles, & inveterées. Quand
j’ay commencé ce Livre, je me ſuis
[ID00194]
propoſée de ne point paſſer mes expe-
riences. C’eſt pourquoy je ſupprime
en cette Partie les operations ſur l’or,
& ſur l’argent, ne connoiſſant point
leurs preparations, ny leurs utilitez en
la Medecine. I’ay veu pluſieurs opera-
tions auſquelles on a donné le nom
d’Or potable, de teinture d’or, d’hui-
le d’argent, que je n’ay pû compren-
dre; ne me pouvant perſuader que des
corps ſi parfaits & condenſez, fuſſent
liquefiables. Ce n’eſt pas que je con-
damne ces operations pour ne les pou-
voir pas concevoir; je ſerois auſſi teme-
raire que les aveugles, qui aſſeure-
roient qu’il ne ſeroit point de Solcil,
parce qu’ils ne le verroient pas. Pour
les operations qui ſuivent, j’aſſeure
qu’elles ſont veritables, & experimen-
tées.
|| [ID00195]
Du Vitriol.
PRenez cinq ou ſix livres de Vi-
triol Romain, autrement dit Cou-
peroſe, & les mettez dans un pot de
terre qui ne ſoit point verniſſé, & le
poſez ſur le feu, & l’entourez de char-
bon, & le laiſſez juſqu’à ce que le Vi-
triol devienne rouge: vous le remuerez
de temps en temps avec une Eſpatule
de fer. Le Vitriol calciné juſqu’à rou-
geur eſt appellé par les Chymiques Col-
cotar: prenez-le, & le pillez, & le
mettez dans une Cornuë de terre de
Beauvais: cette terre reſiſte au feu.
Qu’elle ne foit remplie pour le plus que
de deux tiers; adaptez un grand Reci-
pient appellé Balon, & les luttez avec
blanc d’œufs, chaux vive, & blanc
d’Eſpagne: poſez voſtre Cornuë ſur le
fourneau, ou au coin d’une cheminée,
[ID00196]
& la faites porter ſur un tuillot, ou maſ-
ſe de terre, pour l’élever à proportion
de voſtre Recipient. Faites feu par de-
grez, & l’entretenez douze heures au
feu du premier degré: & lors que vous
verrez entrer des nuages dans voſtre
Recipient, augmentez voſtre feu d’un
degré, & le continuez pendant autres
douze heures; apres leſquelles vous
augmenterez, & couvrirez voſtre vaiſ-
ſeau de feu, & continuerez juſqu’à ce
que vous ne voyez plus aucune fumée
entrer dans voſtre Recipient. Alors
laiſſez refroidir vos vaiſſeaux un jour
entier, moüillez le lut des vaiſſeaux
pour les deffaire, & prenez l’eſprit di-
ſtillé, & le rectifiez dans une Cornuë
de verre au feu de ſable. La premiere
liqueur qui viendra n’eſt que phlegme:
lors qu’il montera de l’aigreur changez
de Recipient, & angmentez le feu, &
continuez juſqu’à ce qu’il ne diſtille
plus rien. Laiſſez refroidir vos vaiſ-
ſeaux, & prenez l’eſprit, & le mettez
dans une phiole pour vous en ſervir à
ſes uſages. Vous trouverez au fond de
voſtre Cornuë une huile noire qui a
[ID00197]
ſes facultez, comme il ſera dit cy-apres.
Les feces reſtées de voſtre premiere di-
ſtillation, ſeront bruſlées pour en tirer
le ſel, avec le phlegme que vous avez
cy-devant diſtillé, ou avec de l’eau com-
mune un peu chaude. Ce ſel s’extraict
comme celuy des Vegetaux.Les vertus de l’eſprit de Vitriol ſont
grandes. Il eſt à remarquer qu’il ne ſe
prend jamais ſeul, & que ſa doſe n’ex-
cede point trois à quatre gouttes, priſes
dans quelque vehicule convenable au
mal. Il tempere les ardeurs des fiévres
malignes & violentes, & conſomme la
pourriture des humeurs dont elles ſont
cauſées. Il purifie le ſang, & penetre
juſques dans les veines: Il eſt diureti-
que; il tuë les vers; appliqué avec un
plumaſſeau il leve les chancres, &
guerit les ulceres de la bouche. Il faut
prendre garde qu’il ne touche autre
partie que le mal, dautant qu’il corro-
de la chair: il blanchit les dents ſi on les
en frotte avec un petit drapeau: il aide
à extraire les teintures de toutes ſortes
de fleurs.L’huile de Vitriol, reſtée cy-devant
[ID00198]
au fond de la Cornuë, entre en la com-
poſition des emplaſtres pour les ulce-
res, chancres putrides & inveterez. Il
eſt cauſtique, & leve les chairs mortes.
L’on s’en ſert pour faire les cauteres
potentiels.Le ſel eſt vomitif; ſon effect eſt vio-
lent: on ne s’en doit ſervir que dans
l’extremité. Il y a d’autres vomitifs qui
operent avec plus de douceur. La doſe
eſt depuis dix juſqu’à vingt grains, ſe-
lon les forces du malade.
De l’eſprit de Nitre.
PRenez du Nitre, ou Salpetre de-
puré & blanc, deux livres, & les
mettez dans une Cornu???, & diſtillez au
feu par degrez, comme vous avez fait
cy-devant. De chaque livre vous tire-
rez douze onces d’eſprit; ſerrez-le dans
une phiole de verre double, que les
[ID00199]
deux tiers ſoient vuides, & la bouchez
d’un bouchon de verre. Cet eſprit eſt
difficile à garder.Les vertus de cet eſprit ſont d’inciſer,
diſcuter, & reſoudre les vapeurs, &
humeurs malignes crües & tartarées,
qui ſe trouvent dans le corps; il dégage
les obſtructions des viſceres, & dimi-
nuë la chaleur contre nature; excite les
ſueurs. Son uſage principal eſt dans la
colique, & les fiévres chaudes & mali-
gnes. La doſe eſt d’un demy ſcrupule
juſqu’à un ſcrupule, dans quelque eau
convenable.
Criſtal mineral.
LE Criſtal mineral eſt fort utile à la
medecine, & la maniere de le faire
fort facile. Prenez un Creuſet d’Alle-
magne, mettez dedans une livre de Sal-
petre, & le mettez fondre deſſus les
charbons ſous la cheminée, à chaleur
mediocre. Lors que la fuſion ſera faite,
jettez dedans, en trois ou quatre di-
verſes fois deux onces de fleurs de
Soufre, ou à leur defaut du Soufre pilé
bien menu. Laiſſez boüillir un quart
[ID00200]
d’heure, & oſtez avec une Eſpatule l’é-
cume, ou craſſe qui ſera deſſus. Il faut
avoir un poëlon, ou baſſine bien nette,
& bien chaude, toute preſte, dans la-
quelle vous verſerez ce qui ſera dans
voſtre Creuſet, & pancherez de coſté
& d’autre voſtre baſſine, pour étendre
voſtre Criſtal, & le rendre tranſpa-
rant. Lors qu’il ſera froid, rompez-le
par morceaux, & le ſerrez dans une
boëte.Ses vertus ſont de laſcher le ventre
doucement. Il eſt diuretique; il rafrai-
chit; il ſert aux inflammations internes;
il eſt propre aux fluxions chaudes. On
Ie fait diſſoudre dans les ptiſannes pur-
gatives, & rafraichiſſantes. La doſe eſt
d’une drachme juſqu’à deux. L’on le
peut prendre en poudre, incorporé
avec de la conſerve de Roſe.
|| [ID00201]
De l’eſprit de Sel marin.
CEt eſprit ſe tire de deux manieres;
l’une par diſtillation, l’autre par
diſſolution, & defaillance. Pour tou-
tes les deux il faut decrepiter le ſel,
comme il a eſté dit au Chapitre des
Operations. Prenez voſtre ſel decrepi-
té, & le pilez bien menu: ſi vous le
voulez diſtiller meſlez deux livres de ſel
avec une livre de poudre de brique, ou
des fragmens du pot dans lequel vous
l’aurez decrepité: mettez le tout dans
une Cornuë, & y adaptez un Reci-
pient, dans lequel vous mettrez une
livre d’eau. Luttez & diſtillez comme
vous avez fait l’eſprit de Vitriol. Voſtre
operation eſtant faite, deluttez vos
vaiſſeaux, & mettez ce qui ſera dans le
Recipient dans une Cucurbite de verre,
& retirez l’eau que vous avez miſe cy [ID00202] devant
par la diſtillation du Bain: &
lors qu’il n’en montera plus rien, ceſſez,
l’eſprit demeurera au fond de la Cucur-
bite, que vous mettrez dans une phio-
le de verre. Si vous voulez avoir de
l’eſprit de ſel par reſolution, vous met-
trez voſtre ſel decrepité dans un ſachet
de toile, que vous ſuſpendrez dans la
cave, & mettrez deſſous un vaiſſeau
pour recevoir la liqueur qui tombera
par defaillance, que vous rectifierez
dans la Cornuë au feu de ſable, & le
dephlegmerez.Les facultez de cet eſprit ſont incom-
parables; il ſurpaſſe en vertu tous les
eſprits que l’on peut extraire du Mine-
ral. Il diſſipe toutes les impuretez qui
ſont dans le corps; il preſerve de cor-
ruption; il fortifie l’eſtomac, & purifie
le ſang: il eſt fort utile aux vieilles per-
ſonnes; il renouvelle la chaleur natu-
relle. Il le faut prendre dans quelque
eau cordiale. Sa doſe eſt de trois à qua-
tre gouttes: appliqué ſur les ulceres, il
les guerit; il blanchit les dents, & fortifie
les gencives. Pluſieurs Philoſophes aſ-
ſeurent que ſon uſage eſt capable de re-
generer l’homme.
|| [ID00203]
De l’eſprit de Soufre.
PRenez une Campane de verre,
deſquelles on ſe ſert pour couvrir
les Melons; ſuſpendez là par ſon bou-
ton ſous une cheminée: mettez deſſous
une petite terrine, dans laquelle vous
mettrez des os de Bœuf ſpongieux
bruſlez & emondez de leur couverture;
ils s’appellent Meche perpetuelle: ran-
gez deſſus une livre de Soufre en Ca-
non, auquel vous mettrez le feu avec
un fer rouge, ou une chandelle allu-
mée. Panchez la Campane d’un coſté
pour donner cours à la liqueur qui ſe
formera dedans, afin qu’elle tombe fa-
cilement dans un vaſe que vous met-
trez deſſous. Cette operation ſefait ſans
que l’Artiſte ſoit obligé d’y eſtre: il faut
laiſſer bruſler tout le Soufre auant
que d’en remettre d’autre. Le temps
[ID00204]
humide eſt le plus propre à cette opera-
tion. D’une livre de Soufre, quand le
temps eſt favorable, l’on peut tirer deux
onces d’eſprit.Cet eſprit a un nombre infini de fa-
cultez: Pris en eau de Cerfueil purifie
le ſang. Il fait ſuer en eau de Chardon-
benit: il mondifie le poulmon en eau
d’Hyſope; il guerit la fiévre quotidie̅ne
en eau de Roſmarin; la fiévre tierce en
eau de Centaurée; la fiévre quarte en
eau de Bugloſſe. Il appaiſe la colique en
eau de Camomille; il deſopile la ratte
en eau de Capres; il fait vuider les
eaux des hydropiques, & les urines
ſupprimées en eau de Perſil, ou de Ra-
ve; incorporé avec Mithridat il diſſipe
la peſte. Sa doſe eſt de cinq gouttes juſ-
ques à ſix. Il eſt propre aux ulceres de
la bouche; il blanchit les dents; il ſert
à extraire les teintures des Roſes &
Violettes, comme l’eſprit de Vitriol.
Fleurs de Soufre.
PRenez une livre de Soufre, & le
rompez par morceaux, & le mettez
dans un pot de terre, que vous poſerez
[ID00205]
couché ſur le coſté, ſur un fourneau, de
ſorte qu’il puiſſe entrer dans l’embou-
cheure d’un pot à beure; auquel vous
ferez un petit trou au cul. Luttez vos
deux pots enſemble avec des blancs
d’œufs, & du blanc d’Eſpagne: faites
feu ſous voſtre pot du premier degré,
& continuez juſques à ce qu’il ne ſorte
plus de fumée par le petit trou que vous
avez fait au pot de beure: laiſſez re-
froidir, & deluttez, vous trouverez vos
fleurs ſublimées au haut du pot, que
vous abattrez avec une plume, & les
ſerrerez dans un vaſe de verre.Ces fleurs ſont amies du poulmon,
& le garantiſſent de toutes les maladies
qui proviennent de froid, & d’humidi-
té. Elles ſont bonnes contre la courte-
haleine. La doſe eſt d’un demy Scrupule
juſqu’à un Scrupule, avec ſucre cuit.
L’on en peut faire tablettes, qui auront
le meſme effect.
Syrop de fleurs de Soufre.
PRenez demy ſeptier d’eau de vie
rectifiée une fois, du ſucre en pou-
dre une demie livre, de fleurs de Sou [ID00206] fre
une once: mettez le tout dans une
terrine, & y mettez le feu avec une al-
lumette, & remuez l’eau, le ſucre &
les fleurs avec une cuillere d’argent,
que vous ferez tenir au bout d’un bâ-
ton de peur de vous bruſler, juſqu’à
ce que l’eau de vie ne flambe plus. Fil-
trez ce ſyrop, & le mettez dans une
phiole. Il en faut prendre ſoir & matin
une cuillerée: il eſt excellent pour le
poulmon, pour les maux de gorge, &
toux inveterée. Son uſage n’eſt point
nuiſible à quelque maladie que ce
ſoit.
De l’huile des Philoſophes.
LEs Philoſophes s’attribuent, com-
me unavantage, la compoſition de
cette huile. Elle ſe fait en cette ſorte.
Prenez des tuilles, ou briques fraiche-
ment faites, comme elles ſortent du
fourneau; reduiſez-les en petits mor-
ceaux, gros comme des poix, & les
[ID00207]
faites rougir dans un Creuſet: & lors
qu’ils ſeront embraſez, jettez-les dans
vun pot à demy plein d’huile d’olive
vierge, lequel vous couvrirez auſſi-toſt:
Vous continuerez de faire comme deſ-
ſus, juſques à ce que vous en ayez ſuffi-
ſante quantité, & que l’huile les ſurna-
ge. Laiſſez le tout imbiber huit jours,
puis broyez & mettez dans une Cor-
nuë, & diſtillez à feu de degrez, juſqu’à
ce qu’il ne ſorte plus de fumée. Si voſtre
huile n’eſt aſſez claire, vous la rectifie-
rez dans la Cornuë au feu de ſable.L’on attribuë à cette huile quarante-
quatre vertus fort conſiderables; &
par veneration elle eſt appellée des
Philoſophes Huile benite. Elle confor-
te les nerfs, arreſte le tremblement de
teſte, & des mains; appaiſe la douleur
des gouttes, & des jointures. Elle eſt
ſouveraine aux affections des orcilles,
provenantes de cauſe froide, comme
ſurdité, oreilles coulantes, & bruit
d’icelles. Elle guerit les playes, crevaſ-
ſes, & fiſſures. Elle échauſſe les mem-
bres refroidis par accident; elle appaiſe
les douleurs de la matrice, & de la
[ID00208]
goutte ſciatique; elle échauffe & con-
forte la teſte, & le cerveau froid; elle
eſt ſouveraine contre la morſure des
beſtes veneneuſes; elle fortifie l’eſto-
mac; elle arreſte les larmes des yeux
pleurans, & oſte la rougeur d’iceux, ſi
l’on en applique ſur toutes leſdites par-
ties: Si l’on en prend cinq ou ſix gout-
tes par la bouche dans de l’eau d’Hyſo-
pe, elle fait revenir les mois retardez.
Enfin il ſemble que cette huile ſoit
univerſelle contre toutes ſortes de ma-
ladies.
De l’Eſſence de Carabé, ou d’Ambre.
I’Ay eſté en peine en quel regne je
devois mettre cette operation, quoy
que l’Ambre ſoit aſſez connu, dautant
que les Auteurs en parlent diverſement.
Les uns le mettent au rang des Gom-
mes, les autres au nombre des Mine-
raux, dautant qu’il ſe trouve meſlé avec
l’or. Pour moy je ſuis de l’opinion de
[ID00209]
ceux qui le tiennent pour un Bitume,
à cauſe de l’odeur forte qu’il rend
quand on le bruſle. C’eſt ce qui m’o-
blige de le mettre au rang des Mine-
raux. Prenez de l’Ambre blanc, ou jau-
ne, & le mettez dans une Cornuë, rem-
plie pour le plus à moitié: diſtillez à
feu de ſable; & lors qu’il ne ſortira plus
de fumée de la Cornuë, ceſſez voſtre
operation. S’il ſe trouve quelque cau
avec l’eſſence, vous la ſeparerez par le
vaiſſeau ſeparatoire.Cette huile, ou eſſence, eſt fort utile.
Elle guerit l’apoplexie, trois gouttes
priſes dans une cuillerée de vin, ou
d’eau ſucrée. Elle provoque l’urine, &
fait vuider le ſable en eau de Perſil, ou
de Fenoüil. Elle eſt bonne pour le mal
caduc, & pour les ſuffocations de ma-
trice, & convulſions, en eau de Sauge:
appliquée au dehors, elle guerit les pa-
ralytiques, les playes & ulceres, & fait
ſortir les eſquilles. Elle conforte l’eſto-
mac, & arreſte le dévoyement, ſi l’on
enfrotte leſdites parties.
|| [ID00210]
De la Teinture de Corail.
PRenez du Corail du plus rouge,
& le reduiſez en petites parties, &
les mettez en un Matras: verſez deſſus
du jus de Citron filtré, qu’il ſurnage
de quatre doigts: bouchez voſtre vaiſ-
ſeau, & le mettez en digeſtion au Bain,
& l’y laiſſez juſques à ce que vous voyez
voſtre liqueur devenir rouge. Alors
vous la ſeparerez par inclination, &
remettrez d’autre ſuc de Citron deſſus
voſtre Corail reſté, & mettrez en di-
geſtion comme vous avez fait, & con-
tinuerez juſqu’à ce que voſtre ſuc ne
tire plus de teinture. Prenez tout es les
teintures; ſur chaque livre d’icelle
vous mettrez deux livres de ſucre, &
ferez cuire juſques à conſiſtence de
ſyrop.Cette teinture eſt excellente pour
[ID00211]
arreſter toutes ſortes d’hemorrhogie,
tant par haut que par bas. Elle fortifie
l’eſtomac, purifie le ſang, arreſte la dy-
ſenterie, & le vomiſſement. Elle em-
peſche la profuſion des mois. Elle eſt
ſalutaire, & ne peut faire que bien à
quelque maladie que ce ſoit. Elle exci-
te doucement le dormir. Elle doit eſtre
gardée curieuſement dans une phiole
bien bouchée. La doſe eſt d’une demie
once juſqu’à une once. L’on y peut
donner un vehicule convenable au mal
pour lequel on la prend.
Magiſtere de Corail.
REdvisez du Corail en poudre
ſubtile, & le mettez dans une
phiole de verre, verſez deſſus du vi-
naigre diſtillé, qui ſurnage la poudre
de trois doigts: mettez en digeſtion au
Bain cinq ou ſix heures à petite cha-
leur. La digeſtion eſtant faite, verſez
par inclination voſtre vinaigre, & en
remettez d’autre, & faites digerer, &
continuez cette operation juſques à ce
que le Corail ſoit tout diſſout. Prenez
toutes ces diſſolutions, & les filtrez, &
[ID00212]
en reſervez une part pour vous en ſer-
vir comme il ſera dit cy-apres: dans
l’autre vous verſerez goutte à goutte
ſuffiſante quantité d’huile de Tartre
faite par defaillance, le Corail ſe pre-
cipitera au fond, à maniere de chaux
blanche. Laiſſez repoſer le tout demie
heure, puis verſez par inclination le
vinaigre, & l’huile de Tartre qui ſera
deſſus, lavez & dulcorez cette chaux
avec quelque eau cordiale, & la faites
ſecher doucement. De cette meſme ma-
niere ſe fait le magiſtere des Perles.Les vertus de ce magiſtere ſont de
conforter, & provoquer les ſueurs; &
il a les meſmes facultez que la teinture.
La doſe eſt depuis dix grains juſques à
vingt, dans quelque liqueur, ou dans
de la conſerve de Roſe.
Sel de Corail.
FAites evaporer la liqueur que vous
avez cy-devant gardée juſques à ſic-
cité, & le ſel ſe trouvera au fond; le-
quel vous ferez diſſoudre & deſſecher
pluſieurs fois dans quelque eau cordia-
le, pour oſter l’acrimonie du vinaigre.
|| [ID00213]
Ce ſel a les meſmes facultez que la
teinture & magiſtere. La doſe eſt de
quinze à vingt grains dans un boüillon,
ou autre vehicule.
Du Crocus d’Antimoine.
LEs Philoſophes ont tourné l’Anti-
moine en tant de façons, que l’on
pourrroit eſcrire pluſieurs volumes de
leurs operations: je me retrancheray à
trois ou quatre, dont les effects ſont
aſſeurez, & experimentez. Prenez de
l’Antimoine, & du Salpetre, partie
égale; pulveriſez-les chacun à part, puis
les meſlez enſemble, & en mettez une
cuillerée dans un mortier de fonte ſur
les charbons ardans. Vous y mettrez le
feu avec un charbon, puis vous cou-
vrirez le mortier avec la pelle du feu:
Et lors que l’ebulition ſera paſſée, re-
muez avec une verge de fer, & remet [ID00214] tez
une autre cuillerée, & recouvrez
comme deſſus, & continuez juſqu’à ce
que vous ayez mis toutes vos poudres.
Et lors que la matiere ſera rougeaſtre
vous oſterez le mortier de deſſus le feu,
& la laverez & dulcorerez cinq ou ſix
fois avec de l’eau commune: à la der-
niere fois vous y mettrez deux cuille-
rées d’eau de Canelle. Vous filtrerez
par le papier gris, & ferez ſecher la
poudre dans un vaiſſeau de verre à cha-
leur douce.Cette poudre eſt appellée Saffran à
cauſe de ſa couleur. Elle a la vertu de
faire vomir doucement: elle guerit les
fiévres longues, & rebelles; elle purge
par les urines, & ſueurs; quelquefois
par les ſelles. La doſe eſt de huit à
quinze grains, infuſez du ſoir au matin
dans un verre de vin blanc. Il faut
prendre ſeulement le vin, & laiſſer la
poudre. C’eſt ce qui s’appelle Vin Eme-
tique. Il ſe fait une poudre Emetique
avec l’Antimoine, le Mercure ſublimé,
& le Vitriol; laquelle eſt plus violente
que celle-cy.
|| [ID00215]
Antimoine Diaphoretique.
PRenez Antimoine & Salpetre,
partie égale; reduiſez-les en pou-
dre, & les mettez dans un Creuſet,
que vous couvrirez d’un autre Creuſet
percé par le cul. Luttez-les enſemble, &
quand le lut ſera ſec mettez-les au mi-
lieu des charbons ardans; il ſe fera un
combat qui fera bruit comme à l’opera-
tion precedente. Au bout de trois heu-
res tirez vos Creuſets, & prenez voſtre
matiere, & la reduiſez en poudre, & la
meſlez avec autant de Salpetre comme
vous y en avez mis au precedent; met-
tez le tout dans les Creuſets luttez, &
mettez au feu ardant dix-huit ou vingt
heures, & juſques à ce que la matiere
ſoit tres-blanche. Alors vous la pilerez,
laverez, filtrerez trois ou quatre fois,
pour oſter l’acrimonie du Salpetre. Il
faut que la derniere eau dans laquelle
vous la laverez ſoit quelque eau cor-
diale, comme Roſe, Canelle, Anis, ou
Fenoüil.Cette poudre eſt ſudorifique; elle
purge par les urines, & par les ſueurs.
