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L'Italien marié à Paris [Auszug]
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ITALIEN (l') MARIÉ A PARIS ITALIEN (l') MARIÉ A PARIS, Comédie Françoise en prose & en cinq actes, suivie d'un divertissement, au Théatre Italien, par M. Ric coboni le pere, représentée pour la premiére fois le Lundi 29 Novembre 1729. (C'est la traduction de la piéce précédente, avec quel ques changements, non imprimée.)

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Le 29 Novembre 1728. les Comédiens Ita liens représentérent sur leur Théatre, une Comédie qui a pour titre, l'Italien marié à Paris, piéce Françoise en cinq actes, avec des agrémens. Cette piéce fut donnée pour la premiére fois avec beaucoup de succès en Juillet 1716. elle étoit pour lors en Italien, & le Sieur Lélio qui en est l'Auteur, se fit une réputation justement méritée; sa piéce n'a pas été aussi heureuse dans la traduction, quoi qu'on y ait laissé subsister le même fond, à quelques circonstances près, qui sembloient même devoir contribuer à la rendre encore meilleure, où du moins plus propre à notre Théatre: ne seroit-ce pas au prestige de la langue Italienne qu'il faudroit attribuer cette différence de succès? comme cela nous mé neroit trop loin, nous nous contenterons de donner ici un extrait de la piéce telle que nous venons de la voir. Lélio ouvre la scéne avec Colombine, sui vante de Clarice; cette derniére est fille de Pantalon, & Lélio l'a épousée à Paris, où elle avoit été élevée dès sa plus tendre enfan ce. Lélio n'ayant point changé de mœurs, pour avoir changé de lieu, prétend que sa nouvelle épouse vive en France comme si elle étoit en Italie. Clarice ne s'accommode pas de cet espéce d'esclavage auquel elle n'est point accoutumée, & Lélio veut absolument qu'elle renonce à la douce liberté dont le beau sexe est en possession chez nous. Il en fait un portrait des plus satyriques à Colom bine, & finit par une liste qu'il lui donne de
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toutes les personnes qu'il prétend chasser de sa maison, sur le pied de la nouvelle réforme qu'il y veut établir. Maître à Chanter, à Danser, à montrer du calvecin, & sur tout Revendeuses à la toilette; tout cela doit être éloign{é???} pour toûjours d'auprès de Clarice. Colombine a beau demander grace, & se débattre sur quelques articles, tout paroît suspect au Jaloux, qui, non content d'ôter ces petits agrémens à son épouse, lui veut faire de son appartement une prison impé nétrable, dont il sera le geolier inéxorable. Pendant qu'il prend des mesures si funestes à Clarice, un laquais vient lui dire que M. le Comte son Maître, suivi d'un Baron & d'un Chevalier, l'envoye pour sçavoir s'il y est; Lélio qui lui a déja crié qu'il n'y etoit pas, avant même qu'il fut entré, le traite d'imper tinent de ne l'avoir pas crû sur sa parole; il lui donne de l'argent, afin qu'il dise à ceux qui l'envoyent, qu'il ne l'a pas trouvé chez lui. Le valet prend l'argent & se {??? re i e}, & Lélio le reconduit jusqu'à la rue; pendant ce temps là, Arlequin, valet de la Comtesse, trouve le secret de s'introduire chez Lélio, chargé d'une lettre de sa Maîtresse qu'il doit rendre en main propre à Clarice; Lélio qui sur vient dans le moment, arrache cette lettre des mains d'Arlequin; & l'ouvre brusquement; tous les termes ordinaires d'amitié de femme à femme, lui paroissent les plus tendres expres sions d'amant à maîtresse; on vient l'avertir pour surcroît de chagrin, que Madame la Comtesse, le Comte, le Baron & le Cheva
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lier sont à sa porte. Il veut faire dire qu'il n'y a personne; mais par malheur Clarice a paru à la fenêtre, & a été apperçu de cette impor tune compagnie; il recommande à sa femme d'abréger la visite. Il n'avoit que faire de char ger Clarice de se soin, sa jalousie s'en acquitte bien mieux. Chaque baiser qu'on donne à sa femme, lui perce le cœur; il fait mille extra vagances; & après avoir congédié toute cette troupe, bon gré, malgré, il fait rentrer Cla rice dans sa chambre, & proteste de ne la plus laisser sortir. Ce que nous venons de dire fait à peu près la matiere du premier acte. Nous passerons légérement sur le détail des autres, pour n'être pas trop longs.
