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Mon Seigneur
J’ay reçeu par le porteur de la presente les tresgracieuses lettres de V. A. dont
elle m’a voulu bienheurer, la remerciant infiniment du present des livres comme aussi
des ces belles plantes dont V. A. m’a voulu gratifier.
1 Je me trouve tellement
accablé par ses continuelles graces et faveurs, que ie despere de me pouvoir iamais
deuëment acquitter des mes obligations; Suppliant V. A. d’accepter en satisfaction ma
bonne volonté toute prompte pour obeïr à ses commendements en toutes les occasions ou
elle me jugerà capable de pouvoir rendre des agreables services. Touchant la
translation des Noms des Academiques Fructifiants
2 ie n’y remarque rien à corriger
l’estimant parfaictement bonne. Pour les fraix de faire imprimer le Sepmaines du
Bartas
3 ie suis content d’en fournir une partie sur les conditions proposez, et d’en
escrire au Singulier
4 pour faire le mesme, et en cas qu’il aye envie d’y contribuer,
nous bailerons l’argent selon l’ordre de V. A. aux marchands Silmes
5 demeurants en
ceste ville. Je suis tresaise que le livret du Grand Mogol
6 n’a esté desagreable à V.
A. en cas que ie trouveray des aultres semblables, ie ne manqueray de les envoyer.
Quant aux affaires du Digne
7 ils vont toutiours du mal en pis, toutesfois nous sommes
encores en traictez tant avec quelques uns des principaux Crediteurs, lesquels
menaçent de transporter [l]eurs actions ou prétensions au Roy, comme aussi avec ceste
ville pour [e]n tirer une bonne somme d’argent, le Magistrat a des-ia presenté sur
[c]ertaines conditions cent mille Reischstaler
[sic], Dieu
nous façe la grace d’en voir un bon succez au contentement de l’un et l’aultre. [73v]
Pour nouvelles il n’y a maintenant aultre, que la victoire Navale des Hollandois
contre les Espagnols,
8 et la desfaicte du Prince de Condé, en l’attacque qu’il fict
au camp Espagnol devant Salces au Royaume de Navarre ou Comté de Rouissillon.
9
L’arrest ou prison de L’Electeur Palatin
10 n’est que trop veritable, et s’est on
saisi des touts ses papiers et hardes ou on a trouvé lettres de change pour 200000
francs, et lettres du Roy de la Grande Bretagne par lesquelles Sa Majte. promet aux
Directeurs de l’Armée du feu Duc de Weimar de les assister et renforçer avec dix
mille Anglois et Escossois. C’est un mauvais affaire et de grande consequence,
a un
sujet d’une nouvelle guerre entre la France et la Grande Bretagne, et pour renverser
beaucoup des bons desseings
a mettant le dessus dessoubs, si Dieu n’y apporte remede
par un accomodement. Le Roy de la Grande Bretagne a des-ia faict arrester en son
Royaume toutes les navires et marchandises
a appartenants aux François. Quelques
personnages de qualité jugent par ces procedures du Roy de France, que Sa Majte
11 aye
faict une nouvelle alliance avec le Duc de Baviere et Ligue Catholique, et qu’elle
soit resolu de quitter tout à faict l’alliance avec les Protestants d’Allemagne; Le
temps nous descouvrirà ce qu’en est. Et me recommendant aux bonnes graces de V.A. et
de Madame la Princesse sa treschere ConSorte
12 , Je prie le Souverai[n] de les
conserver trestouts en bonne santé et bienheureu[x] [de]meurant jusques au tombeau,
De V.A.
D’Hambourg ce 25. Nov. l’an 1639. || [
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