[ID00216]
La doſe eſt de dix à quinze grains
dans de la conſerve de Roſe, ou moële
de pommes cuites.
Huile, ou Syrop d’Antimoine.
PRenez de l’Antimoine pulveriſé
à diſcretion; mettez-le dans un
Creuſet ſur le feu, & l’y laiſſez cinq ou
ſix heures, & le remuez touſiours avec
une verge de fer, juſqu’à ce que l’Anti-
moine ait acquis une couleur griſaſtre.
Oſtez le Creuſet, & le laiſſez refroidir:
prenez la maſſe que vous reduirez en
poudre, & meſlerez avec partie égale
de ſucre fin. Mettez le tout dans une
Cornuë, & diſtillez au feu de roue juſ-
qu’à ce qu’il ne monte plus rien. Cet-
te huile purge doucement par les ſel-
les, & ſans violence: douze gouttes
juſques à vingt miſes dans l’infuſion
d’un gros de Senné, guerit les fiévres
quartes & tierces. Il en faut prendre
trois fois quand les fiévres ſont rebel-
les, & laiſſer un jour ou deux d’inter-
valle, ſelon la force du malade, & l’ef-
fect qu’aura fait le remede precedent.
|| [ID00217]
Teinture d’Antimoine.
PIllez de l’Antimoine en poudre
impalpable, & la mettez dans un
grand vaiſſeau de terre, qui ne ſoit
point verniſſé, & qui puiſſe ſouffrir le
feu: mettez-le ſur un fourneau, ou re-
chaut, & faites un feu moderé. Re-
muez ſans ceſſe la poudre avec une ver-
gette de fer, juſqu’à ce que le ſoufre
d’Antimoine ſoit entierement conſom-
mé: ce que vous connoiſtrez lors qu’il
ne rendra plus de fumée, & de flamme
bleüe. Il faut pour faire cette operation
pour le moins deux fois vingt-quatre
heures, & ſe donner de garde de la
fumée, parce qu’elle eſt fort nuiſible.
Lors que la poudre ſera deſſechée de la
ſorte, mettez-là dans un Matras, &
verſez de l’eſprit de vin deſſus, qu’il
ſurnage de quatre doigts; bouchez bien
le vaiſſeau, & le mettez en digeſtion au
Bain-Marie, juſques à ce qu’il devien-
ne rouge: Verſez l’eſprit teint par in-
clination, & en remettez d’autre, &
faites digerer comme au precedent, &
continuez juſqu’à ce que l’eſprit ne ſe
[ID00218]
colore plus. Prenez toutes les teintures,
& les mettez dans une Cucurbite, &
retirez voſtre eſprit par la diſtillation
du Bain, & la teinture demeurera au
fond; ſur laquelle vous mettrez de l’eau
de Canelle, que vous meſlerez avec
ladite teinture: puis retirez ladite eau
par la diſtillation du Bain, juſqu’à ce
que ladite teinture demeure en conſi-
ſtence de miel. Vous la mettrez dans
une phiole bien bouchée: elle merite
d’eſtre conſervée.Cette teinture eſt un remede univer-
ſel. Elle eſt pour toutes ſortes de mala-
dies. Elle purifie le ſang, renouvelle les
forces, reſtaure la nature, entretient
l’humidité radicale, conſerve la ſanté,
guerit toutes ſortes de fiévres, appaiſe
les douleurs de la goutte, & purge
doucement par les ſelles, ſueurs, &
urines. La doſe eſt depuis ſix gouttes
juſqu’à douze, dans un vehicule appro-
prié au mal. Il eſt bon d’en prendre par
precaution deux fois l’année, au Prin-
temps, & à l’Automne.
|| [ID00219]
Du Crocus de Mars.
IL eſt un nombre infini de manieres
d’extraire le ſel, ou ſaffran de Mars,
dont la pluſpart ſont longues & peni-
bles. En voicy une fort facile. Prenez
de la limaille d’acier bien nette, & la
mettez dans un grand plat de fayance:
ſi vous le voulez faire aſtringent, ver-
ſez du vinaigre diſtillé deſſus: ſi c’eſt de
l’aperitif, vous ne mettrez que de l’eau
commune. Expoſez voſtre vaiſſeau au
ſoleil, & le remuez cinq ou ſix fois le
jour. Et lors que voſtre liqueur ſera
rouge, verſez-la par inclination dans un
vaiſſeau toute trouble, & remettez
d’autre vinaigre, ou eau, deſſus la li-
maille, & remettez au ſoleil comme
deſſus, & continuez juſques à ce que
vous ayez ce que vous ſouhaitez de
teinture. Prenez toutes vos teintures,
[ID00220]
& les mettez dans un vaiſſeau, & les
laiſſez repoſer une nuict, le ſaffran de-
meurera au fond. Verſez par inclina-
tion ce qui ſera deſſus: ſi c’eſt de l’a-
ſtringent que vous voulez faire, faites-
le reverberer au fourneau entre deux
Creuſets cinq ou ſix heures. Pour l’a-
peritif, il ſuffit de le ſecher douce-
ment.Les vertus du Crocus aſtringent ſont
de reſſerrer, & de ſecher; c’eſt pour-
quoy l’on s’en ſert à la dyſenterie, &
lienterie, & autres maladies ſemblables.
Les vertus de l’aperitif ſont d’attenuer,
& d’ouvrir les obſtructions. L’on en
fait prendre pour les paſles couleurs, &
pour faire venir les purgations.
Autre Crocus de Mars aperitif.
PRenez de la limaille d’acier, &
Soufre pilé, partie égale, mettez-le
dans un Creuſet ſur les charbons ar-
dans, & remuez ſans ceſſe avec une
Eſpatule de fer juſqu’à ce que tout le
Soufre ſoit bruſlé, & qu’il ne rende
plus de flamme. Alors mettez de nou-
veau Soufre, & remuez comme vous
[ID00221]
avez fait; & reïterez deux, trois, ou
quatre fois cette operation, juſqu’à ce
que voſtre limaille devienne en pou-
dre, & ſe froiſſe ſous les doigts. Ce qui
eſtant fait, vous la pilerez, & ſerrerez
dans une phiole de verre.Ce Crocus eſt aperitif: il eſt bon pour
les maladies epatiques, & eſt du nom-
bre des remedes diuretiques.
Vitriol de Mars.
MEttez de la limaille d’acier dans
un Matras, verſez deſſus de l’eau
aguiſée d’eſprit de Soufre, ou de Vi-
triol, tant qu’elle ſoit aigrette: mettez
voſtre Matras en digeſtion ſur les cen-
dres chaudes vingt-quatre heures; ſe-
parez par inclination l’eau, & en re-
mettez d’autre, & faites comme deſſus,
& continuez juſqu’à ce que l’eau que
vous mettrez ſoit auſſi aigre comme
quand vous l’y avez miſe. Prenez toutes
vos eaux impregnées, & en faites eva-
porer les trois parts ſur le feu dans une
terrine, & mettez la partie reſtante à la
cave: il ſe formera des criſtaux de cou-
leur de Vitriol, que vous leverez avec
[ID00222]
une cuilliere d’argent, & les ſerrerez
dans une phiole de verre. Faites evapo-
rer les trois parts de l’eau reſtante,
mettez à la cave, & continuez juſqu’à
ce qu’il ne ſe forme plus de criſtaux.Ce Vitriol eſt un ſpecifique pour tou-
tes obſtructions, tant epatiques que
pleniques. Il guerit la jauniſſe. Sa doſe
eſt d’une drachme juſqu’à deux dans
un boüillon, ou dans de la conſerve de
Roſes.
Du Vitriol de Venus.
PRenez du cuivre calciné; il s’en
trouve chez les Eſpiciers; il s’appel-
le æs uſtum: reduiſez le on poudre, &
le mettez dans un Matras: verſez deſ-
ſus de l’eau, qu’elle ſurnage de trois
doigts: mettez le vaiſſeau en digeſtion
au feu de cendre, & l’y laiſſez juſques
à ce que l’eau devienne bleüe, &
[ID00223]
qu’elle ait acquis un petit gouſt acide
& vitriolé. Verſez la liqueur par incli-
nation, & remettez de l’eau ſur les fe-
ces, & continuez juſques à ce que vo-
ſtre matiere ne teigne plus. Prenez
toutes vos eaux teintes, & les filtrez,
& les mettez dans une terrine ſur le
feu, & faites evaporer l’eau juſqu’à ce
qu’il ſe forme une petite pelicule au
deſſus. Alors mettez le vaiſſeau à la ca-
ve, les criſtaux tomberont au fond,
que vous ſeparerez d’avec l’eau, & les
mettrez dans un verre un peu large, &
les laiſſerez ſecher à l’ombre; puis vous
les garderez dans une phiole de verre
bien bouchée.Ce Vitriol eſt ſingulier pour le mal
des yeux où il n’y a point d’inflamma-
tion. Il le faut diſſoudre dans de l’eau
de Roſe, ou de Plantain.
|| [ID00224]
Du Sel, ou Sucre de Saturne.
SAns ſe donner la peine de calciner
le Plomb, qui eſt une operation lon-
gue & penible, l’on en trouve facile-
ment chez les Eſpiciers, & s’appelle
Minium. Vous en prendrez à diſcre-
tion, & le mettrez dans un Matras.
Verſez par-deſſus du vinaigre diſtillé,
qu’il ſurnage de trois ou quatre doigts:
mettez le vaiſſeau en digeſtion au Bain
à douce chaleur, & l’y laiſſez juſqu’à
ce que le vinaigre ait acquis une dou-
ceur. Alors verſez-le par inclination,
& remettez d’autre vinaigre, & faites
digerer, & continuez juſques à ce que
le vinaigre ne tire aucune douceur:
prenez tout voſtre vinaigre adoucy, &
le filtrez. Si vous voulez faire le magi-
ſtere de Saturne, vous reſerverez une
part dudit vinaigre, & ferez evaporer
[ID00225]
l’autre juſques à ſiccité, à chaleur dou-
ce, ou ferez diſſoudre ce qui reſtera
dans le vaiſſeau dans de l’eau commu-
ne; puis filtrerez & deſſecherez com-
me au precedent, & reïtererez cette
operation cinq ou ſix fois, & vous au-
rez un ſel, ou ſucre fort doux.Il a la vertu de rafraichir; il eſt bon
pour les inflammations, tant interieu-
res qu’exterieures, pris le poids de cinq
ou ſix gouttes dans de l’eau-Roſe, ou
de l’eau de Plantain. Il eſt bon appliqué
ſur les bruſlures, pour les rafraichir,
meſlé avec huile de Tartre, fait par de-
faillance; il guerit les ulceres, & oſte
les taches rouges qui viennent au viſa-
ge diſſout dans de l’eau de fraiſe; il
oſte les inflammations & rougeurs des
yeux, ſi on les en lave ſoir & matin; il
guerit les dartres diſſout dans du vinai-
gre, & appliqué deſſus.
Magiſtere de Saturne.
POvr faire le magiſtere de Saturne
vous prendrez l’autre part de la li-
queur que vous avez cy-devant reſer-
vée: verſez deſſus goutte à goutte de
[ID00226]
l’huile de Tartre faite par defaillance,
autant qu’il en ſuffira; la matiere blan-
che ſe precipitera au fond, que vous
laiſſerez repoſer une heure ou deux:
Vous verſerez par inclination le vinai-
gre, & l’huile de Tartre qui ſeront deſ-
ſus; lavez, filtrez, dulcorez, & deſſechez
la maſſe à chaleur temperée, & ſerrez
ce magiſtere dans un vaſe de verre.Ce magiſtere a les meſmes vertus que
le ſel de Saturne: il eſt convenable aux
inflammations internes & externes; il
entre en la compoſition de quelques
emplaſtres. La doſe eſt d’un demy ſcru-
pule à un ſcrupule, diſſout dans quel-
que eau convenable.
Huile de Saturne.
SI vous voulez avoir de l’huile de Sa-
turne, eſtendez du ſucre preparé
comme deſſus ſur une aſſiete de fayen-
ce, & la mettez à la cave un peu pan-
chante, un vaiſſeau deſſous. Ce ſucre ſe
diſſoudra en forme d’huile, & tombera
par defaillance. Son uſage eſt ſingulier
aux eryſipeles, inflammations & ulceres:
il mondifie les playes, & les adoucit.
|| [ID00227]
Avant-propos.
IE ne pretends point tirer
avantage des remedes que
je mets en lumiere, comme
eſtant de ma compoſition:
j’avoüe que la plus grande partie eſt
des ordonnances de Medecins tres-
conſiderables de la Faculté de Paris,
qui les ont ordonnées charitablement
à des pauvres malades, que j’ay miſes
en pratique; leſquelles ont tres-heu-
reuſement reuſſi. Vne autre partie m’a
eſté donnée par mes amis. Ie ne puis
nier auſſi qu’il n’y en ait quelques-uns
de ma compoſition, dont l’experience
eſt tres-certaine. Ie le puis aſſeurer, les
ayant tous experimentez. Dans les
Traitez precedens j’ay enſeigné la ma [ID00228] niere
d’operer, & de quelle façon il
falloit preparer les remedes; & j’ay
donné les vertus & les facultez de plu-
ſieurs Mixtes. Il nous reſte maintenant
de les mettre en pratique. C’eſt ce que
je pretends enſeigner dans cette Partie.
Ie prie toutes les perſonnes qui ſeront
ſoulagées par ces petits remedes, de ſe
ſouvenir de moy dans les prieres qu’el-
les feront à Dieu. C’eſt la ſeule grace
que je leur demande.
Eau contre les douleurs de la teſte.
PRenez fleurs & fueilles de Sauge,
de Betoine, de Roſes paſles, & de
Muguet, de chacune deux poignées;
pilez les dans un mortier de pierre, &
les mettez dans une Courge de verre.
Verſez deſſus trois livres de ſuc de lai-
ctuë, & de pourpier: puis diſtillez au
Bain-Marie à l’eau boüillante, juſques
[ID00229]
ques à ce que les feces ſoient ſeiches. Il
faut boire par neuf matins de cette eau
à jeun le poids de deux onces: Il faut
auſſi en étuver les tempes, les narines,
& la partie douloureuſe de la teſte. Elle
appaiſe auſſi les douleurs de la mi-
graine.
Eau pour les yeux troubles &
chargez.
PRenez Plantain, Ruë, Fenoüil,
Chelidoine, Marjolaine, parties éga-
les, que vous pilerez, & en exprime-
rez les ſucs. Sur deux livres deſdits ſucs
mettez une livre de miel blanc, Anti-
moine crud, reduit en poudre, une
once: puis diſtillez au Bain, à feu doux
de peur que le miel ne gonfle, juſqu’à
ce qu’il ne monte plus rien. Il faut ſe
laver les yeux de cette eau ſoir & ma-
tin, & mettre une compreſſe trempée
dedans ſur les yeux durant la nuit.
Eau contre l’inflammation des yeux.
PRenez Morelle, Plantain, & Ro-
ſes, de chacune deux poignées; pi-
lez-les dans un mortier de pierre, &
[ID00230]
les mettez dans un vaiſſeau pour diſtil-
ler, avec une pinte de vin blanc. Fai-
tes-les digerer une nuit au bain, puis
diſtillez à feu doux: dans une livre de
cette eau mettez diſſoudre ſur cendres
chaudes deux drachmes de ſel de Sa-
turne. On mettra trois ou quatre fois
de cette eau ſur l’inflammation.
Autre eau contre l’inflammation des
yeux, & qui les fortifie.
PRenez Euphraiſe, Fenoüil, Plan-
tain, & Cerfueil, de chacune deux
poignées; pilez-les, & les mettez avec
deux livres d’Eau-roſe dans une Cu-
curbite: plus deux drachmes d’Aloës,
demie once de Couperoſe blanche, une
drachme de Camphre; puis diſtillez le
tout au Bain boüillant, & en mettez
le plus ſouvent que vous pourrez dans
les yeux avec une plume.
Eau qui guerit les fiſtules
lacrymales.
PRenez therebentine de Veniſe,
Tartre blanc, de chacun quatre on-
ces; Maſtic, & gomme Arabic de cha [ID00231] cune
deux onces, Couperoſe blanche
une once: pilez ce qui ſe peut piler, &
mettez le tout dans une Cornuë, &
diſtillez au feu de ſable, gardant les de-
grez du feu juſques à ce qu’il ne ſorte
plus de fumée. Avant que de ſe ſervir
de cette eau il eſt à propos de ſe purger
deux ou trois fois, par des remedes qui
tirent du cerveau; comme il ſera dit au
Chapitre des purgations. Il faut auſſi
tous les matins faire friction ſur les
épaules, & la nucque du col, avec un
linge neuf un peu chauffé, pour dé-
tourner les humeurs. On mettra cinq
ou ſix fois de cette eau ſur le mal, avec
un plumaceau. Il faut auſſi eſtuver ſoir
& matin le tour de la fiſtule avec l’eſ-
prit de vin.
Eau facile à faire pour le mal
des yeux.
PRenez des œufs frais, & les faites
durcir dans la braiſe: vous en oſte-
rez les jaunes, & mettrez en leur place
de la Couperoſe blanche, & du ſucre
Candi reduits en poudre, parties éga-
les. Expoſez-les devant le feu ſur une
[ID00232]
aſſiete: il en ſortira une liqueur laquel-
le on appliquera ſur les yeux, pourveu
qu’il n’y ait point d’inflammation.
Eau pour la ſurdité.
PRenez eſprit de vin, & du ſuc de
Betoine, de chacun demie livre; un
gros oignon blanc coupé par tranches,
fleurs de Roſmarin une poignée, aman-
des ameres quatre onces, une groſſe
anguille dépoüillée de ſa peau, & cou-
pée par morceaux: faites diſtiller le tout
par la Cornuë au feu de ſable. Il faut
mettre tous les ſoirs de cette eau dans
l’oreille, trois ou quatre gouttes un
peu tiedes, puis tremper du coton de-
dans, & le mettre dans l’oreille. Il faut
continuer quarante jours.
Autre eau pour la ſurdité.
PRenez douze oignons blancs, ſix
oignons d’ail, Betoine & Morelle,
de chacune quatre poignées: pilez le
tout enſemble, puis l’exprimez, & di-
ſtillez au Bain. Meſlez avec l’eau qui
díſtillera de l’huile d’amandes ameres,
& de l’huile roſat, de chacune une
[ID00233]
once. Prenez un peu de ladite compo-
ſition, & la faites chauffer dans une
cuilliere d’argent, & en mettre dans
les oreilles, comme cy-deſſus.
Eau contre la douleur des oreilles.
PRenez trois livres de therebentine
de Veniſe bien lavée, Maſtic, En-
cens, Myrrhe, Ladanun, de chacun
une once: diſtillez par la Cornuë à feu
de ſable. Mettez de cette liqueur un
peu chaude ſur la partie douloureuſe:
Si l’on en met dans l’oreille, elle a la
vertu d’apaiſer les bruits, & ſifflemens
qui s’y forment.
Eau contre les palpitations de cœur,
& contre les affections de
la ratte.
PRenez fleurs de Bourrache, Bu-
gloſe, Sauge, & Roſmarin, de cha-
cune quatre onces; Cloud de Girofle,
Canelle, & Safran, de chacun une
drachme: mettez le tout dans une Cu-
curbite; verſez deſſus quatre livres
d’excellent vin blanc; faites digerer
[ID00234]
trois jours, puis diſtillez au Bain boüil-
lant. On prendra tous les matins de cet-
te eau pendant huit jours, depuis une
once juſques à deux.
Eau contre la melancholie.
PRenez Chardon benit, Hyſope,
Meliſſe, Bourrache, Bugloſe, par-
tie égale; pilez le tout, & en exprimez
le ſuc: prenez quatre livres dudit ſuc,
deux pintes de vin blanc, & les mettez
dans une Cucurbite, avec ſix onces
de fleurs de Roſmarin ſeiches, une
drachme de Canelle coupée par mor-
ceaux, un ſcrupule de Safran; puis di-
ſtillez le tout au Bain. Il faut prendre
deux fois la ſemaine de cette eau le
poids d’une once. Il eſt à propos deuant
que de s’en ſervir, de ſe purger avec ſix
grains de teinture d’Elebore noir, de-
layée dans un verre d’eau de Meliſſe.
Eau qui fortifie l’eſtomac.
PRenez des écorces de Citron, &
d’Oranges ſeiches, de chacune deux
onces; fueilles de Marjolaine une once,
Canelle & Girofle, de chacun deux
[ID00235]
gros: fait es infuſer le tout vingt-quatre
heures au Bain dans trois livres d’eſprit
de vin; puis diſtillez à l’eau boüillante.
Il faut prendre deux fois la ſemaine une
cuillerée de cette eau dans un boüillon,
ou dans quelque eau cordiale, comme
Chardon-benit, Bourrache, ou Bugloſe.
Eau qui provoque l’urine ſupprimée,
& fait vuider le ſable
des reins.
PRenez douze Citrons, & douze
Grenades, & les coupez par tran-
ches, & les mettez dans un Alembic de
cuivre, avec les herbes qui ſuivent;
ſçavoir, Perſil, Meliſſe, Hyſope, Saxi-
frage, Pimpinnelle, Philanthropos, ou
Gratteron, de chacune deux livres:
Verſez deſſus douze pintes d’eau com-
mune; diſtillez par le Refrigeratoire à
feu de flamme au commencement, le-
quel vous diminuerez lors que l’eau
commencera à diſtiller. Quand vous
aurez quatre pintes d’eau ceſſez. Il faut
avant que d’uſer de cette eau, ſe purger
des humeurs choleriques & phlegma [ID00236] tiques.
Il eſt auſſi neceſſaire d’obſerver
un regime de vivre: pour cer effect on
prendra l’advis d’un prudent Medecin;
apres lequel, on boira tous les matins
un grand verre de cette eau dans le de-
clin de la lune: s’il ſe peut on fera exer-
cice apres, ſinon on ſe tiendra au lict
chaudement.
Eau qui diſſout la pierre, & la fait
vuider par les urines.
PRenez therebentine de Veniſe
une livre, fruict d’Alchechange de-
mie livre, ſuc de Perſil une livre, Vi-
triol Romain demie livre: pilez les
fruits & le Vitriol, mettez le tout dans
une Cucurbite, avec quatre livres de
vin blanc; puis diſtillez au Bain boüil-
lant juſques à ce que les feces demeu-
rent ſeches. Il faut prendre ſoir & ma-
tin deux onces de cette eau dans un ver-
re de vin blanc, & continuer quarante
jours.
Eau qui guerit la gravelle.
PRenez des amandes de noyaux de
Peſches une livre; poix chiches
[ID00237]
deux livres, fueilles de menüe Sauge
une livre: pilez tout, & mettez dans
une Cucurbite, avec ſix livres de vin
blanc: faites digerer une nuit au Bain,
puis diſtillez à feu fort. Il faut boire
tous les matins une once de cette eau:
une heure apres on prendra un boüil-
lon fait de volaille, & de veau; dans
lequel on fera diſſoudre vingt grains de
creſme de Tartre. Il eſt neceſſaire de
continuer un mois entier, ou environ.
Eau contre la peſte.