Lélio instruit de la prochaine arrivée de Pantalon son beau pere, craint que Clarice ne se plaigne à lui de sa jalousie; il prend le parti de la flatter du recouvrement de sa li berté; mais elle lui reproche son excessive dureté, & lui proteste qu'elle est résolue à se donner la mort pour mettre fin à ses mal heurs. Lélio effrayé de sa résolution, lui pro met d'avoir à l'avenir de meilleurs maniéres, & pour lui en donner des preuves, il la prie de lui demander ce qu'elle souhaite. Elle se radoucit, & lui propose la promenade aux Thuilleries, l'Opéra, la Comédie Françoise & l'Italienne. Tout cela paroît trop dangé reux à Lélio; elle le prie enfin de lui per mettre d'aller à un bal qu'on doit donner ce jour même à une maison voisine. Comme elle y doit être masquée, & qu'elle veut bien qu'il l'y accompagne sous le masque, il y consent.
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Ce bal sert de premiére fête. Le Comte, le Baron & le Chevalier dont on a déja parlé s'y trouvent. Clarice y danse; Lélio même ne peut refuser d'y danser. A la faveur du tu multe du bal, Clarice enlevée, son jaloux mari la cherche en vain, & l'appelle de toutes parts; il la croit perdue pour jamais. On la lui raméne enfin; il la reprend en jaloux & en brutal; il la renferme encore pour n'être plus exposé à pareil malheur. Pantalon arrive, & lui présente une prétendue niéce. Lélio a une conversation avec elle, & lui trouve des mœurs si éloignées de celles des Dames Fran çoises, qu'il la veut embrasser pour lui témoi gner le plaisir qu'il a de la voir si scrupuleuse ment attachées aux mœurs Italiennes; elle lui prouve l'austérité de sa vertu, par un souf flet, qui le met au comble de sa joye. Il ne balance plus à la charger de la conduire de Clarice, & promet une entiére liberté à cette derniére, pourvû qu'elle soit toûjours sous les veux de la sévére niéce. Il ordonne à Cla rice de l'embrasser & de la baiser pour l'amour de lui. Qu'arrive t'il? Pantalon déclare à Lélio que cette niéce n'est autre qu'un neveu travesti, pour se mettre à couvert de la pour suite de ses ennemis, & de la justice; il ajoûte qu'il a été forcé à ce travestissement pour avoir tué un homme à Venise, au sujet d'une Dame qu'il aimoit. Lélio quitte brusquement son beaupere, pour aller séparer sa femme de ce Cavalier; il chasse ce dernier honteusement de sa maison, & lui défend d'y remettre le pied. Cependant Clarice ne pouvant plus
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souffrit la persécution de son mari, trouve le moyen de s'évader, & d'aller avec la Com tesse son amie, dans une maison que cette derniére a à Chaillot. C'est là que la piéce finit; Clarice s'y trouve en bonne & belle compagnie. On y chante, on y danse; la fête est interrompue par l'arrivée du Jaloux, qui redemande à grands cris sa femme, comme un bien qu'on lui a enlevé. Clarice lui déclare hautement qu'elle aime mieux passer le reste de ses jours dans un Cloître, que de rentrer dans sa prison. Lélio lui jure qu'il lui laissera toute la liberté qu'elle peut souhaiter; elle est assez sage pour n'abuser pas des offres qu'on lui fait; elle consent à ne sortir jamais qu'avec lui, à ne faire aucune partie de plaisir dont il ne soir. Le raccommodement se conclut par l'entremise de la Comtesse & des autres amis communs; Clarice même, oblige son mari à danser avec elle pour commencer la fête, qui finit par des danses, des chansons & un vau deville qui terminent la piéce; tous les diver tissemens de cette Comédie sont de la com position de M. Mouret, qui ont été trouvés très-bien caracterisés.
Cette piéce fut représentée à la Cour le 2 Décembre (1728.) avec la petite Comédie du Portrait. Mercure de France, mois de Décembre, premier volume. p. 2071-2077.


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