PRenez ſuc de Scabieuſe une livre, de
Roſes de Provins une once, écorces
de Citrons & d’Ora̅ges ſeiches rappées,
de chacune deux onces, Theriaque
de Veniſe une once, Canelle, & Cloud
de Girofle, de chacun deux drachmes:
faites infuſer le tout vingt-quatre heu-
res dans une pinte d’eau de noix; puis
diſtillez à feu doux. L’on en peut pren-
dre depuis une once juſques à deux, le
matin à jeun en temps de peſte. De plus
elle fortifie les eſtomacs froids & de-
biles.
|| [ID00238]
Eau ſpecifique contre la peſte.
PRenez écorces de noix, quand elles
ſe dépoüillent facilement de deſſus
la noix; fueilles & cimes de Rüe, par-
ties égales: pilez les dans un mortier
de pierre, & les mettez fermenter trois
jours à la cave; puis diſtillez au Bain.
L’on en prendra tous les matins deux
cuillerées en temps de peſte. C’eſt un
ſouverain preſervatif.
Eau qui guerit les paſles couleurs.
PRenez Sauge, Hyſope, Roſmarin,
& Sabine, de chacune une livre;
pilez les dans un mortier de pierre, &
les mettez fermenter huit jours à la
cave dans une Cucurbite de verre, avec
quatre livres de vin blanc; puis vous
diſtillerez au Bain boüillant juſques à
ce que le marc ſoit ſec. Prenez une li-
vre de cette eau, & mettez dedans une
demie once de Crocus Martis dans un
petit ſachet de toile. L’on prendra tous
les matins une once de cette eau, juſ-
ques à deux. Il faut continuer quarante
jours; le Crocus Martis ſervira toûjours:
[ID00239]
on n’aura qu’à remettre de nouvelle
eau deſſus. Apres avoir beu ladite eau
on fera le plus d’exercice que faire ſe
pourra.
Eau qui fait venir les purgations.
PRenez Armoiſe & Hyſope, de cha-
cune deux poignées; Safran, Canelle
& Girofle, de chacun une drachme: met-
tez le tout dans une Courge, avec qua-
tre livres de vin d’Eſpagne: au defaut
vous prendrez d’excellent vin blanc.
Laiſſez infuſer une nuit au Bain, puis
diſtillez. Il faut prendre tous les matins
un demy verre de cette eau huit jours
devant le temps qu’on a accouſtumé
d’avoir ſes purgations, & huit jours
apres.
Eau qui arreſte les purgations immo-
derées, & les pertes de ſang.
PRenez Plantain, Morelle, Endive,
laictuë, parties égales, & les pilez,
& en exprimez les ſucs; puis les diſtil-
lez au Bain. Il faut boire de cette eau
trois jours de ſuite, ſoir & matin, deux
onces à chaque fois.
|| [ID00240]
Autre eau qui arreſte les pertes
de ſang.
PRenez le dedans de douze Citrons,
& de douze Grenades, quatre on-
ces de Roſes de Provins, deux livres de
bon vin rouge de trois ou quatre fueil-
les; puis diſtillez le tout au Bain. Pre-
nez deux onces de cette eau, faites
diſſoudre dedans dix grains de ſel de
Corail. Il la faut prendre le matin à
jeun, & le ſoir deux heures apres le re-
pas, & continuer quatre jours.
Eau qui facilite les accouchements.
PRenez Sauge, Tanaiſie, Hyſope,
de chacune deux poignées: pilez les
dans un mortier, & les mettez dans
une Cucurbite, avec une livre de miel
de Narbonne, Canelle & Girofle de
chacun une drachme, Rheubarbe cou-
pée par morceaux une once, thereben-
tine de Veniſe deux onces, d’Epithy-
me une drachme, vin blanc deux li-
vres. Faites infuſer le tout au Bain dou-
ze heures, puis diſtillez. Il faut pren-
dre tous les matins deux cuillerées de
[ID00241]
cette eau l’eſpace de quinze, ou ſeize
jours devant le temps de l’accouche-
ment, & ſe promener une bonne heure
apres l’avoir priſe. Cette eau eſt auſſi
excellente contre la colique venteuſe;
ſi l’on y adjouſte huit ou dix gouttes
d’eſſence de Sauge, ou de Tanaſie,
dans une cuillerée de ladite eau, la
donnant à boire à une femme de qui
l’enfant ſeroit mort dedans le ventre,
ou de qui l’arriere-faix ſeroit demeuré,
elle fera ſortir l’un & l’autre: ſi la pre-
miere fois ne ſuffit, il faut reïterer une
demie heure apres.
Eau qui puri fie la matrice, & qui ar-
reſte les ſuffocations.
PRenez racines & fueilles de Vio-
lette bien nettes, quatre poignées;
fueilles de Perſil, deux poignées; ſei-
gle, avoine & orge, de chacun une poi-
gnée: mettez toutes ces choſes dans
une Cucurbite; verſez deſſus quatre
livres de vin blanc; faites-les fermenter
huit jours à la cave, puis les diſtillez au
Bain boüillant. Il faut prendre trois ou
quatre fois la ſemaine de cette eau, le
[ID00242]
matin à jeun. La doſe eſt d’une once
juſques à deux.
Eau contre l’hydropiſie.
PRenez racines d’Iris, & d’Hye-
ble, de chacune deux onces; Per-
ſil, Fenoüil, Ache, Berle, de chacune
deux poignées; Cubebes une once,
Safran demie once, therebentine de
Veniſe quatre onces, Canelle & Gi-
rofle de chacun demie once. Faites in-
fuſer le tout vingt-quatre heures au
Bain boüillant; cohobez deux fois
l’eau diſtillée ſur les feces. L’on boira
demy verre de cette eau le matin, & le
ſoir. Il faut que le malade ſe promene
le plus long-temps qu’il pourra, ſinon
il demeurera au lict chaudement.
Eau contre les tremblements de la teſte,
& des mains.
PRenez fueilles de Perſil une poi-
gnée, fueilles & ſemences d’Ache,
de chacune deux poignées; graine de
Pavot blanc une once: pilez le tout
dans un mortier de pierre; mettez-les
infuſer dans ſix livres d’eau de Sauge
[ID00243]
dedans une Cucurbite; adjouſtez de-
mie once de Girofle, une once de Ca-
nelle, quatre onces de ſucre; diſtillez
au Bain boüillant: vous ferez diſſoudre
dans une livre de l’eau diſtillée une
once de Caſtoreum. il en faut boire une
once tous les matins, durant un mois.
Il faut auſſi s’en laver la teſte, le col, les
bras, & les mains, ſi elles tremblent.
Eau qui fait venir le laict aux
Nourrices.
PRenez racines, fueilles, & ſemences
de Fenoüil, ſix poignées; orge mon-
dé une livre, pois chiches deux livres:
mettez le tout dans l’Alembic de cui-
vre; verſez deſſus vingt livres d’eau,
mettez en digeſtion ſur cendres chau-
des vingt-quatre heures, puis diſtillez
par le Refrigeratoire: lors que vous
aurez dix livres d’eau, ceſſez. La nourri-
ce boira de cette eau à ſes repas: elle
pourra mettre dans chaque verre deux
ou trois cuilleré???s de vin.
|| [ID00244]
Syrop de Mercuriale.
FAvt prendre ſuc de Mercuriale
huit livres, ſucs de Bugloſe & Bour-
rache, de chacun deux livres: mettez-
les dans une baſſine de cuivre rouge,
avec douze livres de miel de Narbon-
ne: faites boüillir une demie heure à
feu doux, & écumez le miel; puis fil-
trez par la chauſſe d’hypocras. Prenez
quatre onces de racines de Gentiane,
une demie livre de racines de Flambe;
coupez-les par tranches, & les mettez
infuſer vingt-quatre heures ſur les cen-
dres chaudes dans trois livres de vin
blanc; filtrez ladite infuſion ſans l’ex-
primer, & la mettez avec les choſes cy-
deſſus; puis les faire cuire en conſiſten-
ce de ſyrop, lequel ſe puiſſe garder un
an, dautant qu’il en faut prendre toute
l’année tous les matins une cuillerée à
[ID00245]
jeun. Toute la compoſition cy deſſus
n’eſt que pour une perſonne. Ce ſyrop
fortifie, purge, purifie le ſang, & rafrai-
chit: il conſerve la jeuneſſe: il n’y a
preſque point de maladies contre leſ-
quelles il ne ſerve de remede. Il eſt ne-
ceſſaire avant que d’en uſer d’eſtre pur-
gé. Il peut eſtre nuiſible aux ratteleux, à
cauſe de la quantité de miel dont il eſt
compoſé.
Syrop pour faire dormir.
PRenez ſuc de pourpier, & de lai-
ctuë, de chacun deux livres; fleurs de
Nenuphar, & fleurs de Pavot cha̅peſtre,
autrement dit Rheas, ou Coquelicos,
de chacune demie livre: faites boüillir
les ſucs & les fleurs enſemble environ
un quart d’heure; puis filtrerez par la
chauſſe, & mettrez du ſucre livre pour
livre, & ferez cuire en conſiſtence de
ſyrop. Il faut écumer tous les ſyrops ſur
la fin de leur cuiſſon. On en prendra le
ſoir en ſe mettant au lict une once dans
un verre d’eau d’orge: il rafraichit, il
fait dormir, & eſt tres-excellent contre
les inflammations du poulmon.
|| [ID00246]
Syrop pour le poulmon.
IL faut prendre ſuc d’Hyſope deux
livres, ſucs de Bourrache, de Bugloſe,
de Meliſſe, & choux rouge, de chacu-
ne une livre; fleurs de Soufre deux on-
ces: faites boüillir le tout enſemble un
quart d’heure, puis paſſez-le ſans ex-
primer, & mettez du ſucre à diſcretion,
& en faites ſyrop. Il en faut prendre le
matin, à midy, & le ſoir avant le repas
deux cuillerées dans un verre d’cau
d’Hyſope. Il empeſche & corrige les
indiſpoſitions du poulmon.
Syrop contre l’hydropiſie.
IL faut prendre ſuc de Raves, de Per-
ſil, de Mercuriale, de Cerfueil, de
Chardon-benit, de chacun demie livre;
graine d’Hyeble, & de Genievre, de
chacune une livre; le dedans de douze
Citrons: faites boüillir le tout enſem-
ble juſques à ce que les graines ſoient
cuites; puis filtrez, & mettez deſdits
ſucs & ſucre, livre pour livre, & faites
ſytop. Le malade prendra une once de
ce ſyrop dans deux onces d’eau de
[ID00247]
Chardon-benit quand il ſe mettra de-
dans le lict, & il ſe couchera chaude-
ment; ce remede le purgera par les uri-
nes, ou par les ſueurs. Ce ſyrop eſt auſſi
tres-bon pour les graveleux, & pour
ceux qui ont peine à uriner.
Syrop contre la douleur de la teſte,
& purgatif.
IL faut prendre ſuc de Sauge, & de
Betoine, de chacun une livre; Roſes
paſles deux livres, Agaric coupé par
tranches une once; Canelle & Giroflo
de chacun une drachme: faites infuſer
le tout une nuict ſur cendres chaudes,
puis faites boüillir un quart d’heure,
apres, paſſez & mettez livre pour livre
de ſucre pour en faire ſyrop; duquel
on peut prendre depuis une once juſ-
ques à deux dans un verre d’eau de Be-
toine; & deux heures apres un boüil-
lon. Il purge doucement la pituite du
cerveau.
|| [ID00248]
Syrop violat purgatif.
PRenez fleurs de Violette entieres,
ſans en rien ofter que les queües, une
livre; faites-les infuſer douze heures
dans deux livres d’eau, puis les paſſez
& exprimez, & remettez de nouvelles
fleurs une livre dans ladite expreſſion,
& faites infuſer comme au precedent,
avec une once de Rheubarbe coupée
par tranches; puis exprimez, & faites
ſyrop, mettant livre pour livre de ſu-
cre. Quand on voudra ſe purger, on en
prendra depuis une once juſques à deux
dans un verre de ptiſane laxative, com-
poſée de Chiendent, Cichorée, Pim-
pinnelle, & Senné; comme il ſera dit
au Chapitre des ptiſanes laxatives. Il
purge la bile, tempere & rafraichit la-
crimonie des humeurs; mais il ne ſe
garde pas plus de quatre mois.
Syrop de Roſes muſcades.
PRenez une livre de Roſes muſcades,
faites-les infuſer une nuict da̅s deux
livres de decoction faite de racines &
fueilles de Bourrache & Cichorée; puis
[ID00249]
coulez & mettez du ſucre à diſcretion,
& faites ſyrop. Vne once de ce ſyrop,
priſe le matin, purge doucement &
benignement les ſeroſitez, & n’oblige
point de garder la chambre,
Syrop qui arreſte la diarrhée, la dyſen-
terie, & flux de ſang.
IL faut prendre ſuc de Limon, & de
Grenade, de chacun une livre; fruits
de Coing deux livres: faites infuſer le
tout douze heures avec une drachme
de Canelle; puis paſſez & mettez trois
quarterons de ſucre pour chaque li-
vre de ſuc. L’on prendra deux ou trois
fois par jour de ce ſyrop, une once à
chaque fois dans un verre d’eau ferrée.
Il faut continuer trois ou quatre jours
de ſuite.
Syrop pour fortifier l’eſtomac.
FAvt prendre Abſinthe, Mente &
Bayes, ou graines de Genievre, de
chacune deux poignées, & en faire de-
coction: mettez infuſer une nuict de-
dans Canelle, Girofle, Zinzembre &
Muſcade, de chacune un ſcrupule;
[ID00250]
puis coulez & mettez ſucre à diſcre-
tion pour en faire ſyrop. Vne cuillerée
de ce ſyrop, priſe devant le repas, for-
tifie, aide à la digeſtion, & réjoüit le
cœur.
Syrop pour faire venir les purgations,
& guerir les paſles couleurs.
PRenez Abſinthe, Lavande, & Hy-
ſope, de chacune deux poignées;
faites-les boüillir dans ſix livres d’eau
juſques à reduction de moitié: puis ex-
primez, & mettez infuſer vingt-quatre
heures dedans du Safran, Canelle, &
Girofle, de chacun une drachme:
paſſez & faites ſyrop avec partie égale
de ſucre. Il faut prendre matin & ſoir
de ce ſyrop le poids d’une once. Il faut
meſler ſon vin avec de l’eau dans la-
quelle on aura mis tremper du Crocus
Martis, & continuer un mois.
Syrop de pommes purgatif.
PRenez douze pommes de Reinette,
& les coupez par tranches, une de-
mie livre de pruneaux de Damas noir;
faites les boüillir dans ſix livres d’eau,
[ID00251]
juſques à ce que les pommes & les pru-
neaux ſoient bien cuits: puis vous les
exprimerez, & mettrez infuſer dans
l’expreſſion deux onces de Senné l’eſ-
pace de douze heures ſur les cendres
chaudes, avec une drachme de Canelle
& de Zinzembre; puis vous coulerez
comme au precedent, & mettrez livre
pour livre de ſucre, pour en faire ſyrop.
Pour ſe purger il en faut prendre de-
puis une once & demie juſques à deux.
Ce ſyrop n’eſt point dégouſtant, &
purge doucement l’humeur bilieuſe, &
pituiteuſe.
Autre Syrop purgatif.
VOvs prendrez racines & fueilles
de Cichorée, Bourrache, Buglo-
ſe & Meliſſe, de chacune demie livre:
coupez les racines, & pilez les fueilles,
& les mettez dans ſix livres d’eau com-
mune, avec quatre onces d’orge mon-
dé: fait es boüillir le tout enſemble juſ-
ques à diminution de la moitié; puis
coulez ſans exprimer, & mettez dans
ladite coularure infuſer ſur cendres
chaudes vingt-quatre heures, deux
[ID00252]
onces de Rheubarbe coupée par tran-
ches, avec une once de Senné, & de-
mie drachme de Zinzembre: puis cou-
lez & exprimez, & mettez trois quar-
terons de ſucre pour livre de coulature,
faites cuire en conſiſtence de ſyrop. Ce
ſyrop purge la pituite tartareuſe du
ventricule, & des parties voiſines: il
guerit la jauniſſe. On en peut prendre
depuis deux onces juſques à trois. Lors
que l’on voudra ſe purger le cerveau, il
faut prendre une once & demie de ce
ſyrop, & le mettre avec une once de
ſyrop de Roſes paſles.
Ptiſane purgative.
PRenez racines de Chiendent,
d’Oſeille, Piſſe-en-lict, Cichorée,
Endive, & Scorſonaire, de chacune
demie poignée: herbes de Bugloſe,
Bourrache, Endive, Cichorée, Pour-
pier, & des quatre Capillaires, de cha [ID00253] cun
une poignée: faites cuire le tout
dans quatre livres d’eau, à diminution
d’une livre: adjouſtez ſur la fin un peu
d’Anis, & de Coriandre, une once de
Sennè, deux drachmes de Criſtal mi-
neral; faites infuſer douze heures ſur
les cendres chaudes. Il en faut boire le
matin à jeun; & apres midy, trois heu-
res apres le repas; & le ſoir ſi l’on veut
en ſe couchant un verre à chaque fois.
Cette ptiſane purge doucement l’hu-
meur melancholique, & la pituite, &
deſopile la ratte.
Autre ptiſane purgative.
VOvs prendrez racines d’Enule
Campane, de Guimauve, de Ci-
chorée ſauvage, de chacune une poi-
gnée: faites les cuire dans deux pintes
d’eau, à diminution du tiers: vous ad-
jouſterez ſur la fin un peu de Scolopan-
dre, avec une poignée de Roſes, une
pincée d’Anis; puis coulez & faites in-
fuſer dans la coulature une once de
Rheubarbe coupée par petites tran-
ches, une drachme d’Agaric trochiſqué,
demie once de Senné, le temps de
[ID00254]
douze heures. Il faut boire de cette
ptiſane deux ou trois fois la ſemaine
eſtant à jeun un grand verre; principa-
lement au Printemps, & à l’Automne
dans le decours de la lune. Elle purge
la bile noire & bruſlée, avec les hu-
meurs pituiteuſes, tant des parties hau-
tes, que des baſſes.
Ptiſane rafraichiſſante, &
aperitive.
PRenez racines de Mauve, de
Guimauve, Nenuphar, & d’Iris,
chacune une poignée: Violette, Mo-
relle, Reine des prés, pimpinnelle,
laictuë, de chacune une poignée; San-
tal Citrin deux drachmes: faites boüil-
lir le tout dans ſix livres d’eau, à dimi-
nution du tiers; puis coulez & faites
infuſer douze heures dans la coulature
une once de Criſtal mineral, Caſſe
mondée deux onces; Manne de Calabre
une once, le ſuc de trois Citrons. Cet-
te ptiſane, outre qu’elle rafraichit, elle
purge les humeurs bruſlées, & donne
de l’appetit.
|| [ID00255]
Ptiſane qui purifie le ſang.
VOvs prendrez racines & fueilles
de Cichorée, Chardon benit,
Cerfueil, Perſil, de chacune une poi-
gnée: oſtez les cordes des racines; une
poignée de graines de Genievre con-
caſſée: faites boüillir le tout dans qua-
tre livres d’eau, à diminution de moi-
tié: filtrez & mettez dans ce qui paſſe-
ra une once de Criſtal mineral. Il faut
boire tous les matins à jeun durant
huit jours, un grand verre de cette pti-
ſane au decours de la lune.
Ptiſane qui dißipe les enflures du ven-
tre & des iambes, qui reſtent
apres la fiévre.
PRenez Aigremoine, Pimpinnelle,
Betoine, Chiendent, Cichorée ra-
cines & fueilles, à la reſerve de la Be-
toine; de laquelle les racines ſont vo-
mitives, de chacune une poignée: fai-
tes-les boüillir dans qua re livres
d’eau, à diminution du tiers; puis fil-
trez, & mettez infuſer dans ladite de [ID00256] coction
une once de Senné, avec une
drachme de Canelle coupée par mor-
ceaux. Il faut boire à jeun un grand
verre de cette ptiſane, & autant apres
diſner, trois ou quatre heures apres le
repas.
Ptiſane rafraichiſſante.
VOvs prendrez racines de Nenu-
phar, fueilles & racines de Ci-
chorée, & de Cerfueil, de chacune une
poignée: quatre pommes de Reinet-
te coupées par morceaux, une poi-
gnée d’orge: faites le tout boüillir en-
viron une demie heure dans quatre
livres d’eau; puis oſtez le vaiſſeau de
deſſus le feu, & mettez un petit baſton
de Regliſſe raticé, & coupé par pe-
tits morceaux, & couvrez le vaiſſeau,
& laiſſez refroidir. Cette ptiſane eſt
rafraichiſſante & humectante. Ceux
qui ſont échauffez au dedans en peu-
vent boire à leurs repas: comme auſſi
c???ux qui ſont travaillez de la fiévre.
|| [ID00257]
Ptiſane pour le poulmon.
PRenez Hyſope, Chou-rouge,
Chiendent, piſſe-en-lict, de cha-
cune une poignée; ſix figues, raiſins de
de Damas, & Iujubes, de chacun une
once; oſtez les pepins des raiſins: une
once de fleur de Soufre, que vous
mettrez dans un ſachet de to???le, une
poignée d’orge: adjouſtez avcc tout ce
que deſſus demie livre de miel de Nar-
bonne: faites boüillir le tout dans ſix
livres d’eau, à diminution du tiers.
L’uſage de cette ptiſane eſt excellente
pour ceux qui ſont malades du poul-
mon; & meſme elle ſoulage ceux qui
ont la pleureſie. Il en faut boire trois
ou quatre verres par jour Elle aide auſſi
à faire ſortir le phlegme craſſe, & gue-
rit les inflammations de la gorge.
Ptiſane qui deſopile la ratte.
VOvs prendrez fucilles de Meliſſe,
Bugloſe, Bourrache, de chacune
une poignée: Capres demie livre, Po-
lipode de cheſne fendu par la moitié,
deux onces: faites boüillir le tout dans
[ID00258]
ſix livres d’eau, à reduction des trois
quarts; puis coulez, & adjouſtez à la
coulature une drachme de Canelle par
morceaux. Il faut prendre de cette pti-
ſane trois ou quatre verres par jour:
elle deſopile la ratte, fait uriner, &
purge doucement.
Ptiſane qui fortifie, & qui arreſte la
diarrhée & la dyſenterie.
PRenez de la Sauge une poignée,
racines de Nenuphar deux onces,
rapures de corne de Cerf & d’yvoire,
de chacune demie once, Crocus Mar-
tis aſtringent, une once: faites boüillir
le tout dans quatre livres d’eau, à di-
minution du quart; puis coulez, &
mettez infuſer une once de Rheubarbe
coupée par morceaux, une drachme de
ſel de Corail: lors que la ptiſane ſera
froide il en faudra donner au malade
le matin, à midy & au ſoir, à chaque
fois un grand verre. Il faut continuer
cinq ou ſix jours de ſuite.
|| [ID00259]
Ptiſane qui guerit les galles.
VOvs prendrez Pimpinnelle,
Chiendent, Cerfueil, des quatre
Capillaires, de chacun une poignée;
une once d’orge, deux onces de Senné,
Caſſe mondée une once, Tamarins
deux onces, un baſton de Regliſſe ra-
ticé, & coupé par morceaux. Il faut
faire boüillir le tout dans ſix livres
d’eau à reduction de moitié, puis paſ-
ſer par l’étamine. On boira le matin un
verre de cette ptiſane, & autant apres
diſner. Il faut continuer huict jours.
Pillules pour purger le cerveau.
PRenez extraicts de Sauge, Be-
toine, de chacun une drachme,
Agaric trochiſqué, teinture d’Elebore
noir, de chacun un demy ſcrupule;
teinture de Rheubarbe deux drachmes:
[ID00260]
malaxez le tout dans unc petite terrine
ſur des cendres chaudes avec une Eſpa-
tule, juſques à ce que le tout ſoit en
conſiſtence de pouvoir former pillules.
Ce que vous connoiſtrez en mettant
une goutte refroidir ſur une aſſiete: ſi
elle ne prend point à l’aſſiete, ny aux
doigts, elles ſont comme il faut. Vous
formerez neuf pillules de cette maſſe,
pour en prendre neuf matins de ſuitte,
une à chaque priſe. Deux heures apres
il faut prendre un boüillon. Elles pur-
gent le cerveau, la colere jaune & noi-
re, la pituite, & fait mourir les vers.
Autres pillules qui purgent le
cerveau.
VOvs prendrez teintures d’Aloës,
& de Rheubarbe, de chacune une
once; Agaric trochiſqué trois drach-
mes, ſuc de Roſes une once, Maſtic
deux drachmes: pilez l’Agaric & Ma-
ſtic, & incorporez les poudres avec
les teintures & ſuc cy-deſſus, & faites
maſſe, que vous garderez dans un mor-
ceau de cuir frotté d’huile. Elles pur [ID00261] gent
le cerveau, les yeux, les oreilles,
le ventricule, & la matrice, de leurs
humeurs putrides, & les corroborent.
La doſe eſt d’une drachme juſques à
drachme & demie. Il les faut prendre
le matin à jeun.
Pillules qui purgent la melancholie.
PRenez extraict de Meliſſe une
once, teinture de Senné une demie
once, teinture d’Aloës deux drachmes,
extraict d’Elebore noir une drachme,
teinture de Safran un ſcrupule, Epi-
thyme, & Maſtic en poudre deux
drachmes: incorporcz le tout enſem-
ble, & faites maſſe, & la ſerrez comme
deſſus. Elles purgent l’eſtomac beni-
gnement; elles empeſchent la putrefa-
ction des humeurs, & garantiſſent des
douleurs de la teſte, de l’eſtomac, du
ventre, & de la matrice. Elles chaſſent
la melancholie, & la triſteſſe. La doſe
eſt d’une demie drachme juſques à une
drachme.
|| [ID00262]
Pillules aperitives.
VOvs prendrez extraict d’Abſin-
the une once, Mirabolans citrins
deux onces, teinture d’Aloës, & de
Rheubarbe, de chacune une once;
Crocus Martis, & Turbit, de chacun
deux drachmes; teinture de Safran de-
mie drachme, & pilez ce qui ſe peut
piler, & malaxez le tout, & en faites
maſſe. Elles purgent les humeurs bi-
lieuſes & pituiteuſes, & principale-
ment celles qui attaquent la teſte, le
foye, & le ventricule: elles fortifient
l’eſtomac, facilitent la coction des vian-
des, excitent l’appetit. La doſe eſt
d’une drachme.
Pillules contre la peſte.
PRenez extraict de Ruë, & teintu-
re d’Aloës, de chacune une once;
Theriaque de Veniſe une once, Myr-
rhe demie once, écorces de Citrons, &
d’Oranges en poudre, de chacune
deux drachmes: incorporez le tout en-
ſemble, & y adjouſtez ſur la fin une
drachme d’eſprit de Vitriol. Elles pre [ID00263] ſervent
de tout air infecté, & de cor-
ruption: elles purgent l’eſtomac des
humeurs corrompuës; c’eſt pourquoy
elles ſont excellentes contre la peſte. Il
en faut prendre le matin quand l’air
eſt infecté, avant que de ſortir, une
demie drachme.
Pillules contre l’aſthme, & toux
inveterée.
VOvs prendrez extraict de Sauge
& d’Hyſope de chacune une on-
ce; Agaric trochiſqué trois drachmes,
extraict de Coloquinte deux drachmes,
Turbit quatre drachmes, Myrrhe &
racines d’Iris, de chacune une drachme;
fleurs de Soufre demie once Pilez ce
qui ſe pourra piler, & malaxez le tout:
adjouſtez ſur la fin une cuillerée d’eſ-
prit de vin, & en formez pillules. Elles
purgent la poitrine, le thorax de la
pituite, craſſe, & putride; facilite le
cracher, & appaiſe la toux. La doſe eſt
d’un ſcrupule.
|| [ID00264]
Pillules qui purgent les eaux des
hydropiques.
PRenez extraict d’Hyebles, de
Sureau, & de Fenoüil, de chacun
une once; Ialap en poudre demic once,
teinture de Gomme-gutte deux drach-
mes, Baye, ou graine de Genievre une
once; eſprit de Vitriol une drachme:
incorporez le tout comme il a eſté dit,
& faites pillules. Elles purgent les caux
des hydropiques, & font ſortir les
vents. Il en faut prendre tous les matins
un mois de temps, d’une drachme juſ-
ques à drachme & demie.
Pillules contre les ſuffocations
de matrice.
VOvs prendrez extraict de Matri-
caire, de Sauge, & de Ruë, de
chacune une once; de fecule de Brione
une once, Epithyme deux drachmes,
Rheubarbe en poudre demie once,
Caſtoreum deux drachmes, Crocus
Martis une drachme: incorporez tou-
tes ceschoſes enſemble, & mettez ſur
la fin douze gouttes d’eſſence d’Hyſo [ID00265] pe,
quatre de Canelle, & deux de
cloud de Girofle; puis formez pillules.
Elles arreſtent les vapeurs de la matrice,
& les fait ſortir par les voyes ordinai-
res: elles font venir les purgations, &
dégagent les obſtructions. Il en faut
prendre deux ou trois fois la ſemaine
le poid??? d’une drachme, le matin à
jeun, contre les vapeurs de la matrice:
& pour faire venir les purgations, il
en faut prendre un mois entier matin
& ſoir, une demie drachme à la fois.
Pillules qui arreſtent les dyſenteries,
& fortifient.
PRenez extraict de Boüillon-blanc,
Morelle & Sauge, de chacun une
once, teinture de Rheubarbe une on-
ce, ſel de Corail, & de Perles, de cha-
cun deux drachmes; Crocus Martis,
raclure d’yvoire, & de corne de Cerf,
de chacune une drachme: faites maſſe
de tout, & mettez ſur la fin deux gout-
tes d’eſſence de Canelle, & autant de
cloud de Girofle. Elles arreſtent toutes
ſortes de dyſenterie, purgent & forti [ID00266] fient.
Il en faut prendre matin & ſoir
une drachme.
Pillules contre la gravelle.
VOvs prendrez deux onces de
therebentine de Veniſe, que vous
ferez boüillir dans ſuffiſante quantité
d’eau, juſques à ce qu’elle n’adhere
point aux doigts: incorporez avec ſel
de Perſicaire, & de Perſil, de chacun
une drachme, & Criſtal mineral demie
once, puis faites pillules. Elles font ſor-
tir le ſable des reins, & de la veſſie, &
provoque l’urine ſupprimée. Il en faut
prendre quinze jours de ſuite le matin,
le poids d’une drachme.
Pillules purgatives.
PRenez teinture de Bourrache,
Bugloſe, & Aloës, de chacun une
once; ſuc de Roſes demie once: incor-
porez le tout enſemble dans une petite
terrine ſur les cendres chaudes, juſques
à ce que le tout ſoit en conſiſtence de
pillules. Elles purgent doucement le
cerveau, l’eſtomac, & les inteſtins. Il
[ID00267]
en faut prendre le poids d’un ſcrupule
le ſoir, demie heure devant que de
ſouper. Elles n’opereront que le jour
ſuivant.
Autres pillules purgatives.
VOvs prendrez extraict de Fenoüil
une once, Senné & Criſtal mineral
en poudres une once: incorporez les
poudres avec ledit extraict, & en faites
pillules. Elles purgent la premiere &
ſeconde region du corps, le foye, l’e-
ſtomac, la ratte, & déchargent les
reins. La priſe eſt d’une drachme.
Pillules univerſelles.
PRenez teinture d’Aloës, de Sen-
né, & de Rheubarbe, de chacune
une once; Agaric trochiſqué demie on-
ce, Spica nardy, & Maſtic, de chacun
une drachme; graines de Violette en
poudre une once: incorporez le tout
enſemble, & faites maſſe. Elles purgent
univerſellement & doucement toutes
les humeurs. La doſe eſt depuis quinze
juſques à vingt grains.
|| [ID00268]
Pillules pour faire dormir.
PRenez extraict de Laictuë & Mo-
relle, de chacun deux drachmes;
Opion torrifié un ſcrupule, graine de
Iuſquiame, & Pavot blanc, de chacune
une drachme: reduiſez l’Opion &
graines en poudres, & les incorporez
avec les extraicts, & faites pillules.
Elle provoquent doucement le ſom-
meil: elles appaiſent toutes ſortes de
douleurs. La doſe eſt depuis ſix juſques
à dix grains. Il les faut prendre le ſoir
enſe mettant au lict.
|| [ID00269]
Des Baumes.
- Compoſition du precieux Baume du- quel ſaincte Magdelaine ſe ſervit pour oindre la teſte & les pieds de noſtre Seigneur, lequel fut apporté de Hieruſalem à Rome, du regne de l’Empereur Tite Veſpaſien.
|| [ID00272]
Baume contre les douleurs de la teſte,
provenantes de bleſſure.
VOvs prendrez fueilles & fleurs de
Sauge, & de Betoine, de chacune
une livre; huile des Philoſophes deux
livres: mettez leſdites fueilles & fleurs
dans une phiole de verre double avec
ladite huile, quarante jours au ſoleil;
puis vous exprimerez ſous la preſſe, &
remettrez l’expreſſion au ſoleil: il s’en
fera un baume qui ſera bon pour toutes
les douleurs & cicatrices de la teſte. Il
s’applique ſeul, ou ſur des étouppes, ou
filaſſes rouſſes.
Baume qui arreſte le tremblement de
la teste, des bras, &
des mains.
PRenez fueilles & fleurs de Ruë,
de Sauge, & Camomille, de chacu-
ne deux onces; Bayes, ou graines noi-
res de laurier quatre onces, Roſes paſles
ſeches trois onces: pilez le tout, & le
mettez dans une phiole de verre avec
deux livres d’eau de vie, & l’expoſez
[ID00273]
au ſoleil un mois, puis vous exprime-
rez. Il faut frotter de ce baume un peu
tiede, la teſte, la gorge, les bras, &
les mains, deux ou trois fois la ſemaine.
Avant que de l’appliquer il faut frotter
les parties un quart d’heure, avec un
linge neuf un peu chauffé.
Baume contre la paralyſie.
VOvs prendrez fleurs de Roſmarin,
Sauge, Betoine, Camomille,
Mille-pertuis, & Lavande, de chacune
deux onces; Therebentine de Veniſe
bien lavée quatre onces, huile de lau-
rièr, & de lin, de chacune une once;
Girofle entier une once, Canelle cou-
pée par morceaux demie once: mettez
le tout dans une Cornuë avec deux
livres d’eſprit de vin; bouchez la Cor-
nuë, & laiſſez infuſer les drogues neuf
jours, & les remuez tous les jours deux
ou trois fois: puis vous diſtillerez au
feu de roüe; il ſortira premierement
une eau blanche, avec un baume blanc.
Lors qu’il commencera de monter une
eau rouſſe, vous changerez de Reci-
pient, & augmenterez le feu, & con [ID00274] tinuerez
juſques à ce qu’il ne diſtille
plus rien: il paſſera un baume rouge
avecque l’eau. L’eau & le baume blanc
ſe prennent par la bouche: l’on peut ſe-
parer le baume par l’entonnoir: une
cuillerée de l’eau fortifie l’eſtomac, aide
à la digeſtion, laſche l’urine ſupprimée,
arreſte le vomiſſement, garantit de la
peſte, facilite les accouchements, gue-
rit la colique. Le baume blanc a les
meſmes vertus. La doſe eſt de cinq à
ſix gouttes dans deux cuillerées de vin
blanc, ou quelque autre vehicule ap-
proprié au mal. Pour l’eau & baume
rouge, c’eſt pour les douleurs qui pro-
viennent de cauſe froide. Il guerit les
paralyſies: il le faut faire un peu chauf-
fer avant que de l’appliquer, & bien
frotter les parties avec la main un quart
d’heure de temps, & tremper un pa-
pier dedans, & l’appliquer ſur le mal,
& le faire tenir avec une bande. Il en
faut mettre matin & ſoir, & continuer
juſques à gueriſon.
|| [ID00275]
Baume contre les douleurs de la
ſcyatique.
PRenez une groſſe Oye bien graſſe,
de laquelle vous oſterez les entrail-
les, & mettrez dedans une poignée
de menué Sauge coupée, une livre
de poix de Bourgogne, quatre onces
de therebentine, deux petits chiens,
& deux petits chats: puis couſez les
ouvertures, & l’embrochez, & la fai-
tes roſtir doucement juſques à ce qu’il
ne tombe plus rien. Serrez le baume
dans un pot. Il faut frotter la partie ma-
lade avec la main avant que de l’appli-
quer. Il en faut mettre deux fois le
jour, & continuer juſques à gue-
riſon.
Autre baume pour la ſcyatique.
PRenez gros vin rouge deux livres,
huile de noix une livre, gomme de
Cyprés demie livre: faites boüillir le
tout dans un pot neuf juſques à la con-
ſommation du vin, puis exprimez. Ce
baume s’applique le plus chaud que
l’on le peut ſouffrir, le ſoir en ſe met [ID00276] tant
au lict. Il faut mettre un linge
chaud par deſſus.
Baume ou Pommade contre les bruſlu-
res, & contre les marques
de la petite verolle.
VOvs prendrez unc douzaine de
jaune d’œufs durs, une livre de
ſain-doux, la fiante d’un cheval frai-
chement faite: fricaſſez le tout dans
une poille environ une demie heure,
puis exprimez par la preſſe. L’on met-
tra de ce baume ſur les bleſſures, ſans
charpie, une fueille de noyer cuitte
dans de l’eau par deſſus. Il ſuffit d’en
mettre une fois le jour; & à chaque fois
l’on mettra une nouvelle fueille. Pour
les marques de la petire verolle, il en
faut mettre quatre ou cinq fois le jour
deſſus, comme de la pommade, & con-
tinuer un mois.
Baume qui fait reprendre les
playes.
PRenez therebentine une livre,
huile de Mille-pertuis quatre onces,
[ID00277]
graiſſe de porc demie livre, le jaune de
trente œufs durs, eſprit de ſel deux
drachmes, cire neufve deux onces:
faites fondre le tout dans un pot neuf
verniſſé, & le faites boüillir un quart
d’heure à petit feu, puis exprimez.
L’on mettra de ce baume dedans les
playes, & deſſus, apres les avoir lavées
de vin, & deſſechées avec un linge
blanc. Il faut mettre une compreſſe ſur
ladite playe trempée dedans, & l’y laiſ-
ſer douze heures avant que de la lever.
Il n’y a point de playes qu’il ne gue-
riſſe en huict jours. Il eſt auſſi excellent
contre les ulceres.
Baume contre les douleurs de la goutt???,
ſoit de cauſe chaude,
ou froide.
PRenez écorcc de Sureau demie
livre, vers de terre, & limaſſons
rouges, de chacun quatre onces: vous
les laverez premierement avec du vi-
naigre & du ſel, & apres avec de l’eau:
& lors qu’ils ſeront bien nets, vous les
couperez, & mettrez par morceaux,
[ID00278]
& les mettrez dans un pot neuf avec
deux livres d’huile d’olives. Vous ferez
boüillir le tout à petit feu, juſques à
conſiſtence de ſyrop, puis paſſerez par
l’étamine. Mettez diſſoudre dans la
coulature une once de ſel armoniac en
poudre. Il faut mettre de ce baume ſoir
& matin ſur les parties affligées, le plus
chaud que l’on le pourra ſouffrir.
Baume contre les douleurs de la goutte
froide.
PRenez racines & fueilles d’Hy-
ſope, & de Perſil, de chacune deux
livres; oſtez les cordes des racines, &
les coupez par morceaux, & les mettez
dans un pot de terre verniſſé, avec une
livre de grains de Genievre concaſſé,
deux livres de vin blanc, & une livre
de graiſſe de porc. Vous ferez boüillir
le tout juſques à ce que le vin ſoit con-
ſommé, puis exprimerez. Ce baume
s’applique comme il a eſté dit cy-deſſus.
Il eſt bon contre toutes les douleurs
qui proviennent du froid.
|| [ID00279]
Baume qui arreſte la diarrhée, &
flux de ſang.
VOvs prendrez Roſes de Provins
ſeches demie livre, theriaque de
Veniſe une once, gros vin rouge deux
livres: faites boüillir le tout juſques à
diminution de moitié, puis exprimez.
Il faut tremper un linge dans ledit bau-
me, & l’appliquer tout chaud ſur le
ventre, & renouveller deux ou trois
fois le jour. Il arreſte auſſi le vomiſſe-
ment appliqué ſur l’eſtomac.
Baume ou pommade qui guerit les
hemorrhoïdes externes.
PRenez cinq ou ſix gros porreaux,
deux poignées de Cicuë; hachez-
les bien menuës, & les fait es cuire dans
quatre livres de bon vinaigre, juſques
à diminution de moitié, puis expri-
mez, & mettez dans l’expreſſion ſuſdite
deux livres de beure frais: remettez
ſur le feu, & faites boüillir juſques à ce
que l’humidité du vinaigre ſoit toute
conſommée. Vous écumerez ſur la fin,
& le mettrez dans un pot. Il le faut
[ID00280]
faire chauffer dans une cuilliere, & en
mettre avec une plume ſur les hemor-
rhoïdes cinq ou ſix fois le jour.
Baume contre la ſurdité.
PRenez cimes & fleurs de Lavande,
Thim, Rüe, Marjolaine, Menthe,
Camomille, Pacquettes, Melilot,
graine de Laurier meure, de chacune
une once: contuſez-les dans un mor-
tier, & mettez-les dans une Cornuë de
grandeur convenable: verſez deſſus
deux livres d’eſprit de vin; bouchez la
Cornuë, & laiſſez le tout infuſer quin-
ze jours, puis diſtillez à feu de rouë,
juſques à ce qu’il ne monte plus rien. Il
paſſera une eau & un baume enſemble,
que vous ſeparerez par l’entonnoir.
Vous mettrez de ce baume trois ou
quatre gouttes dans l’oreille le ſoir en
vous couchant, & un petit morceau de
cotton deſſus. L’eau ſert pour frotter
les oreilles, la nucque du col, & le
long du dos, pour faciliter la deſcente
des humeurs, & continuez quarante
jours. Il eſt à propos que la purgation
precede ce remede. L’on ſe pourra
[ID00281]
ſervir des ptiſanes purgatives cy-de-
vant écrites.
Baume ſouverain pour guerir toutes
ſortes de playes.
PRenez ſuc de Betoine, & de Mille-
pertuis, de chacun demie livre; hui-
le de Petrolle une once, therebentine
lavée deux onces, huile d’olives ſix
onces, Maſtic & Miel, de chacun une
drachme: faites boüillir le tout à petit
feu dans un pot verniſſé, juſques à la
conſomption des ſucs; puis exprimez,
& mettez l’expreſſion dans une phiole
quinze jours au ſoleil. Pour appliquer
ce baume il le faut faire un peu chauf-
fer, & le mettre dans la playe, & un
petit linge par deſſus, trempé dudit
baume, en vingt-quatre heures il fait
reprendre les playes. Il fait auſſi partir
les noirceurs & meurtriſſures.
Baume contre la douleur des dents.
VOvs prendrez racines de Hanne-
banne, & Pyretre, de chacune une
once; Ruë, Marjolaine, Lavande, &
menuë Sauge, de chacune une poignée:
[ID00282]
coupez le tout bien menu, & les met-
tez dans une Cornuë; verſez deſſus
deux livres d’eau de vie, deux drach-
mes de cloud de Girofle, une drachme
de Poivre long; laiſſez le tout infuſer
une nuict, puis diſtiliez au feu de ſable;
l’eau & le baume diſtilleront enſemble,
que vous ſeparerez par l’entonnoir.
Vne goutte du baume appliquée dans
la dent creuſe avec un petit de cotton,
appaiſe la douleur: une demie cuille-
rée de l’eau dans la bouche fait le meſ-
me effect. Il faut en frotter les tempes,
& le derriere des oreilles.
Emplaſtre de Savon.
PRenez huile d’olives deux livres,
Minium une livre, Ceruſe en pou-
dre impalpable demie livre: faites
chauffer l’huile dans une poille, ou
baſſine. Lors que l’huile commencera
[ID00283]
à boüillir, mettez peu à peu le Minium
& Ceruſe, & remuez touſiours avec
l’Eſpatule de bois, juſques à ce qu’ils
ſoient bien incorporez avec l’huile:
puis vous adjouſterez peu-à-peu dix
onces de Savon de Gennes coupé par
tranches bien menues, & remuerez
touſiours juſques à ce qu’il ait acquis
une couleur griſaſtre. Alors vous en
mettrez une goutte ſur une aſſiette d’é-
tain; s’il n’adhere point à l’aſſiette, c’eſt
un teſmoignage qu’il eſt cuit. Alors
vous y meſlerez deux onces d’huile de
therebentine, & remuerez ???uſques à ce
qu’il ſoit froid, & en ferez des rou-
leaux, ou magdaleons ſur une table,
ou marbre, pour vous en ſervir à ce qui
s’enſuit. Il s’applique ſur un cuir ſans
charpie: vn emplaſtre ſert trois jours.
Il guerit les ulceres, & les eryſipeles,
les playes & bruſlures: il diſſout & re-
ſout les enflures: il diſſipe les duretez
& louppes, ſi l’on continuë d’en met-
tre deſſus. De plus, il eſt propre à tou-
tes ſortes de playes.
|| [ID00284]
Emplaſtre de Minium.
PRenez huile d’olives livre & de-
mie, Minium une livre: incorpo-
rez le Minium & l’huile comme vous
avez fait cy-deſſus, & operez en la
meſme maniere, juſques à ce qu’il de-
vienne d’un rouge brun, puis en faites
magdaleons. Bien que cet emplaſtre
ne ſoit compoſé que de deux drogues,
il ne laiſſe pas d’avoir des facultez tres-
grandes. Il rafraichit & deſſeiche: il
eſt bon contre les inflammations, & les
enflures des membres; il diſſipe les
humeurs; il appaiſe les douleurs de la
goutte provenante de cauſes chau-
des: il deſſeche les playes, & les con-
ſolide.
Emplaſtre contre les dartres vives.
VOvs prendrez huile de noix
quatre onces, gomme de Ceriſier
en poudre deux onces, ſel Armoniac
une once, Savon de Gennes raſpé deux
onces: Faites premierement chauffer
l’huile dans une terrine plombée; &
lors qu’elle commencera à boüillir,
[ID00285]
mettez peu-à-peu les drogues ſuſdites
dedans, & remuez touſiours avec une
Eſpatule de bois; vous laiſſerez boüil-
lir le tout environ une demie heure:
vous en mettrez ſur une aſſiette pour
voir s’il eſt cuit, comme il a eſté dit,
puis en faites rouleaux. Pour ſe ſervir
de cet emplaſtre il faut l’étendre ſur du
cuir, de la grandeur de la dartre, puis
le chauffer un peu, & l’appliquer ſur le
mal, & le laiſſer douze heures, puis
l’arracher tout d’un coup avecque for-
ce; il emporte avecque luy la racine des
dartres. L’on mettra apres deſſus un
emplaſtre de Minium pour deſſeicher,
& rafraichir, ou quelque pommade. Il
guerit les dartres dés la premiere fois.
Emplaſtre qui fait ſortir le fer, le bois,
& les eſquilles des os de
dedans les playes.
PRenez Betoine, Fougere, Fe-
noüil, Plantain, racines & fueilles,
de chacune une poignée; faites les cui-
re dans de l’eau commune juſques à ce
qu’elles ſoient molles, & qu’il ne reſte
[ID00286]
que fort peu d’eau; puis vous les expri-
merez ſous la preſſe, & mettrez l’ex-
preſſion ſur le feu dans une terrine, avec
égale partie de miel rouge, le quart
d’huile d’olives: laiſſez boüillir douce-
ment une heure, & mettez dans cha-
que livre de ladite compoſition une
once de cire jaune neufve. Lors qu’elle
ſera fonduë, vous adjouſterez une once
d’huile de therebentine, & y ferez jet-
ter un boüillon ou deux: puis vous
oſterez de deſſus le feu, & remuerez
touſiours juſques à ce qu’il ſoit fait, &
en ferez magdaleons, ou rouleaux. Il
s’applique ſur du cuir: il le faut laiſſer
vingt-quatre heures ſur les playes avant
que de le lever: s’il ne fait point d’effect
la premiere fois; il faut en remettre une
ſeconde fois, il fera ſortir aſſeurément
ce qui ſera dans la playe.
Emplaſtre qui fait meurir toutes ſortes
de bubons??? charbons, &
apoſtemes.
PRenez Ozeille, Aigremoine, Eſ-
purge, Herbe-Robert, de chacune
[ID00287]
une poignée: pilez-les dans un mortier
de pierre, & les faites boüillir dans un
pot neuf de terre verniſſé, avec une
livre de ſain-doux l’eſpace d’une demie
heure; puis exprimez, & remettez l’ex-
preſſion ſur le feu, avec cire vierge,
ſuif de mouton, poix-raiſine, miel
rouge, de chacun quatre onces; farine
d’orge tres-fine deux onces: incorpo-
rez le tout enſemble, & remuez toû-
jours juſques à ce qu’il ſoit cuit. Ce que
vous connoiſtrez en mettant une gout-
te refroidir, comme il a eſté dit cy-
devant. Cet emplaſtre fait ſon effect en
vingt-quatre heures: il faut le changer
de douze heures en douze heures, deux
fois ſuffiſent. Il s’applique ſur du cuir.
Emplaſtre contre la douleur
des dents.
PRenez extraict de Sauge une on-
ce, Pyretre, Poivre long, Mouches
cantarides, le tout en poudre, de cha-
cun vingt grains; Euphorbe douze
grains, Therebentine de Veniſe deux
drachmes, Poix navale une drachme,
[ID00288]
Cire neufve deux drachmes. Prenez
premierement l’extraict de Sauge, &
le mettez dans un petit vaſe de terre ſur
des cendres chaudes, puis y adjouſtez
peu-à-peu la therebentine, poix, cire
& poudre, & remuez touſiours juſ-
ques à ce que le tout ſoit bien fondu &
incorporé. Apres vous l’oſterez de deſ-
ſus le feu, & en ferez rouleaux. Il faut
en faire emplaſtres ſur du cuir, & les
appliquer ſur les tempes, derriere les
oreilles, & ſur la nucque du col. Ils
feront eſlever de petites cloches, ou
empoulles, remplies d’eaux acres & pic-
quantes, leſquelles il faudra percer, &
faire ſuppurer le plus long-temps que
l’on pourra. Pour cet effect, apres les
avoir percées, l’on ſe ſervira de l’em-
plaſtre de Savon, lequel attirera, &
deſſeichera.
Emplaſtre qui guerit les playes de
la teſte.
VOvs prendrez extraict de Plan-
tain, Sauge, & Betoine, de cha-
cun une once; Poix navale, Raiſine,
Therebentine de Veniſe, de chacun
[ID00289]
deux onces: faites fondre le tout ſur
des cendres chaudes, & l’incorporez
avec une Eſpatule, & remuez touſiours
juſques à ce qu’il ſoit froid. Si les playes
ſont profondes, vous en ferez fondre
dans une cuilliere, & y tremperez de la
eharpie, que vous mettrez dans les
playes, & mettrez par deſſus une em-
plaſtre du meſme. Il faut diminuer tous
les jours la charpie: neuf jours ſuffiſent
pour cet effect.
Emplaſtre contre les duretez
de la ratte.
PRenez Cire jaune, Poix navale,
Therebentine, de chacune deux
onces; gomme Armoniac, Aloës He-
patique, Myrrhe, Opoponax, Galba-
num, de chacun une once; Maſtic de-
mie once, Safran une drachme, huile
de Laurier une once: faites fondre la
cire & poix enſemble dans une baſſi-
ne; reduiſez les gommes en poudre, &
les mettez diſſoudre dans du gros vin
rouge l’eſpace de douze heures, puis
les meſlez avec la cire & poix fonduë,
[ID00290]
& les faites boüillir à petit feu juſques
à ce que le vin ſoit conſommé, & re-
muez touſiours avec l’Eſpatule. Alors
vous oſterez la baſſine de deſſus le feu,
& y mettrez la Therebentine, l’huile
de Laurier, la Myrrhe, le Maſtic, l’A-
loës, & le Safran pulveriſez: incorpo-
rez bien le tout, & le remuez juſques à
ce qu’il ſoit froid, & en faites magda-
leons, ou rouleaux. Il faut frotter les
mains & la table d huile de laurier, de
peur que l’emplaſtre ne s’y attache. Il
diſſipe les duretez de la ratte; il fait
vuider les eaux des hydropiques, & ap-
paiſe les douleurs de la matrice. Il faut
l’étendre ſur un grand morceau de cuir,
& l’appliquer ſur le mal. Il appaiſe auſſi
les douleurs de la poitrine, & des épau-
les, mis comme deſſus.
Emplaſtre qui leve les chairs mortes,
& arreſte la gangrene.
PRenez huile d’olives deux livres,
extraict de Mille-pertuis, & There-
bentine de Veniſe, de chacune quatre
onces, Minium, C???ruſe, & Chaux vive;
[ID00291]
le tout en poudre, de chacun demie
livre, faites chauffer l’huile dans un pot
de terre verniſſé; quand elle commen-
cera à boüillir mettez la Therebentine,
& remuez avec une Eſpatule, juſques à
ce qu’elle ſoit bien fonduë; puis incor-
porcz peu-à-peu les poudres, & laiſſez
boüillir juſques à ce que le tout ſoit en
conſiſtence d’emplaſtre. Il faut remuer
touſiours juſques à ce qu’il ſoit froid,
& puis ferez rouleaux. Pour lever la
chair morte, ſi la playe eſt profonde,
il faut tremper un plumaceau dans
l’emplaſtre fondu, & le mettre dans
la playe, & mettre un autre emplaſtre
par deſſus. Pour arreſter la gangrene,
il faut ſcarifier, ou dechiqueter la playe
juſques au vif, & mettre des pluma-
ceaux comme il a eſté dit, avec un grand
emplaſtre. Il faut continuer juſques à
ce que toute la chair morte ſoit levée,
& que la chair vive revienne.
|| [ID00292]
Emplastre contre les coupures, gerſu-
res, & fiſſures.
PRenez huile roſat deux livres,
Ceruſe en poudre impalpable livre
& demie, Cire blanche quatre onces:
incorporez le tout enſemble dans un
vaiſſeau d’eſtain ſur un petit feu, juſ-
ques à ce qu’il ſoit en conſiſtence d’em-
plaſtre. Il faut remuer touſiours juſques
à ce qu’il ſoit fait: il guerit les écor-
chures, & fiſſures qui viennent aux
mammelles, aux mains, & aux talons:
il guerit toutes ſortes de couppures &
écorchures.
|| [ID00293]
Avant-propos.
I’Ay adjouſté cette Partie à
mon Livre en faveur des
Dames, pour les garantir
d’un nombre infini d’acci-
dens qui arrivent en ſe mettant des
choſes au viſage, dont elles ne ſçavent
point les compoſitions. Ie facilite les
operations, & m’explique le plus intel-
ligiblement qu’il ſe peut, pour leur
apprendre à faire elles-meſmes les cho-
ſes dont elles auront beſoin: Elles
choiſiront les Eaux & les Pommades
leſquelles leurs ſeront propres; car ce
qui eſt bon pour un teint ne l’eſt pas
pour l’autre. Il faut nourrir les teins
delicats, & les maigres, & les humecter:
c’eſt pourquoy il leur faut des Eaux de
[ID00294]
chair, & de laict, ou des pommades.
Pour les perſonnes graſſes, qui ont un
teint huileux, il les faut deſſecher; pour
cet effect les eaux où il entre quelques
acides, comme vinaigre diſtillé, ſuc de
Citron, eau de la Reine de Hongrie,
leurs ſont bonnes; & meſme pour les
teins groſſiers, qu’il faut deterger &
corroder, pour rendre la peau plus deli-
cate, elles en appliqueront ſouvent
ſur leurs viſages dans le commence-
ment pour ſe faire le teint; puis elles
l’entretiendront, & le nourriront par
quelque eau, ou pommade, ſelon
qu’elles jugeront à propos. Sur tout
je donne advis aux Dames de mettre
dans les compoſitions pour le viſage,
le moins de Camphre que l’on pourra;
car il gaſte & fait perdre les dents, &
cauſe quantité de fluxions. Pour le
Mercure, le Sublimé, & l’Eſtain de
gſace, je conſeille de ne s’en ſervir en
aucune façon; outre qu’ils effacent la
beauté du viſage par le long uſage, ils
produiſent des maladies tres-faſcheu-
ſes, & quelquefois incurables: C’eſt à
quoy les Dames doivent prendre gar [ID00295] de.
Ie donne encore quantité de ſecrets
& d’operations pour l’embelliſſement
tant pour les cheveux, les dents & les
mains, que pour accommoder des
gands, des mouchoirs, & des cornet-
tes de jour & de nuict, & faire les dou-
blures de maſque. Ie donne meſme
la methode de faire des ptiſanes pour
engraiſſer, dormir, & conſerver l’em-
bonpoint. Dans ma Preface je me ſuis
offerte à montrer à faire les operations
que j’enſeigne; je le reïtere encore,
& feray moy-meſme les choſes dont
on aura beſoin. Ie me ſuis reſervée
quelques ſecrets, que je promets de
de mettre au jour, ſi les Dames reçoi-
vent d’auſſi bon cœur mon petit tra-
vail, que je leur communique.
|| [ID00296]
Des Eaux ſimples diſtillées pour l’em-
beliſſement du viſage.
LEs Simples deſquels on tire des
eaux pour le viſage ſont Plantain,
Argentine, Nenuphar, grande Ortie,
Couleuvrée; les fueilles deſquels doi-
vent eſtre pilées, fermentées, expri-
mées, & diſtillées au Bain-Marie. Il
faut expoſer leſdites eaux au ſoleil pour
les garder.Pour les fleurs, il les faut mettre
toutes fraiches cueillies dans une Cu-
curbite, puis les diſtiller au Bain-Ma-
rie, ſans leur donner de menſtruë: il
ſuffit de les preſſer un peu. L’on prend
pour l’ordinaire des fleurs de Roſma-
rin, d’Amandier, de Peſcher, de Febves,
de Sureau, de Muguet, de Tillet, de
Lis, & Guimauves.Les eaux que l’on diſtille des fruicts
pour le viſage, ſont Noix vertes, Frai-
ſes, Citrons, Melons, Concombres,
[ID00297]
Citroüilles, & Courges. Il faut piler
les Fraiſes, & couper les autres par
tranches, puis les diſtiller au Bain.
Chacune de ces eaux a ſes proprietez:
L’on s’en ſervira comme l’on jugera à
propos.
Eau de la Reine de Hongrie.
CEtte eau porte le nom d’vne ve-
nerable Princeſſe, laquelle s’en eſt
ſervie heureuſement, comme elle le
teſmoigne par ſes eſcrits, qui ont eſté
trouvez apres ſa mort, dont voicy la
veritable copie.En la Cité de Budes au Royaume de
Hongrie, du douzieſme d’Octobre
mil ſix cens cinquante deux, ſe trouva
eſcrite la preſente recepte dans le Bre-
viaire de la Sereniſſime Iſabelle Reine
dudit Royaume.Nous Dona Iſabelle Reine de Hon-
grie, eſtant âgée de ſoixante & douze
ans, fort infirme & gouteuſe, ayant uſé
[ID00298]
un an entier de la ſuivante recepte, la-
quelle j obtins d’un Hermite que je
n’avois jamais veu, & n’ay pû voir on-
ques depuis; qui fit tant d’effect en
mon endroit, qu’en meſme temps je
gueris, & recouvré mesforces; en ſor-
te que paroiſſant belle à un chacun, le
Roy de Pologne voulut m’eſpouſer:
ce que je refuſay pour l’amour de mon
Seigneur Iesvs-Christ, & de l’Ange
duquel je croy que j’obtins cette rece-
pte, qui eſt de l’eau de vie diſtillée qua-
tre fois, deux livres; des cimes & fleurs
de Roſmarin vingt-deux onces, que
l’on mettra dans un vaſe bien bouché
l’eſpace de cinquante heures; & puis
mettre le tout dans un Alembic pour
diſtiller au Bain-Marie. On en prendra
le matin une fois la ſemaine le poids
d’une drachme, dans un boüillon fait
de viande: on s’en lavera la face tous
les matins; & on s’en frottera le mal,
ou les membres infirmes.Ce remede renouvelle les forces, &
fait bon eſprit, nettoye toutes les macu-
les du cuir, fortifie les eſprits vitaux en
leur naturel, reſtituë la veuë, & la con [ID00299] ſerve,
alonge la vie: il eſt excellent
pour l’eſtomac, & pour la poitrine, en
s’en frottant par deſſus. Tout ce que
deſſus je l’ay tiré d’un livre tout eſcrit
de la main de ſa Maieſté l’Imperatrice
Dona Maria, fille de l’Empereur Char-
les Quint; lequel apres ſa mort me fut
repreſenté par une de ſes Demoiſelles
qui l’avoit en ſon pouvoir, & l’ay copié
de ma main dautant qu’il y avoit d’au-
tres ſecrets. L’Original porte ce que
deſſus. Quand on ſe ſervira du preſent
remede il ne le faut pas faire chauffer,
parceque les eſprits les plus ſubtils s’e-
vaporeroient.
Eau de Chair.
PRenez quatre pieds de veau, deſ-
quels vous oſterez les os, & les met-
trez tremper neuf jours dans de l’eau de
[ID00300]
fontaine, que vous changerez deux fois
le jour: puis vous les mettrez dans une
Cucurbite de verre, avec le blanc & les
cocques de deux douzaines d’œufs
frais, la mie d’un petit pain de chapi-
tre mis en poudre, une roüelle de veau
bien lavée, dégraiſſée, deſoſſée, &
coupée par morceaux, un poulet écor-
ché tout vif, duquel vous oſterez la
teſte, les pieds, & les entrailles: un
Citron coupé par tranches, trois cho-
pines de laict de chevre, quatre petits
chiens nais d’un jour ou deux: diſtillez
le tout au Bain boüillant, juſques à ce
qu’il ne monte plus rien. Il faut pour le
moins trois jours & trois nuicts ſans
diſcontinuer le feu pour faire cette ope-
ration. Vous mettrez l’eau diſtillée au
ſoleil, autrement elle ne ſe garderoit
pas.Cette eau eſt parfaitement bonne
pour nourrir & conſerver les teins deli-
cats: il en faut mettre trois ou quatre
fois la ſemaine, le ſoir en ſe mettant au
lict, & s’eſſuyer le matin avec un linge
blanc de leſſive.
|| [ID00301]
Eau pour conſerver le teint.
PRenez deux livres de fleur de feb-
ves, une livre de fleur de Iaſmin,
deux onces de Borax: mettez le tout
dans une Cucurbite; verſez deſſus une
chopine d’eſprit de vin; laiſſez-le infu-
ſer une nuict, puis diſtillez juſques à ce
qu’il ne reſte plus d’humidité au fond
du vaiſſeau: expoſez l’eau diſtillée qua-
rante jours au ſoleil. Elle empeſche les
rouſſeurs de venir: elle tient le teint
frais, le nourrit, & le conſerve.
Autre eau pour conſerver le teint.
PRenez quatre livres d’orge mon-
dé, & bien lavé; faites-les cuire dans
ſuffiſante quantité de laict de chevre,
juſques à ce qu’il ſoit comme de la
boüillie: alors mettez encore une pinte
dudit laict de chevre, deux onces de
ſucre blanc, deux onces de ſucre rouge;
puis diſtillez le tout au Bain-Marie à
feu boüillant. Cette diſtillation eſt un
peu longue pour le peu que l’on tire
d’eau. Il faut touſiours continuer ſon
feu, & remettre de l’eau chaude au
[ID00302]
Bain. Il faut ſe laver ſouvent le viſage
de cette eau: elle eſt excellente pour les
teins fins, delicats, & pour les perſon-
nes maigres.
Eau pour conſerver & blanchir
le teint.
PRenez un Chapon bien gias, du-
quel vous oſterez la peau, la teſte,
les pieds, & tout ce qui ſera dans ſon
corps: coupez-le par morceaux, & le
mettez dans une Cucurbite, avec un
fromage de creſme douce, le blanc &
cocques de ſix œufs frais, deux drach-
mes de Ceruſe, une once de Borax, &
un demy ſeptier d’eſprit de vin; puis
diſtillez au Bain-Marie. Il faut mettre
ſouvent de cette eau pour embellir, &
nourrir la peau, & ſe donner de garde
du grand air.
Eau pour embellir le teint.
VOvs prendrez un Melon à demy
meur, & le couperez par roüelles,
& en ferez un lict dans une Cucurbite,
& mettrez deſſus un lict de ſucre, & un
[ID00303]
de baume noir, & ferez lict ſur lict de
ces trois choſes: apres vous diſtillerez au
Bain boüillant. Cette eau eſt admira-
ble pour blanchir, & nourrir le teint.
Il faut en mettre ſouvent dans le com-
mencement: apres une fois ou deux la
ſemaine ſuffiſent.
Eau de lard.
IL faut prendre du lard de la gorge
d’un porc maſle, qui ſoit bien gras,
deux livres; coupez-le par morceaux,
& le mettez dans la Cucurbite, avec
deux poignées d’avoine blanche bien
nette, deux onces de ſemence de Ba-
leine; apres diſtillez au Bain boüillant.
Cette eau eſt excellente pour nourrir
le teint des perſonnes maigres, & pour
oſter les marques & rougeurs de la pe-
tite verolle, & autres. Il en faut met-
tre ſoir & matin, & ne point s’eſſuyer
que deux ou trois heures apres l’avoir
miſe, & continuer un mois.
|| [ID00304]
Eau pour rafraichir, & blanchir
le viſage.
PRenez trois chopines de laict de
vache, trois chopines de vin blanc,
le blanc & les cocques de deux douzai-
nes d’œufs frais, la mie d’un petit pain
de Chapitre, une poignée d’orge mon-
dé, une roüelle de veau coupée par
morceaux, trois ou quatre oignons de
lys: diſtillez le tout au Bain boüillant,
& vous en metttez tous les ſoirs ſu rle
viſage, ſans l’eſſuyer que le matin, auec
un linge de chanvre.
Eau contre les rougeurs du viſage, &
qui nettoye le cuir.
VOvs prendrez deux onces de fleurs
de Soufre, & les ferez infuſer trois
jours dans une chopine de vinaigre
blanc: apres diſtillerez par la Cornuë
au feu de cendres, & tremperez un
linge dans cette eau, & le mettrez ſur
le viſage. Il l’y faut laiſſer toute la nuict,
& continuer juſques à ce que toutes les
rougeurs ſoient parties.
|| [ID00305]
Eau pour les teins großiers.
PRenez une douzaine de Citrons
qui ayent les écorces fines, les blancs
d’une douzaine d’œufs frais durcis’,
deſquels l’on oſtera les jaunes: coupez
les Citrons & blancs d’œufs par roüel-
les, & les mettez dans une Cucurbite
de verre, au fond de laquelle vous au-
rez mis une livre de Therebentine de
Veniſe bien lavée; puis diſtillez au Bain
boüillant, & mettez l’eau qui viendra
au ſoleil. Cette eau deterge & adoucit
le cuir, & le blanchit. Il faut s’en laver
ſoir & matin.
Autre eau ponr les teins großiers.
IL faut prendre une livre de fleurs
d’Amandiers ſeichées à l’ombre, de-
mie livre de fleurs de Courge, une livre
de fleurs de Lys, ſix Citrons coupez
par tranches, les blancs & les cocques
de deux douzaines d’œufs frais, une
chopine de vin blanc: laiſſez infuſer le
tout une nuict, puis diſtillez au Bain
boüillant juſques à ce que les feces de-
meurent ſeiches. Cette eau unit le teint,
[ID00306]
& rend la peau blanche, & delicate. Il
la faut mettre le ſoir, & s’eſſuyer le
viſage doucement le matin.
Autre eau pour les teins großiers.
PRenez vinaigre blanc une livre,
les blancs & les cocques de ſix
œufs frais, Borax, Maſtic, Aloës, de
chacun un once; un fiel de bœuf: puis
diſtillez au Bain, & vous lavez un mois
entier le viſage & la gorge de cette eau:
apres n’en mettez plus que deux fois la
ſemaine.
Eau qui leve le hâle, & oſte les rou-
geurs du viſage.
PRenez Plantain, Nenuphar, Pour-
pier, Laictuë & Violiers, de chacun
deux poignées; douze pommes de
Cheſne, fleurs de Boüillon-blanc deux
onces, plein un petit pannier de Frai-
ſes, unc poignée de Roſes paſles, ſe-
mence de Pavot ſix onces: pilez le tout
enſemble, & le mettez dans une Cu-
curbite, avec les blancs & les cocques
de douze œufs frais, & une livre de
verjus; diſtillez le tout au Bain. Il faut
[ID00307]
tremper un linge dans cette eau, & le
mettre le ſoir ſur le viſage, & l’y laiſſer
toute la nuict; puis s’eſſuyer le matin
doucement, & continuer. Elle oſte le
hâle, & diſſipe les rougeurs.
Eau contre les dartres farineuſes, &
inegalité ou âpreté de la peau, &
qui unit le teint.
PRenez fleurs de Roſes & de Febves,
de chacune deux poignées; vinaigre
blanc une livre, urine d’une jeune per-
ſonne qui ne boive que du vin une li-
vre, ſuc de Plantain demie livre, Ma-
ſtic, Borax, gomme Adragant, de cha-
cun demie once: faites infuſer le tout
trois jours, puis diſtill ez au Bain boüil-
lant. Il faut mettre de cette eau ſoir &
matin ſur les dartres, & s’en laver le
viſage une fois la ſemaine.
Eau contre les tannes du viſage.
PRenez Tartre blanc, Alun de ro-
che reduis en poudre, de chacun
demie livre; farines d’orge & de feb-
ves demie livre; vinaigre blanc une
[ID00308]
livre: diſtillez par la Cornuë au feu de
ſable; trempez un linge dans cette eau,
& le mettez ſur le lieu où ſont les tan-
nes, & l’y laiſſez toute la nuict, & con-
tinuez juſques à ce qu’il ne paroiſſe plus
de tannes.
E au contre les rouſſeurs & lentilles
du viſage.
PRenez fueilles & fruicts de Fi-
guier, lors qu’ils ſont encore verds,
vne livre, Amandes ameres demie li-
vre, graine de Choux ſix onces: pilez
le tout, & l’incorporez avec dix onces
d’huile de Tartre faite par defaillance;
puis diſtillez par la Cornuë au feu de
ſable. Cette eau oſte les lentilles &
rouſſeurs du viſage. Il faut continuer
quinze jours de ſuite tous les ſoirs.
Eau contre les rides du viſage.
PRenez ſuc de Prunelle une livre,
racines de Coulevrée bien pilées
demie livre, Myrrhe ſix onces, ſucre
Candi quatre onces: diſtillez par la
Cornuë au feu de cendres, & vous
[ID00309]
lavez de cetre eau. Elle tend la peau,
nettoye le cuir, & oſte les rides. L’eau
de pommes de Pin, diſtillées au Bain,
fait le meſme effect.
Eau pour les teins jaunes &
bilieux.
PRenez deux livres de fleurs de Su-
reau, & les mettez infuſer dans deux
livres d’eſprit de vin vingt-quatre heu-
res, puis diſtillez au Bain chaud: reï-
terez deux fois la diſtillation ſur les
feces, & vous lavez ſoir & matin de
l’eau qui diſtillera.
Eau pour oster les rougeurs du
viſage.
PRenez deux douzaines d’œufs frais,
& les faites durcir dans les cendres
chaudes, deſquels vous prendrez les
jaunes, que vous meſlerez avec une
demie livre de Ceruſe reduite en pou-
dre ſubtile, & les imbiberez d’une cho-
pine de vin blanc; puis vous les expri-
merez ſous la preſſe, & diſtillerez la
liqueur qui ſortira au Bain-Marie. De
[ID00310]
l’eau qui diſtillera vous vous en laverez
les rougeurs tous les ſoirs.
Eau pour faire paſlir le viſage.
VOvs prendrez deux poignées
d’Eſpargoute, une chopine de vin
d’Orleans, deux douzaines de Citrons
coupez par tranches, le blanc & les
cocques de douze œufs frais, quatre
onces de ſucre Candi, la mie d’un petit
pain de Chapitre, trois poignées de
fueilles de Plantain: diſtillez le tout
au Bain boüillant juſques à ce que le
tout ſoit diſtillé: & de cette eau vous
vous laverez ſoir & matin le viſage.
Autre eau pour le meſme.
PRenez Plantain, & fleurs de Mu-
guet, de chacune deux poignées;
verſez deſſus une chopine de vin
blanc, & faites digerer vingt-quatre
heures au Bain; apres diſtillez. De cet-
te eau lavez-vous tous les ſoirs. Elle
pâlit, & unit la peau.
|| [ID00311]
Eau contre les cicatrices, & marques
de la petite verolle.
PRenez racines de Concombres
ſauvages, & de Flambe, de chacune
demie livre; racines de Guimauves, &
oignons de Lys blancs, de chacun une
livre; Raiſins murs demie livre, fueil-
les de Febves, & de Parietaire, de cha-
cune une poignée; fleurs de Nenuphar
& de Mauves, de chacune deux poi-
gnées; mie de pain d’orge une livre:
faites infuſer le tout dans une pinte de
vin blanc, & une pinte de laict de Che-
vre: vous adjouſterez à l’infuſion une
Rave coupée par roüelles, des quatre
ſemences froides, de chacune une de-
mie once; urine d’une jeune fille de
neuf à dix ans, demie livre: diſtillez le
tout au Bain boüillant. Cette eau eſt
excellente contre toutes ſortes de ta-
ches qui viennent au viſage; elle leve
les cicatrices, & efface les marques de
la petite verolle, & de bruſlures.
|| [ID00312]
Eau qui blanchit le viſage.
VOvs prendrez les cocques de
douze œufs frais, eau de pleurs
de vigne une livre, ſel commun une
once, eau de fontaine demie livre: di-
ſtillez le tout par la Cornuë au feu de
ſable. Cette eau corrode la peau, & rend
le teint blanc & delicat. Il en faut met-
tre pendant huit jours ſoir & matin;
puis l’on n’en mettra plus qu’une fois la
ſemaine.
Eau contre les rouſſeurs, & rougeurs
du viſage.
PRenez vinaigre blanc, eau-roſe,
& ſuc de limon, de chacun une li-
mon, Soufre vif en poudre quatre on-
ces: diſtillez le tout par la Cornuë à feu
de rouë. Il faut laver ſouvent les rouſ-
ſeurs & rougeurs de certe eau, & met-
tre un liuge trempé dedans ſur le viſa-
ge pendant la nuict.
|| [ID00313]
Eau contre les dartres du viſage.
VOvs prendrez eaux de Roſes, de
Morelle, de Plantain, & vinai-
gre blanc, de chacun demie livre: fai-
tes diſſoudre dedans ſel commun pre-
paré, & ſel Armoniac, de chacun de-
mie once; puis diſtillez par la Cornuë
au feu de ſable, & cohobez deux fois:
ſur la fin faites un feu fort, pour faire
monter les eſprits des ſels, & du vinai-
gre. Il faut appliquer cette eau avec une
plume ſur les dartres, & en mettre trois
ou quatre fois le jour.
Eau contre les rouſſeurs du viſage.
PRenez ſnc de Limon trois onces,
vinaigre blanc, quatre onces, Alun
en poudre une livre, fiel de beuf de-
mie livre: diſtillez le tout au Bain
boüillant, & appliquez l’eau qui di-
ſtillera avec une plume ſur les rouf-
ſeurs.
|| [ID00314]
Fau qui leve toutes ſortes de
cicatrices.
PRenez ſucs de Morelle, & Cou-
levrée, de chacun demie livre; di-
ſtillez les au Bain boüillant: faites diſ-
ſoudre dans l’eau diſtillée une drachme
de Camphre, puis en mettez ſur les ci-
catricesavec une plume trois ou quatre
fois le jour.
Eau pour fortifier, & embellir
tout le corps.
PRenez fleurs de Sureau, & d’Eſ-
pine blanche, de chacune deux li-
vres, fleurs de Febves de haricot une
livre, moüelle de Citroüille livre & de-
mie, Borax trois onces, Therebentine
de Veniſe une livre, quatre Pigeon-
neaux écorchez, & coupez par mor-
ceaux, Miel de Narbonne livre & de-
mie, laict de Chevre trois livres, les
blancs & les cocques de vingt œufs
frais, quatre Citrons coupez par roüel-
les, ſucre Candi demie livre, Canelle
& cloud de Girofle, de chacun demie
once: pilez ce qui ſe pourra piler, &
[ID00315]
mettez le tout dans une Cucurbite de
verre, & diſtillez au Bain à l’eau chau-
de du commencement, puis ſur la fin
de la diſtillation faites boüillir le Bain.
Cette eau fortifie & embellit le corps,
& le preſerve de pluſieurs maladies: Il
eſt bon de s’en laver tout le corps dans
le commencement du Printemps, &
ſur la fin de l’Automne. Pour le viſage
il faut s’en frottet une fois la ſemaine le
ſoir en ſe couchant, & le matin en ſe
levant s’eſſuyer avec un linge blanc de
leſſive.
Eau pour les teins großiers, & contre
les tannes.
VOvs prendrez eau de vie vne
livre, fleurs de Soufre deux onces,
fruicts de Meurier ſauvage, autrement
appellé fruicts de Ronce, une livre: fai-
tes infuſer le tout vingt-quatre heures
ſur des cendres chaudes dans une Cor-
nuë de verre; puis diſtillez au feu de
limaille de fer juſques à ce qu’il ne ſorte
plus de fumée. Il faut metrre ſoir &
matin de cette eau ſur le viſage, & ſur
les tannes, & continuer juſques à ce
[ID00316]
que le teint ſoit blanc & uni, & que les
tannes ſoient toutes diſſipées.
Eau pour laver & nourrir les teins qui
auront eſté corodez par l’eau
precedente.
PRenez oignons de Lys, racines
de Nenuphar, Concombres & Me-
lons, le tout coupé par tranches, de
chacun demie livre, ſix Pigeonneaux
tuez ſans les ſeigner, deſquels vous oſte-
rez la peau, & les entrailles, & les
couperez par morceaux; ſucre fin qua-
tre onces, Borax & Camphre, de cha-
cun une drachme; la mie d’vn petit
pain de Chapitre: faites infuſer le tout
vingt-quatre heures au Bain dans deux
livres de vin blanc, puis diſtillez au
Bain boüillant juſques à ce qu’il ne
monte plus rien. Quand on veut rendte
les eaux de bonne odeur, il faut met-
tre dans le canal de l’Alembic quelques
grains de muſc, ou d’ambre gris, dans
un petit ſachet de toile, avec un peu
de ſucre; autrement l’ambre & le muſc
ne ſe diſſoudroient p???s. Il faut mettre
[ID00317]
de cette eau ſur le viſage deux ou trois
fois la ſemaine, le ſoir en ſe mettant au
lict, ſans s’eſſuyer que le lendemain au
matin.
Huile de Talc.
PLvsievrs aſſeurent qu’ils ſça-
vent extraire l’huile du Talc ſans
addition; cette operation n’eſt pas ſi
commune, ny ſi facile comme ils le di-
ſent: Ie croy que peu de perſonnes
ſçavent ce ſecret, & qu’il eſt fort rare.
Voicy quelques methodes de preparer
le Talc, qui ſont bonnes pour le teint,
& ſont faciles à faire, & je puis aſſeurer
que leur effect eſt tres-bon.Prenez ttois ou quatre douzaines
d’œufs frais, que vous ferez durcir, & en
oſterez les cocques, & les couperez par
la moitié, tirerez les jaunes, & mettrez
en leur plaee du Talc de Veniſe pulve [ID00318] riſé,
& tamiſé; puis vous rejoindrez les
deux moitiez enſemble, & les lierez
avec du fil blanc, & mettrez quelque
peu de cire d’Eſpagne deſſus le fil, vis-
à-vis des jointures pour les faire tenir:
vous rangerez tous les œufs, ainſi ac-
commodez, dans une Cucurbite de ver-
re, & la couvrirez d’une autre petite
Cucurbite: vous les lutterez enſemble
avec de la chaux vive, & du blanc
d’œuf; puis les mettrez dans du fumier
de cheval, de façon qu’elles ſoient en-
tourées de toutes parts de l’époiſſeur
d’un pied dudit fumier. Lors que le fu-
mier commencera à ſe refroidir, il fau-
dra le renouveller: & pour l’exciter il
faut l’arrouſer quelquefois avec un peu
d’eau chaude. Vous laiſſerez vos vaiſ-
ſeaux quarante jours dans le fumier, au
bout deſquels l’on trouvera dans le
fond une liqueur onctueuſe comme de
de l’huile; de laquelle on mettra le ſoir
ſur le viſage ſans l’eſſuyer que le matin
avec un linge jaune qui aura eſté à la
leſſive. Ie n’oſe aſſeurer que ce ſoit ve-
ritablement huile de Talc, mais je puis
dire certainement qu’elle eſt tres-bon [ID00319] ne,
& tres-excellente pour le teint, &
que l’on s’en peut ſervir avec aſſeuran-
ce. Si l’on la veut rendre claire, il fau-
dra la filtrer par le papier gris.
Autre huile de Talc.
VOvs prendrez du Talc de Veniſe
pulveriſé quatre onces, une livre
de paſte de farine de froment, de la-
quelle vous ferez trente-deux mor-
ceaux, & mettrez au milieu de chaque
motceau un gros dudit Talc en poudre,
& l’entourerez de ladite paſte en for-
me d’un petit pain. Vous mettrez tous
les petits pains au four à cuire avec du
grand pain. Quand ils ſeront cuits vous
les ouvrirez, & prendrez le Talc qui
ſera au milieu, que vous pulveriſerez;
puis vous prendrez des racines de Cou-
levrées, auſquelles vous ferez des creux
de la profondeur de quatre do gts, que
vous remplirez d’un tiers du Talc que
vous avez pulveriſé. Apres vous met-
trez toutes vos racines ainſi remplies à
la cave, & les y laiſſerez vingt-quatre
heures; au bout deſquelles vous les
trouverez rempli???s d’une liqueur que
[ID00320]
vous oſterez par inclination, & laiſſe-
rez autres vingt-quatre heures, & con-
tinuerez juſques à ce qu’elles ne ren-
dent plus d’humidité. Il faut que les ra-
cines ſoient fraichement cueillies. Cet-
te huile a les meſmes vertus que la pre-
cedente.
Autre huile de Talc.
PRenez quatre onces de Talc pul-
veriſé, & les mettez avec partie égale
de ſalpetre dans un Creuſet au milieu
des charbons ardans. Lors que le ſalpe-
tre ſera conſommé, vous en remettrez
d’autre, & reïtererez cinq ou ſix fois,
puis laiſſez refroidir. Prenez la maſſe
qui ſera dans le Creuſet, & la reduiſez
en poudre, & la mettez dans un petit
ſachet de toile, que vous ſuſpendrez
à la cave, & mettrez un vaiſſeau deſſous
pour recevoir la liqueur qui tombera
par defaillance. Il faut en mettre tou-
tes les ſemaines une fois en ſe mettant
au lict. Elle blanchit & nettoye le cuir
de to utes ſortes de taches.
|| [ID00321]
Eau de Talc.
PRenez dans le mois de May telle
quantité de limaſſons avec leurs coc-
ques qu’il vous plaira, & les mettez
dans un pot de terre avec une poignée
de ſel, & du vinaigre tant, qu’il ſur-
paſſe les limaſſons d’vn doigt: agitez
le tout enſemble pour les faire dégor-
ger, & jetter leurs mouſſes: puis oſtez-
les, & les lavez trois ou quatre fois de
ſuite dans du vin blanc; puis les eſſuyez
avec un linge blanc, & les mettez
dans un pot de terre verniſſé. Donnez-
leur tous les jours, durant trois mois,
une cuillerée de poudre de Talc tami-
ſée, & les remuer quelquefois, & fai-
tes deſcendre ceux qui monteront, &
couvrez le pot. S’il ſe fait quelque pe-
tite pelicule à l’ouverture de leurs coc-
ques, il n’imporre. Apres trois mois
prenez les limaſſons, & tout ce qui ſera
dans le pot; pilez le tout, & auſſi les
cocques, & les mettez dans une Cu-
curbite de verre, & diſtillez au Bain
boüillant juſques à ce que toutes les fe-
ces ſoient tout-à-fait ſeiches: oſtez les
[ID00322]
feces, & rectifiez l’eau deux fois au
Bain: à la derniere fois, mettez dans
le canal du Chapiteau du muſc, ou de
l’ambre gris dans un petit ſachet, avec
du ſucre, comme il a eſté dit cy-devant,
pour corriger la mauvaiſe odeur de cet-
te eau. Elle eſt admirable pour blan-
chir, unir, & tendre la peau. Il faut la
mettre apres s’eſtre decraſſée avec quel-
que bonne eau, & un petit linge fin,
& la laiſſer ſeicher, puis s’eſſuyer dou-
cement.
Pommade de Chevreau.
PRenez coeffes de Chevreau une
livre, & les lavez dans de l’eau de
fontaine vingt ou trente fois de ſuite,
& les y laiſſez tremper cinq ou ſix jours,
& changez d’eau deux fois le jour, juſ-
ques à ce qu’elles rendent l’eau claire,
& qu’elles ſoient bien nettes: égoutez [ID00323] les
dans un linge blanc, & les coupez
par petits morceaux, & les mettez
dans une terrine neufve verniſſée, avec
une chopine d’Eau-roſe, un Citron
coupé par tranches, deux cuillerées
d’eau de cloud de Girofle; Storax, &
Benjoüin, de chacun une once: faites
boüillir le tout enſemble à petit feu,
juſques à ce que la graiſſe ſoit toute
fonduë. Alors paſſez par un linge bien
net, un peu épois, ce qui ſera dans la
terrine dans une autre terrine, dans
laquelle il y aura une chopine d’Eau-
roſe. Il ne faut point exprimer: quand
la coulature ſera froide vous leverez la
graiſſe avec une cuilliere d’argent, &
la mettrez dans un mortier de marbre,
& la laverez encore une fois ou deux,
avec de l’Eau-roſe, ou eau de fleurs
d’Oranges; puis vous la pilerez juſques
à ce qu’elle ſoit parfaitement blanche:
apres quoy vous la ſerrerez dans un
pot de fayence bien net, & mettrez par
deſſus l’époiſſeur d’un demy doigt de
ſucre fin en poudre, pour la conſerver.
Toutes les pommades où il n’entre
point d’huile ſe peuvent conſerver de
[ID00324]
la ſorte. Elle nourrit le teint; elle oſte
les rides du viſage; elle guerit les éle-
vures, & les lévres fenduës & ger-
ſées.
Pommade pour tenir le teint frais
& uny.
VOvs prendrez beure de May, &
ſuif de Taureau, de chacun demie
livre: faites les fondre enſemble dans un
pot neuf, avec un demy ſeptier d’Eau-
roſe, puis les paſſez dans un linge dans
un autre pot où il y aura demy ſeptier
d’Eau-roſe. Quand le tout ſera froid,
vous le leverez avec une cuilliere, &
le mettrez dans un mortier de marbre,
& incorporerez avecque ſix onces de
Ceruſebien lavée pluſieurs fois dans de
l’Eau-roſe, & ſeichée au ſoleil, & re-
duite en poudre impalpable; puis la
ſerrez dans un pot bien net, & met-
tez du ſucre par-deſſus, comme il a
eſté dit. Vous mettrez ſoir & matin de
cette pommade, & vous eſſuyerez une
heure apres l’avoir miſe.
|| [ID00325]
Pommade pour nourrir le teint, &
contre les marques de la
petite verolle.
PRenez deux livres de lard bien
gras de la gorge d’un porc maſle,
ratiſſez-le avec un couteau de bois, &
en oſtez tous les petites fibres & mem-
branes: prenez demie livre de graiſſe
de porc, de laquelle vous oſterez tou-
tes les petites peaux, & la couperez par
morceaux. Mettez-les tremper neuf
jours dans de l’eau de riviere, qu’il
faut changer deux fois le jour, & les
bien manier avec les mains quand l’on
changera l’eau; puis faites les fondre
dans une terrine avec Eau-roſe, & eau
de Plantain, de chacune demie livre,
deux cuillerées d’eau de Girofle, un
Citron, & une Orange coupée par
tranches; ſix pommes de Capendu
pelées & pilées dans un mortier de mar-
bre, deſquelles on aura oſté le cœur;
Iris de Florence coupée par tranches
deux onces: couvrez le pot, & le met-
tez infuſer vingt quatre heures au Bain
[ID00326]
tiede; puis faites boüillir l’eau au Bain???
de ſorte que ce qui ſera dans le pot
boüille auſſi. Il faut remuer de temps
en temps les drogues avec une Eſpatule
de bois; & lors que vous jugerez que
l’Eau-roſe, & eau de Plantain ſeront
conſommées, oſtez le vaiſſeau du feu,
& paſſez par un linge blanc un peu
épois dans une terrine où il y aura demy
ſeptier d’Eau-roſe; laiſſez refroidir,
puis levez avec une cuilliere ce qui ſera
ſur l’eau, & le mettez dans une terrine
ſur petit feu, avec ſix onces d’huile
d’Amandes douces tirée ſans feu: mé-
lez bien le tout enſemble juſques à ce
que la pommade ſoit fouduë, oſtez-la
de deſſus le feu, & remuez juſques à ce
que le tout ſoit froid: puis vous la pile-
rez dans un mortier de marbre, juſques
à ce qu’elle ſoit bien blanche; puis vous
la mettrez dans un pot en lieu temperé,
& vetſerez de l’eau de riviere par deſ-
ſus, que vous changerez pour le plus
tard de deux jours en deux jours. Il eſt
à remarquer que toutes les pommades
ſe veulent faire tres-proprement & net-
tement quand on les veut garder, &
[ID00327]
qu’il n’y a point d’huile dans la compo-
ſition. Il faut mettre du ſucre comme
j’ay dit; & dans celle où il entre de
l’huile, il faut la faire tremper dans
quelque bonne eau, comme de Roſe,
Plantain, Argentine, ou Fraiſe. Cette
pommade nourrit le teint, & le blan-
chit: elle eſt bonne pour les perſonnes
maigres; elle efface les rougeurs de la
petite verolle, & diſſipe les éleveures
qui viennent au viſage. Il en faut mettre
ſoir & matin.
Pommade excellente qui ſe fait dans
le mois de May.
PRenez une livre de beure frais du
mois de May, du plus gras que vous
pourrez trouver; mettez-le dans un
vaiſſeau de fayence un peu large, &
l’expoſez au ſoleil en lieu où il donne
preſque tout le jour, & d’où il ne puiſſe
point tomber d’ordures: quand le beu-
re ſera fondu, verſez deſſus de l’eau de
Plantain, & la meſlez bien avec une
Eſpatule de bois: Et lors que le ſoleil
anra diſſipé l’eau, vous en remettrez
[ID00328]
d’autre, & remuerez cinq ou ſix fois
jour, & continuerez à faire ce que deſ-
ſus, juſques à ce que le beure ſoit deve-
nu blanc comme de la neige. Si le ſoleil
n’eſtoit pas aſſez chaud dans le mois de
May, il faut continuer dans le mois de
Iuin juſques à perfection. Sur les der-
niers jours vous mettrez de l’eau de
fleurs d’Orange, ou de Roſe, pour
donner bonne odeur à la pommade.
Elle ſe conſerve pluſieurs années ſans
ſe gaſter: elle eſt excellente pour blan-
chir, nourrir, & conſerver le teint. Il
la faut mettre le ſoir, & s’eſſuyer le
matin avec un linge de chanvre neuf.
Pommade de pieds de mouton.
VOvs prendrez cinq ou ſix dou-
zaines de pieds de mouton, deux
ou trois jours devant la pleine lune;
vous en oſterez toute la chair, & caſſe-
rez les os, que vous mettrez boüillir
dans de l’Eau-roſe, ou du vin blanc; au
defaut de l’eau de riviere, environ un
quart d’heure dans un pot neuf ver-
niſſé: puis vous paſſerez par un linge
dans un pot où il y aura une demie livre
[ID00329]
d’Eau-roſe: laiſſez refroidir la coulatu-
re, & lors qu’elle ſera froide vous leve-
rez la graiſſe de deſſus l’eau avec une
cuilliere; puis vous la laverez cinq ou
ſix fois avec de l’Eau-roſe, & la pilerez
dans un mortier de marbre juſques à
ce qu’elle ſoit parfaitement blanche:
alors vous l’incorporerez avec une troi-
ſieſme partie de ſon poids d’huile des
quatre ſemences froides tirée ſans feu;
le tout eſtant bien meſlé enſemble vous
mettrez cette pommade dans un vaſe
bien propre & net, & verſerez deſſus
quelque eau odoriferante, ou au defaut
de l’eau commune: il faut la changer
ſouvent comme il a eſté dit. Il faut met-
tre de cette pommade deux ou trois
fois la ſemaine. Son uſage & ſes vettus
ſont aſſez connuës, c’eſt pourquoy je
n’en diray pas dauantage. Pour la chair
que vous avez oſtée des os, vous la fe-
rez boüillir comme vous avez fait les
os; il s’y trouvera peu de graiſſe, elle
ne laiſſe pas d’eſtre auſſi bonne que la
premiere.
|| [ID00330]
Autre pommade excellente.
PRenez une once de perles fines
bien blanches, & concaſſez les dans
un mortier, & les mettez dans un vaiſ-
ſeau de verre; verſez deſſus du vinaigre
blanc diſtillé, qu’il ſurnage de deux
doigts: mettez le vaiſſeau ſur des cen-
dres chaudes pour aider la diſſolution
deſdites perles. Lors qu’elles ſeront
diſſoutes vous verſerez le vinaigre par
inclination, & laverez la diſſolution
deux ou trois fois avec de l’eau de fleurs
d’Orange, ou de Roſe; puis vous l’in-
corporerez avec deux parts de la pom-
made de pieds de mouton cy-deſſus.
Au defaut de la diſſolution de perles,
l’on pourra meſler avec ladite pomma-
de du Talc de Veniſe reduit en poudre
impalpable. Cette pommade s’appli-
que ſoir & matin, & eſt fort excel-
lente.
Autre pommade excellente.
VOvs prendrez une douzaine de
pommes de Reinette, & les pele-
rez, & en oſterez toutes les pepinieres,
[ID00331]
& les ferez boüillir avec de l’Eau-roſe
dans un pot de terre neuf verniſſé:
vous y adjouſterez de l’eau de cloud de
Girofle, & de Canelle, de chacun de-
mie once, une poignée de cimes &
fleurs de Lavande, quatre livres de
panne de porc bien blanche, coupée
par morceaux, deſquelles vous oſterez
les peaux & fibres: faites boüillir le
tout à petit feu l’eſpace de quatre heu-
res; mettez ſur la fin une demie livre
de cire blanche grenée, remuez le tout
ſur le feu un quart d’heure, jettez-en
une petite goutte ſur le feu, ſi elle ne
fait point de bruit la pommade eſt cuit-
te; ſinon il faut continuer le feu juſ-
ques à ce que l’eau ſoit tout-à-fait con-
ſommée: puis vous paſſerez par l’éta-
mine dans une terrine dans laquelle il
y aura deux livres d’Eau-roſe: quand
elle ſera fioide, vous leverez la pom-
made avec une cuilliere, & la pilerez
& laverez comme il a eſté dit des au-
tres pommades. Elle eſt excellente pour
toutes ſortes de teins, & s’applique ſoir
& matin.
|| [ID00332]
Autre pommade.
PRenez une douzaine de pommes
d’Api, que vous pelerez, oſterez
le cœur, & couperez par tranches, &
les mettrez infuſer un jour entier dans
de l’Eau-roſe avec une once d’eau de
Canelle, de telle ſorte que l’eau cou-
vre les pommes de la hauteur d’un
doigt: prenez ſix onces de pannes de
porc, oſtez-en les fibres & peaux, com-
me il a eſté dit, & les coupez par mor-
ceaux, & mettez le tout dans un pot
verniſſé, & faites fondre à petit feu,
puis boüillir à feu doux juſques à ce
que les pommes ſoient bien cuittes;
puis paſſez par la chauſſe, une terrine
deſſous où il y aura une chopine d’Eau-
roſe, laiſſez refroidir, puis levez la
pommade avec une cuilliere, & la la-
vez, dulcorez, & pilez juſques à ce qu’el-
le ſoit bien blanche; incorporez avec
quelques grains de muſc, d’ambre, ou
de civette, & la ſerrez dans un pot bien
net & couvert. Cette pommade eſt
bonne pour le viſage, pour les mains,
& les cheveux: Elle s’applique le ſoir.
|| [ID00333]
Pommade contre les dartres vives.
PRenez une once de mouches
Cantarides, & les pulveriſez, & les
mettez diſſoudre dans un peu de vin:
prenez quatre onces de ſuif de mou-
ton bien lavé & purifié dans de l’Eau-
roſe: faites-le fondre, & incorporez la
poudre des Cantarides avec, & oſtez
de deſſus le feu, & remuez touſiours
juſques à ce que la pommade ſoit froi-
de. Il en faut mettre ſoir & matin ſur
les dartres; trois jours de ſuite ſuffiſent;
puis il ſe faut frotter apres, huit jours
de temps de la pommade de Chevreau.
Pommade contre les dartres
farineuſes.
PRenez ſix oignons de Lys, & les
faites cuire dans de l’eau commune
juſques à ce qu’ils ſoient comme de la
boüillie: faites-les égouter dans un lin-
ge, puis les pilez dans un mortier avec
deux cuillerées de miel de Narbonne,
& une cuillerée de vinaigre blanc di-
ſtillé; puis vous y adjouſterez deux on-
ces des quatre ſemences froides, mon [ID00334] dées
& bien pilées: incorporez le tout
enſemble, & en faites pommades. Il
faut s’en mettre un mois de ſuite tous
les ſoirs en ſe couchant.
Pommade pour emhellir le viſage, &
qui oſte les aſpretez de la peau
provenantes du ſoleil.
VOvs prendrez quatre onces de
graiſſe de Chapon, & la mettrez
tremper dans de l’eau de fontaine trois
jours: changez-la deux ou trois fois le
jour d’eau, & la maniez auec les mains
pour la rendre plus blanche: mettez-la
dans une terrine verniſſée, avec deux
onces de pommade de pieds de mou-
ton, une once de cire blanche, eau de
lys quatre onces: remuez bien le tout
avec une Eſpatule en fondant, & fai-
tes boüillir environ un quart d’heure à
petit feu: apres paſſez par un linge dans
une terrine où il y aura de l’Eau-roſe;
laiſſez refroidir, puis lavez la pomma-
de avec la cuilliere, & la pilez dans un
mortier juſques à ce qu’elle ſoit bien
blanche, & la ſerrez dans un pot en
[ID00335]
lieu ſec. Il en faut mettre le ſoir en ſe
couchant, & le matin au ſortir du
lict, & s’eſſuyer le plus tard que l’on
pourra.
Autre pommade pour le meſme.
PRenez beure de May, graiſſe de
Chevreau, ſuif de Bouc, pommade
de pieds de mouton, de chacune trois
onces: faites fondre le tout dans une
terrine verniſſée, avec de l’eau de
Courge & de Morelle, de chacune de-
mie livre; faites boüillir une heure, &
adjouſtez ſur la fin deux cuillerées d’eau
de Girofle, & une cuillerée d’??? de
Canelle; puis paſſez & pilez comme
vous avez fait cy-deſſus. Il en faut met-
tre le matin ſur le viſage devant le feu,
& eſtre demie heure ſans s’eſſuyer.
Pommade contre le hâle.
PRenez deux onces d’huile de noix,
lavez-la deux fois dans de l’Eau-ro-
ſe; oſtez l’eau, & mettez l’huile dans
une terrine ſur le feu avec une once de
cire blanche coupée par morceaux:
quand elle ſera fonduë remuez juſques
[ID00336]
à ce qu’elle ſoit froide; mettez-la dans
de l’eau: il faut changer l’eau tous les
jours. L’on mettra de cette pommade
quand on ira au ſoleil.
Pommade contre les rides du
viſage.
VOvs prendrez ſuc d’oignons de
Lys blancs, & miel de Narbon-
ne, de chacun deux onces; cire blan-
che fonduë une once: incorporez le
tout enſemble, & faites pommades Il
en faut mettre tous les ſoits, & ne s’eſ-
ſuyer que le matin avec un linge.
Autre pommade contre les rides
du viſage.
PRenez ſix œufs frais, & les faites
durcir; oſtez en les jaunes, & met-
tez en leur place de la Myrrhe, & du
ſucre candy en poudre, partie égale:
rejoignez les œufs, & les expoſez ſur
une aſſiete devant le feu: il en ſortira
une liqueur que vous incorporerez
avec une once de graiſſe de porc. Il faut
s’en mettre le matin, & la laiſſer ſei-
cher, & puis s’eſſuyer.
|| [ID00337]
Autre pommade contre les rides.
PRenez huile de cire, eſprit de
Therebentine, ſemence de baleine,
de chacun une once: faites fondre une
livre de ſuif de Cerf dans un pot neuf
verniſſé avec quatre onces d’Eau-roſe;
puis incorporez les drogues ſuſdites, &
les paſſez par un linge dans une terrine
où il y aura de l’Eau-roſe, ou quelque
autre bonne eau; laiſſez refroidir, puis
levez, & pilez la pommade comme il
eſt dit. Elle s’applique ſoir & matin.
Pommade contre les lentilles &
rouſſeurs.
PRenez fiel de beuf, eſprit de
Soufre, éponge bruſlée, ſuif de
mouton, partie égale, de chacun une
drachme: incorporez le tout enſem-
ble, & en faites pommade. Il en faut
mettre le ſoir en ſe couchant ſur les len-
tilles & rouſſeurs, & ſe laver le matin
avec de l’eau de Fraiſe.
|| [ID00338]
Autre pommade contre les lentilles
& rouſſeurs.
VOvs prendrez deux pommes de
Capendu, Celeri, Fenoüil, de
chacune une poignée; farine d’orge
deux drachmes: faites boüillir le tout
enſemble un quart d’heure dans quatre
onces d’Eau-roſe; puis adjouſtez une
once de fine farine d’orge, le blanc de
quatre œufs frais, & une once de graiſſe
de Cerf; paſſez le tout par l’étamine
dans une terrine où il y aura un peu
d’Eau roſe, lavez, dulcorez, & pilez
comme aux autres pommades. Il faut
mettre le plus ſouvent que l’on pour-
ra de cette pommade pour oſter les
lentilles & rouſſeurs, & continuer juſ-
ques à ce qu’elles ſoient tout-à-fait
effacées. Il faudra apres ſe garder du
ſoleil, du grand air, & du hâle.
|| [ID00339]
Pommade contre les fentes ou crevaſ-
ſes qui viennent aux lévres,
& aux mains.
VOvs prendrez graiſſe de Cerf,
ou de Chevreau ſix onces, graiſſe
de porc frais quatre onces: coupez leſ-
dites graiſſes par petits morceaux, &
les lavez cinq ou ſix fois de ſuite dans
du vin blanc; puis exprimez ſi long-
temps & ſi fort, que tout le vin ſoit
écoulé: mettez-les fondre dans un
vaiſſeau de terre neuf, & plombé, &
y adjouſtez des racines d’Iris coupées
par tranches demie once, une noix
Muſcade, deux ou trois pommes de
Reinettes pelées & coupées par tran-
ches, une livre d’Eau-roſe, une once
de Cire, une demie once d’eau de Gi-
rofle: faites fondre le tout à petit feu,
puis boüillir environ une demie heure:
apres paſſez dans un linge, une terrine
deſſous, dans laquelle il y aura quel???
que bonne eau: laiſſez refroidir, & le-
vez la pommade comme il a eſté dit cy-
deſſus, & la pilez dans vn mortier de
[ID00340]
marbre, & l’incorporez avec deux on-
ces d’huile de cire. Il en faut mettre
rous les ſoirs un peu ſur les lévres en ſe
mettant au lict. Pour les mains, on ſe
les en frottera ſoir & matin. Il faut
s’abſtenir de mettre ſes mains dans
l’eau, juſques à ce que l’on ſoit parfai-
tement gueri.
Pommade contre le hâle du ſoleil, &
contre le hâle du froid.
PRenez racine de Coulevrée,
oſtez-luy l’écorce, pilez-la, & la
faites cuire avec de l’huile d’Amandes
douces: quand elle ſera bien cuite in-
corporezavec, ſur le feu, partie égale
de Cire neufve blanche, vn peu de
ſucre candy; & ſur chaque once de
ladite compoſition il faut y meſler
vingt grains de Camphre: coulez-la &
l’enfermez dans un vaiſſeau de verre
pour la garder. Quand on voudra ſe
ſervir de cette pommade, il la faudra
delayer dans la paume de la main avec
un peu de ſalive, & l’appliquer ſur le
viſage. Elle leve le hâle, & empeſche
[ID00341]
qu’il ne vienne ſi on s’en met par pre-
caution.
Pommade contre les taches noires,
blanches, rouſſes & verdaſtres
qui viennent au viſage.
PRenez ſuc de Limons, & blanc
d’œufs, égale partie; battez-les
bien fort enſemble, mettez-les dans
une tertine ſur le feu, avec un peu de
graiſſe de poulle, & remuez touſiours
juſques à ce que le tout ſoit en conſi-
ſtence de pommade. Il s’en faut mettre
tous les ſoirs, & continuer juſques à ce
que leſdites taches ſoient parties.
Pour faire le Carmin.
PRenez demy gros de Choüan en
poudre, & le mettez dans une ter-
rine verniſſée avec une livre d’eau de
[ID00342]
fontaine: faites le boüillir ſur le feu à
gros boüillons, puis coulez par un lin-
ge dans une terrine, & le remettez ſur
le feu, & y adjouſtez deux gros de
Cochenille en poudre, & faites boüillir
à petits boüillons auta̅t comme deſſus;
puis mettez un demy gros d’Autour
en poudre, & le laiſſez boüillir un de-
my quart d’heure, puis paſſez dans un
linge comme deſſus, & mettez dans
la coulature une pincée d’Alun en pou-
dre pendant qu’elle eſt chaude; vous
la laiſſerez repoſer dans une terrine
quinze jours; ſi elle moiſit il n’im porte:
oſtez l’eau par inclination, & laiſſez
ſeicher au ſoleil la poudre qui reſtera
au fond: prenez de la gomme Adra-
gant à diſcretion, & la faites diſſoudre
dans de l’Eau-roſe: prenez un peu de
cette diſſolution, & delayez de la pou-
dre ſuſdite avec, & la ſerrez dans une
boëte. Pour s’en ſervir il faut prendre
un pinceau, & le tremper dedans, &
l’appliquer ſur les joües, & lévres,
apres l’étendre avec le doigt.
|| [ID00343]
Autre rouge pour le viſage.
VOvs prendrez bois de Breſil en
poudre une once, & le mettrez
infuſer vingt-quatre heures ſur des
cendres chaudes dans de fort vinaigre
diſtillé, de ſorte que le vinaigre ſurpaſ-
ſe ladite poudre de deux doigts: apres
quoy vous y adjouſterez deux livres
d’eau, & ferez boüillir le tout juſqu’à
dimnutio̅ des trois parties: ce qu’eſtant
fait vous y adjouſterez demy quarteron
d’Alun en poudre, & demie once de
colle de poiſſon coupée par morceaux:
quand elle ſera diſſoute, paſſez & met-
tez dans des boëtes. Il s’applique com-
me deſſus.
Autre rouge.
PRenez Sandal rouge bien pilé une
once, verſez deſſus une livre de vi-
naigre diſtillé: faites boüillir juſques à
diminution des trois parts, puis y ad-
jouſtez une pincée d’Alun en poudre,
& deux cuillerées d’Eau-roſe, dans la-
quelle aura diſſout de la gomme Adra-
gant; paſſez & mettez dans une boëte,
[ID00344]
& vous en ſervez comme il a eſté dit.
Autre rouge.
PRenez Orcanette, & gomme Lac-
que, de chacune un gros; verſez deſ-
ſus ſuffiſante quantité de jus de Citron
dans un petit pot de terre verniſſé:
faites infuſer une nuict ſur des cendres
chaudes, puis y adjouſtez une demie
livre d’Eau roſe, faites boüillir juſques
à diminution des trois parts, & paſſez,
& vous en ſervez comme il eſt dit.
Mouchoirs pour le viſage.
PRenez deux livres d’Alun, une
livre de Borax, gommes Adragant
& Arabique, de chacun une livre: fai-
tes infuſer le tout dans une pinte de
vin d’Eſpagne, ou d’excellent vin blanc
dans un vaiſſeau de verre bien bouché
au Bain-Marie, & l’y laiſſez trois
jours entiers: prenez une livre de Ce [ID00345] ruſe,
& la mettez dans un ſachet de
linge, & la faites boüillir dans un pot
neuf avec cinq livres d’eau de fontaine,
juſques à diminution de moitié: Pre-
nez cette eau, & une pinte de laict de
Chevre, & les mettez avec l’infuſion
cy-deſſus: prenez deux livres de Miel
blanc, trois livres de Therebentine de
Veniſe bien lavée, trois chopines de
vinaigre blanc diſtillé, & les faites
boüillir enſemble à reduction de moi-
tié; puis les mettez avec les choſes ſuſ-
dites. Prenez un gros Chapon plumé,
& le coupez par morceaux, & caſſez les
os, le blanc & les cocques de douze
œufs frais, quatre Citrons coupez par
tranches, demie once de cloud de Gi-
rofle: metrez tout ce que deſſus enſem-
ble, & diſtillez au Bain boüillant juſ-
ques à ce qu’il ne monte plus rien. Pour
ſe ſervir de cette eau il faut prendre
des mouchoirs de toile qui ne ſoit ny
groſſe, ny déliée; vous les ferez trem-
per une nuict dans cette eau, & les
laiſſerez ſecher doucement à l’ombre,
puis vous les reïtererez juſques à trois
fois. Lors que l’on voudra ſe ſervir de
[ID00346]
ces mouchoirs, il faut ſe decraſſer le
ſoir avec quelque bonne eau, & le ma-
tin ſe frotter avec un de ces mouchoirs,
qu’il faudra enveloper de papier blanc,
& le mettre en la poche pour s’en ſer-
vir lors que l’on ira en compagnie.
Pour les autres mouchoirs on les enve-
lopera avec du papier, & on les met-
tra dans une boëte bien bouchée. S’il
reſte de l’eau elle ſe garde long temps:
il la faut mettre au ſoleil dans une phio-
le de verre bien bouchée, pour s’en
ſervir quand on reblanchira les mou-
choirs. Vn mouchoir peut ſervir trois
mois: quand on voudra le racommo-
der il fa???dra le mettre à la leſſive, &
faire comme deſſus. Ces mouchoirs
blanchiſſent, nourriſſent, & tendent
la peau. L’on peut s’en frotter tant & ſi
peu que l’on voudra. Celles qui s’en
ſerviront doivent éviter le ſoleil, & le
grand air.
|| [ID00347]
Comme on le prepare à Montpellier.
PRenez quatre ou cinq fiels de
bœufs, & les vuidez dans une gran-
de terrine; mettez avec alun & ſel de
verre reduits en poudre, de chacun une
once: foüettez le tout avec une poi-
gnée de verge l’eſpace de deux ou trois
heures, que le tout ſera comme de la
mouſſe; puis vous le filtrerez par un
morceau de drap, & le laiſſerez paſſer
à loiſir: vous prendrez ce qui ſera paſſé,
& le mettrez dans une phiole de verre
double, avec deux onces de Borax,
deux gros de Camphre, & un gros de
Sublimé; expoſez la phiole au ſoleil
quinze jours, & l’agitez trois ou quatre
fois par jour; puis vous mettrez ladite
phiole dans une foſſe en la cave, de fa-
çon qu’elle ſoit toute couverte de tetre,
& l’y laiſſerez quarante jours; puis
[ID00348]
vous l’oſterez, & filtrerez. Quelques-
unes ſe ſervent de ce fiel preparé com-
me je viens de dire, les autres le font
diſtiller au Bain: pour moy je le trouve
meilleur ſans diſtiller que diſtillé. Il
corrode la peau; il eſt bon pour les
teins groſſiers; il leve le hâle, & garan-
tit du hâle: on le met le ſoir en ſe cou-
chant: il faut le lever le matin avec
quelque bonne eau, co̅me eau de Fraiſe,
ou eau de la Reine de Hongrie. Pour
la mouſſe qui eſt reſtée ſur le filtre n’eſt
propre à rien. I’ay donné advis de ne
point mettre de Sublimé dans les com-
poſitions, & il en entre dans celle-cy:
j’ay eſté obligée de l’eſcrire pour faire
un fidelle rapport de la compoſition
& preparation du fiel de bœuf de
Montpellier.
Preparation de Verjus.
VOvs prendrez de petits grains de
Verjus blanc, quand il n’eſt pas plus
[ID00349]
gros que de petits pois; fleurs de Lys
blancs, & fleurs de Sureau, de chacune
une livre; deux fiels de bœuf, une once
de Camphre, demie once de Borax:
diſtillez le tout au Bain boüillant juſ-
ques à ce qu’il ne monte plus rien: puis
expoſez ce qui ſera diſtillé dans une
bouteille quarante jours au ſoleil, &
ſerain. Il faut l’appliquer le ſoir: il de-
terge & corrode: il eſt bon contre les
tannes, & rouſſeurs. L’on peut faire
encore de cette façon quand les grains
ſont preſque meurs, qui corrode enco-
re plus que le precedent.
Doubleures de Maſque.
PRenez de la toile de chanvre jau-
ne, & la lavez cinq ou ſix fois dans
[ID00350]
de l’Eau-roſe, la laiſſant ſecher douce-
ment à chaque fois: puis vous latrem-
perez dans des jaunes d’œufs, que vous
delayrez premierement avec un peu
d’Eau-roſe, dans la quelle vous aurez fait
diſſoudre de la gomme Adragant ce
queladite eau aura pû diſſoudre; faites
ſecher la toile ſur un carré de bois bien
tenduë, puis en taillez vos doubleures
de Maſque.
Autre doubleure.
LAvez la toile comme deſſus, puis
l’imbibez avec des jaunes d’œufs,
& de l’huile des quatre ſemences froi-
des tirée ſans feu, de ſorte que les œufs
& l’huile penetrent ladite toile, & fai-
tes ſecher comme deſſus. L’on peut
auſſi faire des doubleures de Maſques
avec de la cire blanche, & de l’huile
d’Amandes douces, apres avoir eſté
abreuvée de jaunes d’œufs.
|| [ID00351]
Cornettes iaunes de iour.
PRenez un jaune d’œuf, & quatre
cuillerées d’eſprit de vin; battez-les
bien enſemble avec une cuilliere, &
trempez voſtre Cornette dedans, que
vous aurez premierement purgée trois
ou quatre fois avec de l’Eau-roſe; &
puis laiſſez-les ſecher à l’ombre.
Autre façon de iaunir les Cornettes.
PRenez la ſeconde écorce du bois
de Berberis, ou Eſpine-vinette;
mettez-la tremper dans de l’eau de ri-
viere vingt-quatre heures: quand vous
verrez l’eau jaune trempez vos Cor-
nettes dedans, & les mettez ſecher ſans
les preſſer.
Autre.
VOvs prendrez dix grains de Sa-
fran, & verſerez une once d’eſprit
de vin deſſus; & lors que l’eſprit de vin
ſera bien coloré, vous le verſerez par
inclination, & en remettrez d’autre,
& continurez juſques à ce que voſtre
Safran ne rende plus de teinture: mélez
[ID00352]
avec l’eſprit teint ſuffiſante quantité de
vin blanc, de ſorte que la liqueur ſoit
d’une couleur jaune un peu enfoncée;
puis trempez vos Cornettes dedans,
que vous laiſſerez ſeicher comme
deſſus.
Pour faire Cornettes de nuict.
PRenez de la toile jaune de Chan-
vre, qui ne ſoit ny trop fine, ny trop
groſſe, & en faites Cornettes, que
vous laverez deux ou trois fois dans de
l’Eau-roſe, puis vous les laiſſerez ſe-
cher; puis vous les frotterez avec des
jaunes d’œufs frais, de ſorte que les
jaunes d’œufs les penetrent de part en
part: apres faites fondre de la cire, &
meſlez avec de l’huile d’Amandes dou-
ces, on des quatre ſemences froides;
puis trempez les Cornettes dedans, &
les étendez ſur un morceau de papier,
& paſſez un rouleau deſſus, & les ſer-
rez entre deux papiers, & les mettez
en lieu temperé, de peur qu’elles ne ſe
gaſtent. Il eſt à obſerver de faire fondre
la cire tres-doucement; & lors que
l’on trempera les Cornettes dedans,
[ID00353]
que la compoſition ne ſoit que tiede,
de peur de cuire les œufs deſquels l’on
a frotté les Cornettes au precedent.
Autre maniere d’accommoder les Cor-
nettes de nuict.
VOvs prendrez pommade de pieds
de mouton une once, graiſſe de
Chevreau, & de porc frais, de chacune
une demie once; Cire grenée une on-
ce: faites fondre le tout enſemble à
petit feu dans une terrine verniſſée,
puis y adjouſtez une once d’huile de
Courge: Vous tremperez vos Cornet-
tes dedans, que vous aurez au prece-
dent purifiées avec de l’Eau-roſe, &
frottées dans des jaunes d’œufs; vous
les étendrez ſur du papier, & ferez
comme deſſus.
|| [ID00354]
Paſte pour les mains.
PRenez des quatre ſemences froi-
des mondées, de chacune quatre
onces, Pignon deux onces, Amandes
douces pelées demie livre; pilez pre-
mierement les quatre ſemences froides:
quand elles ſeront en paſte, mettez le
Pignon, que vous incorporerez avec;
puis vous mettrez peu-à-peu les Aman-
des. Il faut pour le moins quatre heu-
res pour bien piler le tout: vous met-
trez deux jaunes d’œufs frais; incorpo-
rez bien le tout enſemble, puis la paſte
ſera faite, que vous mettrez dans un
pot, & un peu de ſucre par deſſus: elle ſe
garde long-temps. Il en faut frotter les
mains tous les matins, puis les eſſuyer
avec un linge blanc.
|| [ID00355]
Autre paſte pour les mains.
PRenez Amandes douces pelées
une livre, poudre d’Iris une once,
Pignon quatre onces, ſemence de Ba-
leine vne once: pilez bien le tout en-
ſernble juſques à ce qu’il ſoit en conſi-
ſtence de paſte: incorporez avec deux
onces d’huile des quatre ſemences froi-
des, & les jaunes de deux œufs frais;
faites boüillir dans un poilon avec un
demy ſeptier d’Eau-roſe, en remuant
touſiours avec vne Eſpatule, juſques à
ce que la paſte n’adhere plus au poilon.
Il en faut frotter les mains ſoir &
matin.
Autre paſte pour les mains.
VOvs prendrez Amandes ameres
pelées une livre, que vous pilerez,
puis y adjouſterez une once de Ceruſe,
une demie once d’amidon, les jaunes
de quatre œufs frais: faites boüillir le
tout dans un poilon avec ſix onces d’eſ-
prit de vin, & faites comme deſſus.
Pour s’en ſervir il en faut prendre gros
comme une noix, & en frotter les
[ID00356]
mains, & emplir ſa bouche d’eau, ou
de vin, que l’on verſera ſur les mains;
puis il les faut eſſuyer avec un linge
blanc.
Autre paſte.
PRenez Amandes pelées une liure,
& les pilez, puis y adjouſtez blanc
d’Eſpagne, & poudre d’Iris, de cha-
cun une once; laict de Chevre quatre
onces, mie de pain de Chapitre une
once, huile d’Amandes douces deux
onces, les jaunes de deux œufs frais:
incorporez le tout enſemble, & faites
cuire comme il a eſté dit, & vous en
frottez les mains ſoir & matin.
Pommade qui blanchit les mains.
PRenez des pommes de Capendu
à diſcretion, deſquelles vous oſte-
rez les pelures, & pepinieres, & les
coupez par tranches, puis les pilez
dans un mortier de marbre juſques à ce
qu’elles ſoient comme de la paſte: in-
corporez avec la mie d’un petit pain de
Chapitre reduit en poudre bien déliée;
imbibez le tout avec Eau-roſe, & vin
[ID00357]
blanc, partie égale; puis pilez une de-
mie livre d’Amandes ameres, que vous
meſlerez avec, & y ad ouſterez quatre
onces de Savon de Gennes rappé: in-
corporez bien le tout, & mettez dans
un poilon ſur le feu, en remuant toû-
jours avec une Eſpatule, juſques à ce
que l’Eau-roſe, & le vin ſoient evapo-
rez, & que la pommade n’adhere point
au poilon. Il en faut frotter les mains
ſoir & matin: elle ſe garde long-
temps, & meſme l’on en peut faire ſa-
vonnettes.
Pommade pour le viſage, & pour
les mains.
PRenez beure frais du mois de May,
Therebentine de Veniſe bien lavée,
de chacune une livre; le ſuc de ſix Ci-
trons: mettez le tout ſur le feu dans un
pot neuf verniſſé, avec quatre onces
d’Eau-roſe; faites boüillir à petit feu
juſques à ce que la Therebentine ſoit
cuite, & que l’Eau-roſe ſoit evaporée:
ce que vous connoiſtrez en mettant
une goutte refroidir: ſi elle ne s’attache
[ID00358]
point aux doigts elle eſt cuite. Il ne faut
oublier de remuer avec l’Eſpatule juſ-
ques à ce qu’elle ſoit froide. Pour luy
donner de l’odeur on pourra y adjoû-
ter de l’eau de fleurs d’Orange, & de
Girofle. Il s’en faut frotter le viſage, &
les mains ſoir & matin.
Autre pommade pour les mains.
PRenez Borax, ſel commun prepa-
ré, Alun de roche, de chacun une
drachme; vous les pulveriſerez & ren-
drez impalpables: prenez les blancs de
ſix œufs frais, & trempez un morceau
d’éponge dedans, puis la preſſez, & l’y
faites rendre ce qu’elle aura pris. Fai-
tes cela tant de fois que les blancs
d’œufs ne rendent plus aucune écume:
mettez les poudres cy-deſſus avec dans
une petite terrine, & y adjouſtez le
ſuc de deux Citrons, puis mettez la ter-
rine ſur des cendres chaudes, & remuez
touſiours avec une Eſpatule, juſques à
ce que tout ſoit en conſiſtence de pom-
made. Elle eſt bonne pour les mains, &
pour le viſage: elle oſte les tannes, &
adoucit le cuir.
|| [ID00359]
Autre pommade pour les mains.
IL faut prendre les blancs de ſix œufs,
& les purifier comme deſſus, puis in-
corporer avec Amidon, & Ceruſe en
poudre, de chacun une once; huile des
quatre ſemences froides deux onces:
mettez le tout dans une petite terrine
ſur le feu, & remuez avec une Eſpatule
juſques à ce qu’il ſoit en conſiſtence de
pommade. Il faut en frotter les mains
tous les matins. Elle eſt auſſi excellente
contre le hâle quand on va au ſoleil. Il
en faut mettre ſur le viſage ſans l’eſ-
ſuyer, puis on l’oſtera le ſoir avec de
l’eau de Fraiſes.
Pommade contre les fentes, & crevaſ-
ſes qui viennent aux
mains.
PRenez du froment, & le mettez
ſur une aſſiete: faites rougir au feu
une pelle de fer, puis la mettez ſur le
froment, ſans qu’elle le touche: il en
ſortira de l’huile; prenez deux onces de
cette huile, ſix onces de graiſſe de pou [ID00360] le,
une once d’huile de noix; mettez le
tout dans une petite terrine ſur le feu;
incorporez le tout enſemble, puis paſ-
ſez par l’étamine dans un vaiſſeau où il
y aura un peu d’Eau-roſe; laiſſez refroi-
dir, puis levez la pommade, & la pi-
lez, & y adjouſtez deux ou trois gout-
tes d’eſſence de Cloud. Il faut mettre
de cette pommade ſoir & matin; apres
mettre des gans frottez de ladite pom-
made.
Savon pour blanchir les mains.
PRenez deux livres de Savon de
Gennes, rapez-le bien délié, & le
mettez ſecher au ſoleil juſques à ce
qu’il ſe puiſſe reduire en poudre tres-
fine: prenez écorces d’Oranges, & de
Citrons reduits en poudre, de chacune
une once; Iris de Florence en poudre
demie once: incorporez le tout avec
eſprit de vin, & huile de Tartre, par-
tie égale, autant qu’il en faudra pour
faire paſte. Pour donner de l’odeur
vous mettrez deux ou trois gouttes
d’huile de fleurs d’Orange, de Iaſmin,
& de Girofle, avec un peu de Muſc,
[ID00361]
ou d’Ambre gris, puis en formez des
ſavonnettes. Pour s’en ſervir il faut ar-
rouſer les mains d’un peu d’eau tiede,
puis les frotter d’une ſavonnette, & les
eſſuyer d’un linge blanc: ſi elles ne ſont
pas nettes de la premiere fois, il fau-
dra recommencer, & continuer tous
les matins.
Eau pour blanchir les mains.
PRenez une livre de la graine de
Iuſquiame, & la concaſſez; mettez-
la dans une Cucurbite; verſez deſſus le
ſuc de douze Citrons, & une livre
d’eſprit de vin; puis diſtillez au Bain
boüillant. Il faut laver les mains de cet-
te eau tous les matins, puis mettre des
gans cirez.
|| [ID00362]
Ptiſane pour engraiſſer.
PRenez raclure d’yvoire, & de
corne de Cerf, de chacune une once;
Ambre jaune demie once, quatre on-
ces de raiſins de Damas, deſquels vous
oſterez les pepins; une poignée de
grains de froment: faites boüillir le
tout dans quatre pintes d’eau, à dimi-
nution d’une pinte; apres filtrez. Il faut
boire de cette ptiſane trois ou quatre
verres tous les jours, & continuer qua-
rante jours. Avant que de s’en ſervir il
eſt neceſſaire d’eſtre purgé.
Autre ptiſane qui engraiſſe, & fait
dormir.
PRenez gruau d’avoine, & farine
d’orge, de chacune une livre; ſix
pommes de Reinettes coupées par tran-
ches; mettez le tout dans un vaiſſeau
[ID00363]
neuf de terre verniſſé, avec dix pintes
d’eau; faites boüillir juſques à diminu-
tion de moitié: apres paſſez par un lin-
ge, & mettez du ſucre à diſcretion. Il
en faut boire le matin, & trois heures
apres diſner, & le ſoir en ſe couchant,
un grand verre à chaque fois. Cette
ptiſane, outre qu’elle fait dormir, &
engraiſſe, elle humecte & rafraichit.
Elle eſt bonne pour les vieilles perſon-
nes, & pour les jeunes.
Autre ptiſane pour le meſme.
IL faut prendre froment, avoine &
orge, de chacun une poignée; raci-
nes de Nenuphar, & de Cichorée bien
nettes, de chacune deux onces; miel de
Narbonne demie livre: faites boüillir
le tout dans ſix pintes d’eau à reduction
de moitié; écumez & paſſez par un lin-
ge, & en prenez comme il eſt dit cy-
deſſus.
|| [ID00364]
Maniere de purifier & cirer
des gans.
PRenez des gans de cuir minces &
pateux; lavez-les dans de l’eau de
fontaine quinze ou vingt fois de ſuite,
juſques à ce qu’ils rendent l’eau bien
claire: à la derniere fois vous les lave-
rez dans de l’Eau-roſe, & les laiſſerez
ſecher doucement à l’ombre: puis pre-
nez des jaunes d’œufs frais, & trempez
les gans dedans, & les frottez de telle
ſorte que les jaunes d’œufs penetrent
les gans de part en part, apres trem-
pez-les dans de l’huile de fleurs d’O-
range, ou de Iaſmin, au defaut de l’hui-
le d’Amandes douces, ou de l’huile
des quatre ſemences froides: étendez
les gans ſur un papier, & les laiſſez
ſecher doucement entre deux papiers,
& les mettez une ou deux fois à l’air,
de peur qu’ils ne ſe gaſtent, & les ſer-
rez dans un lieu ſec.
|| [ID00365]
Autre maniere pour les gans.
PVrifiez vos gans comme il a eſté
dit cy-deſſus, & les frottez dans des
jaunes d’œufs frais: apres prenez de la
pommade de Chevreau deux onces,
cire jaune, ou blanche, une once, hui-
le d’Amandes douces une once: faites
fondre le tout enſemble, & trempez
les gans dedans, & les frottez, & in-
corporez ſi bien leſdites drogues qu’el-
les penetrent les gans: apres les éten-
dez ſur du papier blanc, & les tirez de
la façon que vous voulez qu’ils demeu-
rent: paſſez un rouleau de bois par
deſſus pour les unir, & les ſerrez en
lieu ſec. Si vous les voulez parfumer
vous adjouſterez à la compoſition quel-
que huile odoriferante, comme de
fleurs d’Orange, ou de Iaſmin.
Autre pour les gans.
APres avoir lavé les gans, & pu-
rifié comme deſſus, il ſuffit de les
laver dans de l’huile d’Amandes dou-
ces, ou de Courge, ou bien des quatre
ſemences froides; cela dépend de la
[ID00366]
volonté. Il eſt neceſſaire que le jaune
d’œuf ſoit employé aux gans avant que
de ſe ſervir deſdites huiles, dautant que
c’eſt la baſe, & que luy ſeul ſuffit: je
donne advis de ne ſe point ſervir d’hui-
le ſeule pour laver les gans, dautant
qu’elle a beſoin de quelque choſe qui
l’arreſte; c’eſt pourquoy il y faut meſler
de la cire. Les gans qui ne ſeront ſeule-
ment lavez que d’huile, il faut mettre
d’autres gans par deſſus pour empeſ-
cher qu’ils ne gaſtent les habits.
Eau pour blanchir les dents, & pour
fortifier les gencives.
PRenez Sel gemmes, Alun de ro-
che, Soufre en canon, de chacun
deux onces; Borax une once, perles &
Corail concaſſez, de chacun une de-
mie once; vinaigre blanc diſtillé quatre
onces: mettez le tout dans une Cornuë,
[ID00367]
& faites digerer une nuit ſur cendres
chaudes, puis diſtillez au feu de ſable
pouſſez le feu ſur la fin. Il faut laver les
dents de cette eau avec un petit linge:
elle blanchit & fortifie les gencives,
& guerit les ulceres qui viennent à la
bouche.
Eau pour les dents gaſtées.
PRenez du ſuc de Courge ſauvage
deux livres, écorce de Meurier de-
mie livre, Piretre & Iuſquiame, de cha-
cune ſix onces; Alun de roche, Sel
gemme, Borax, de chacun une once:
mettez dans la Cornuë, & diſtillez au
feu de ſable juſques à ce qu’il ne monte
plus rien. Il faut prendre une part de
cette eau, & autant de vin, & les faire
chauffer, & s’en laver la bouche. Elle
oſte toutes ſortes de pourritures, &
mange les chairs mortes.
Baſtons pour blanchir les dents.
PRenez gomme Adragant une once,
pierre de Ponce deux gros, gomme
Arabic demie once, & Criſtal en pou-
dre tres ſubtile une once: faites diſſou [ID00368] dre
les gommes dans de l’Eau-roſe, &
incorporez les poudres avec, & en for-
mez baſtons, que vous laiſſerez ſecher
doucement à l’ombre: quand il ſeront
ſecs vous vous en frotterez les d’ents.
Opiat pour blanchir & conſerver
les dents.
PRenez Sang de dragon, Alun de
roche calciné, Encens maſle, Sel
preparé & Sel de roſes, de chacun deux
gros, bourre d’écarlate dix grains: in-
corporez le tout dans de l’huile roſat,
& en frottez les dents.
Autre Opiat.
VOvs prendrez fueilles d’Hyſope,
d’Origan, & de Mente ſeches,
de chacune demie once; Alun de ro-
che, corne de Cerf, ſel commun, de
chacun une drachme: mettez toutes ces
choſes bruſler dans un pot ſur les char-
bons ardans: quand elles ſeront brû-
lées vous y adjouſterez Poivre & Ma-
ſtic, de chacun demie drachme, Myr-
rhe un ſcrupule: redu ſez toutes ces
choſes en poudre ſubtiles, & les incor [ID00369] porez
avec Storax liquefié en Eau-roſe
en conſiſtence d’Opiat. Il faut en frot-
ter les dents le matin, & apres laver la
bouche avec du vin tiede.
Poudres pour les dents.
L’On peut faire poudre de toutes les
choſes qui ſuivent, leſquelles blan-
chiſſent & fortifient les dents; ſçavoir
Sandal rouge, ſang de Dragon, noix
de Galle, Carabé blanc & jaune, Ma-
ſtic, Perles, farine d’orge, Canelle,
raclure d’yvoire, & de corne de Cerf,
Corail, bois d’Aloës, les fueilles de
Tamaric, racines d’Ozeille, & Tartre
de vin blanc: toutes ces choſes redui-
tes en poudre, chacun en particulier,
blanchiſſent les dents: comme auſſi la
croûte de pain bruſlée, la pierre de
Ponce, & Alun calciné, la poudre faite
de pots de grais, de tuilles, & de bri-
ques. Il faut ſe laver la bouche apres
s’eſtre ſervy de ces poudres, d’eau de
Sauge, ou de Mente, laquelle eſt ex-
cellente pour cet effect.
|| [ID00370]
Eſprits ou Eſſences propres pour
les dents.
L’Esprit de Soufre, de Vitriol,
de Sel-marin, de Salpetre & d’A-
lun, blanchiſſent les dents & les cor-
rodent, & levent les chancres, & les
rendent claires & blanches. Il faut les
frotter legerement avec un petit baſton,
ou racines, comme il ſera dit cy-apres,
dautant qu’ils corroderoient & bruſle-
roient la chair: il faut ſe laver la bouche
apres avec du vin tiede.
Pour preparer les racines & bois pour
frotter les dents.
PRenez petits baſtons de Lierre, &
racines de Guimauves, & les faites
boüillir dans du vinaigre avec un peu
de Sel & d’Alun: & lors que les racines
commenceront à s’atendrir, & que le
bois ſe pellera, oſtez-les de deſſus le
feu, & les faites ſecher doucement;
puis vous en ſervez à frotter les dents
apres les repas.
|| [ID00371]
Teinture pour faire le poil blond.
PRenez limaille de Cuivre, Sel
gemme, de chacun demie livre;
racines de Coulevrée une livre: coupez
les racines, & les pilez, & les mettez
dans une Cornuë, & le ſel & limaille:
faites les infuſer une nuict, puis diſtil-
lez au feu de rouë juſques à ce qu’il ne
ſorte plus de fumée. Pour ſe ſervir de
cette eau il faut faire diſſoudre de la
gomme Adragant dans de l’Eau-roſe
ce qu’elle en pourra diſſoudre: prenez
une part de cette eau, & une part de
l’eau diſtillée, & les faites un peu chauf-
fer, & moüillez les cheveux avec des
broſſes, ou un petit pinceau, & laiſſez
ſecher avant que de ſe peigner.
Autre maniere de teindre les cheveux
en blond.
PRenez Eſtain de glace, Alun de
roche, Vitriol Romain, Soufre jau [ID00372] ne,
de chacun une livre; Aloës epatique
quatre onces, Safran une once, Cu-
curma deux onces: reduiſez le tout en
poudre, & le mettez dans une Cornuë,
& diſtillez au feu de rouë. Prenez une
livre de ladite eau, deux livres de vin
blanc, miel blanc une livre; mettez le
tout dans une phiole de verre, & l’ex-
poſez au ſoleil par quarante jours, &
l’agitez deux ou trois fois par jour. Pour
ſe ſervir de cette eau il faut l’appliquer
nn peu chaude avec un pinceau.
Teinture pour faire le poil noir.
PRenez noix de Galle une livre,
coupez les par morceaux, & les fai-
tes boüillir dans de l’huile d’olives juſ-
ques à ce qu’elles ſoient tendres: faites-
les ſecher, & les pilez tres-bien, & en
faites poudre: meſlez avec partie égale
de poudre de charbon de Sault une poi-
gnée, de ſel commun preparé & pilé une
poignée; un peu d’écorces de Citrons
& d’Oranges ſeichées & en poudre: Il
faut faire boüillir le tout dans douze
livres d’eau, juſques à ce que les dro-
gues demeurent en conſiſtence d’on [ID00373] guent;
duquel onguent on frottera les
cheveux, puis on les mettra ſous le
bonnet pour les faire ſecher: quand ils
ſeront ſecs il faut ſe peigner. Cette tein-
ture eſt excellente, & fortifie le cer-
veau; les cheveux ne rougiſſent ja-
mais: il faut en mettre une fois le
mois.
Paſte pour teindre le poil en noir.
PRenez de la Chaux vive deux on-
ces, éteignez-là dans de l’eau ce
ce qu’il en faudra pour la reduire en
poudre: incorporez avec ladite pou-
dre de Chaux une once de Litarge d’ar-
gent bien lavée deux ou trois fois dans
de l’Eau-roſe, & ſechée: incorporez le
tout, & en faites paſte. Il faut s’en frot-
ter les cheveux le ſoir, & ſe peigner le
matin.
Leßive pour faire croiſtre & revenir
les cheveux.
VOvs prendrez racines de vigne
blanche, racines de chanvre, &
trognons de choux tendres, de chacun
deux poignées: faites-les ſecher, puis
[ID00374]
bruſler, & des cendres faites-en leſſive.
Avant que de ſe laver la teſte de cette
leſſive, il faut la frotter avec du miel,
& continuer l’un & l’autre trois jours
de ſuite.
Pommade pour faire venir les
cheveux.
PRenez graiſſe de poule, huile de
chennevié, & miel, de chacune
quatre onces: faites fondre le tout dans
une terrine, & les incorporez enſemble
juſques à ce qu’ils ſoient en conſiſten-
ce de pommade. Il ſe faut frotter la
teſte huit jours de ſuite de cette pom-
made.
Eau pour faire tomber le poil.
VOvs prendrez; du polipode de
Cheſne, que vous fendrez & cou-
perez par morceaux, & le mettrez dans
une Cucurbite: verſez deſſus du vin
blanc qu’il ſurpaſſe d’un doigt; faites
digerer vingt-quatre heures au Bain,
puis diſtillez à l’eau boüillante juſques
à ce qu’il ne monte plus rien. Il faut
tremper un linge dans cette eau, &
[ID00375]
l’appliquer ſur le lieu d’où l’on voudra
faire tomber le poil, & l’y laiſſer toute
la nuit. Il faudra continuer juſques à
ce qu’il ſoit tombé. L’eau de fueilles &
racines de Celidoine diſtillée, & ap-
pliquée comme deſſus, fait le meſme
effect.
Eau de Chaux pour le meſme
effect.
L’Eav de Chaux vive diſtillée ope-
re plus promptement que les pre-
cedentes; une ſeule fois ſuffit, mais
auſſi elle eſt plus violente. Prenez de la
Chaux vive comme elle ſort du four-
neau, reduiſez-la en poudre, & la met-
tez dans une Cornüe, que vous rem-
plirez des trois parts, puis diſtille-
rez au feu de rouë. On tire peu d’eau
de cette operation. Il la faut appliquer
avec une plume ſur le lieu d’où l’on
veut faire tomber le poil, & ſe donner
de garde d’en mettre ailleurs. Apres
l’avoir miſe il faut frotter le lieu avec
de la pommade, ou avec de l’huile des
quatre ſemences froides; une ſeule fois
ſuffit.
|| [ID00376]
Pommade pour oſter la farine qu???
vient à la racine des
cheveux.
PRenez graiſſe de porc demie li-
vre, faites-la fondre dans une petite
terrine: incorporez avec fleurs de Sou-
fre, & Alun calciné, de chacun une
once: faites jetter un boüillon, puis
paſſez & exprimez. Il faut ſe frotter la
teſte de cette pommade deux ou trois
fois, & laiſſer deux ou trois jours entre-
deux.
Eau pour faire friſer les cheveux.
PRenez de la gomme Elemy une
once, & la mettez tremper dans une
livre d’Eau-roſe, laquelle vous fere???
boüillir un demy quart d’heure: quand
elle ſera froide il en faut humecter les
cheveux, puis les mettre dans des pa-
pillottes, ou ſous le bonnet.
FIN.
|| [ID00377]
|| [ID00378]
|| [ID00379]
|| [ID00380]